

Alors que la Russie menace de renouveler son offensive en Ukraine, visite des positions de l'armée ukrainienne sur le font de Zolote, dans le sud-est du pays près de Luhansk.
Eric Biegala (journaliste à la rédaction internationale de Radio France).
Le front de Zolote c'est quelques immeubles en partie détruits pour certains ; un enchevêtrement d'arbustes noirs rabougris qui empêche de voire à distance. Et des merlons de sable durcis par le froid - le thermomètre affiche -14°C - pour défendre l'ensemble. Sur l'une de ces petites murailles on a posé un mannequin à l'effigie de Vladimir Poutine. Manifestement, il sert de cible pour les exercices de tir. Les premières tranchées commencent à quelques mètres de confirme le colonel Serhyi Postupalshi le commandant d'unité. Nerveusement, l'officier demande que nous nous abritions derrière l'immeuble. Nous sommes manifestement visibles : "Depuis peu dès que le soleil se couche, ils se mettent à tirer. Avec leurs mitrailleuses lourdes, mais il peut aussi y avoir des équipes de snipers".

Dans l'immeuble en question, le régiment à poste - la 24ème brigade mécanisée - a installé son centre de renseignement, c'est le Premier lieutenant Serhyi, 23 ans dont trois de service actif qui le commande : "On a des postes d'observation qui collectent l'information, explique-t-il, et qui la transmettent ici au centre de surveillance. On analyse ces renseignements et on fait remonter au commandement".
L'officier ne précisera pas exactement ce que voient ses instruments infrarouge, ou ce que rapportent les drones de surveillance et les observations des soldats mais les Russes sont là : à 600 mètres. Depuis peu ils se remettent à tirer. "Les dernières semaines étaient calmes mais les trois derniers jours ils tirent toutes les nuits. Tirs de fusil mais aussi de mortiers lourds. Pendant la journée c'est calme : pas de tirs... Mais après 20 heures ils font feu sur nos positions, tous les soirs. Une fois toutes les heures on a deux trois tirs, et c'est comme ça jusqu'au matin".

Des tirs "au hasard" qui semblent surtout destinés à provoquer une réponse ukrainienne.. Mais celle-ci restera mesurée proportionnée assure le colonel Postupalshi : "On répond aux tirs que s'il y a un risque pour nos positions ou pour la vie de nos soldats. Et on répond avec les mêmes calibres... tout en restant dans les limites de l'accord de Minsk"
Officiellement, et depuis 2015, les accords de Minsk régissent un cessez-le-feu qui demande l'évacuation de toute arme lourde de plus de 100mm de calibre à au moins 15km de distance. Un tir de mortier lourd (120mm) sur le secteur de Zolote est donc une claire violation du cessez-le-feu. Mais, à vrai dire, aucune des deux parties n'en respecte totalement les termes.

Quand on lui demande s'il estime pouvoir résister à une offensive, le général répond - bien sûr - que ses hommes sont prêts, mais il ajoute - en Anglais pour être sûr que le message passera mieux - qu'il se sentirait plus à l'aise s'il pouvait recevoir un peu de matériel occidental... et de faire la liste de ses besoins urgents : "En premier lieu, il nous faudrait des systèmes de défense anti-aérienne, des batteries de missiles et des outils de reconnaissance spatiale : du renseignement satellitaire".
Des missiles anti-aériens ou anti-missile ? L'Ukraine est justement en discussion avec les Etats-Unis pour en acquérir. Mais les Russes ont prévenu : l'installation de tels engins en Ukraine serait justement ce qui pourrait déclencher leur offensive.