Un mois après l'incendie, alors que le débat sur la reconstruction est vif, Notre-Dame de Paris est encore convalescente. Le chantier, pour l'instant, poursuit surtout la phase de sécurisation. Reportage.
Sur l'île de la Cité, le parvis est toujours inaccessible et la cathédrale Notre-Dame encore protégée par des barrières de sécurité, des policiers, déployés de jour comme de nuit. Alors que le débat sur la forme future de la cathédrale fait encore rage, l'heure n'est pas encore à la reconstruction, un mois après l'incendie, qui a notamment ravagé la charpente, mais à la sécurisation du bâtiment.
Dans le quartier, ses voisins apprennent à vivre un nouveau quotidien. La maison du diocèse de Paris est désormais inaccessible rue du Cloître Notre-Dame et ses salariés empruntent l'entrée de la rue du Massillon. "On a Notre-Dame sous les yeux, quand on ouvre la fenêtre on est aux premières loges : on voit la bâche pour mettre hors d'eau la cathédrale et les types qui bossent, casqués, sanglés" décrit Priscillia De Selve, rédactrice en chef de l'hebdomadaire du diocèse, "Paris Notre-Dame". "On a mis une semaine avant de pouvoir rentrer" ajoute-t-elle : les locaux ont été inaccessibles après l'incendie.
"Le téléphone sonne un peu moins même s'il continue à sonner" confie, au 6ème étage, Aliénor de Plinval, de la Fondation Notre-Dame, qui collecte les dons. Son bureau donne sur le flanc Nord de la cathédrale, d'où elle admire la nacelle des ouvriers. "L'autre jour on leur a même offert un café depuis la fenêtre", sourit la jeune femme.
Les salariés du diocèse au cœur du chantier
Le soir, les salariés du diocèse quittent les bureaux par la rue du Cloître, fermée au public. "Les policiers sont très gentils, ils nous ouvrent les barrières" glisse Priscillia De Selve, qui conduit auprès d'André Finot, le responsable de la communication de la cathédrale, à l'angle du parvis.
"Pour moi, c'est toujours irréel, je n'y crois pas" lâche-t-il, à propos de l'incendie. "Tous les jours, je rentre sur un chantier, je présente ma carte d'identité, je suis sur une liste : c'est un peu lourd, mais il faut protéger le monument". "Devant vous, vous avez des grosses poutres de bois qui serviront à maintenir les arcs boutants" pointe André Finot, devant la rue du Cloître. Ces poutres sont en effet destinées à consolider les 21 arcs boutants qui entourent la voûte, afin de permettre l'installation d'un plancher, au-dessus, pour l'inspecter et évaluer les dégâts causés par l'incendie.
Des travaux de sécurisation jusqu'à l'été
Quand on contourne le chantier, par le pont Saint Michel, sur le flanc sud, visible depuis la rive gauche de la Seine, une grue s'active. "Elle met en place des confortations sur le chevet sud, sur le pignon du transept", comme celles installées quelques semaines auparavant sur le chevet nord, commente Frédéric Létoffé, co-président du groupement des entreprises de restauration des monuments historiques, habilitées pour intervenir sur le chantier.
Ce chantier, il veut en faire une opportunité : "On a l'intention de mettre en place un parcours des métiers le long des quais pour faire découvrir le chantier et ses métiers", explique-t-il. Ce lieu pourrait voir le jour côté Sud, sur une partie du jardin, devant la palissade qui sera installée tout autour de la cathédrale dans les prochaines semaines.
La voûte surveillée de près
La phase sécurisation, en tout cas, doit durer encore jusqu'à l'été. Il faut notamment aussi démonter l’échafaudage installé pour rénover la flèche qui s'est effondrée.
Des incertitudes demeurent, comme l'étendue des dégâts sur la partie haute de la voûte, qui pour l'instant n'a pas bougé. "S'il y a le moindre mouvement, on sera réveillé par des sonneries hurlantes" indique Charlotte Hubert, l'une des quatre architectes en chef des monuments historiques en charge de la maîtrise d'ouvrage. Pour l'instant, il a été impossible de constater sur quelle épaisseur les murs ont été endommagés : "Tous les accès ne sont pas encore sécurisés". L'objectif est donc de monter un plancher au-dessus et en-dessous de cette voûte.
Des robots interviennent dans les zones dangereuses
En attendant, sous la voûte, une partie de la nef reste inaccessible aux ouvriers, en raison des risques d'effondrement. Des robots ont donc pris le relais, pour déblayer et récupérer les éléments de la flèche tombés dans la cathédrale. Tous sont ensuite stockés, inventoriés, étudiés, en vue d'une réutilisation et de la compréhension de l'incendie.
Depuis un mois, le travail est colossal pour la trentaine d'entreprises et leur soixantaine de compagnons, qui travaille sous les ordres des architectes en chef. "Il y a une aventure humaine à Notre-Dame, actuellement, dont on sait qu'on en gardera les stigmates éternellement" estime Charlotte Hubert. "Elle appartient à tous et on se doit de la restituer à tous, dans une forme qui satisfera tous" conclut-elle. Quant au délai de cinq ans, avancé par Emmanuel Macron, c'est selon elle, un "défi nécessaire".
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