

À Dax, dans les Landes, des malades d'Alzheimer vont bientôt avoir leur village : un espace dédié de 7 hectares avec une supérette, un restaurant, un coiffeur, pour se sentir "comme à la maison". Le village devrait voir le jour fin 2019. Objectif: expérimenter une prise en charge plus inclusive et moins médicalisée.
Pour l'architecte Nathalie Grégoire, chargée de concevoir le village en collaboration avec Nord Architects, c'est un sacré pari : sécuriser l'espace, le rendre accessible à un public fragile qui peut devenir dépendant, et qu'on doit surveiller en permanence, mais sans en avoir l'air. C'est ça, le village Alzheimer. 120 patients, 120 soignants, et autant de bénévoles. Ici, on ne portera pas de blouse blanche, les résidents habiteront des maisons avec chacune sa cuisine, son séjour et son jardin. Le tout, installé autour d'une vraie place de village.
Ce sera un espace clos, mais il ne faut pas se sentir enfermé non plus, explique Nathalie Grégoire. Donc on utilisera les dénivelés de terrain pour masquer les clôtures. Le village sera organisé autour d'une place centrale avec des grandes arcades et des magasins, et puis autour, des petits quartiers, chaque maisonnée accueillera sept à huit résidents.
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L'idée est venue d'une expérience déjà menée aux Pays Bas
En 2013, le président du Conseil départemental des Landes, Henri Emmanuelli, décide d'aller voir là bas, il revient emballé et décide d'importer le concept. Emmanuelli aujourd'hui disparu, c'est Francis Lacoste, un proche collaborateur qui gère le projet : "À l'époque, on se posait dans le département pas mal de questions sur ce qu'il fallait faire de nouveau dans le domaine. On avait l'impression qu'on avait fait le tour d'une forme de prise en charge et qu'il fallait rompre avec l'habitude française de structures assez hospitalières, qu'il fallait tenter autre chose."
Même discret, l'encadrement ici sera important, avec un rapport d'un soignant pour un résident -c'est un ratio supérieur à ce qui se fait dans les Ehpad- pour un coût pourtant équivalent : pas plus de 2 000 euros par mois, promet le département.
L'originalité de l'expérience, c'est qu'elle fera aussi l'objet d'une étude scientifique pour mesurer les effets de cette prise en charge pour vérifier si cette approche améliore la vie et le ressenti des patients, des soignants et des proches.
Continuer à vivre comme chez soi
C'est le concept, mais le village se veut ouvert sur l'extérieur. Les résidents pourront en sortir, accompagnés. Mais surtout les habitants de Dax pourront y venir : la médiathèque, l'auditorium du village leur seront ouverts et des bénévoles y passeront toute la semaine. Objectif : "d"éghettoiser" la maladie, explique Gabriel Bellocq, il est conseiller départemental et ancien maire de Dax : "Avec un accompagnement, les résidents sortiront et à l'inverse les équipements du village seront ouverts à tous. L'idée d'un lien intérieur-extérieur est très forte ici, sans commune mesure avec ce qu'on vit dans un Ehpad.
Même pas sorti de terre, le village Alzheimer attise la curiosité. L'association France Alzheimer Landes le remarque déjà : depuis un an que le projet est connu, elle reçoit beaucoup d'appels de familles mais aussi de professionnels, curieux, voire désireux, de tenter une autre façon de travailler.
L'ouverture est prévue fin 2019 début 2020 pour une offre de soins qui se veut non pas en concurrence, mais complémentaire des traditionnels Ehpads.