L'ancien président égyptien est mort lundi, près de six ans après sa destitution.
On ne peut être démocrate et défenseur des Droits humains en France et en Europe et ne plus l'être tout à fait parce que l'on a moins d'indulgence politique ou religieuse avec la ou les victimes.
Mohamed Morsi n'a pas été un bon président égyptien. Tout le monde vous expliquera qu'après quelques semaines de discussions et de tentatives de conciliation, il a opté – et avec lui les Frères musulmans dont il est issu – pour l'autoritarisme et la méthode forte.
Ce faisant, il s'est coupé de la partie « éclairée », ou plutôt « occidentalisée », de la bourgeoisie cairote. Mais surtout, et plus grave, il n'a rien fait pour les plus pauvres : ni redistribution de terres, ni même attention portée aux droits des travailleurs égyptiens.
Mohamed Morsi a été indiscutablement élu
Il est même le premier et unique président de l'histoire du pays a avoir été élu. C'était en 2012. Un an plus tard, il était déposé par son propre ministre de la Défense, Abdel Fatah Al-Sissi.
S'en est suivie une chasse aux Frères musulmans, le parti-mouvement-confrérie de Mohamed Morsi. Les militaires ont commencé par tirer à balle réelles dans la foule. Sur la place cairote de Rabaa : 600 morts. Certains parlent d'un millier.
Puis, le régime militaire à peine installé, ses troupes de choc, ses forces de police et autres sbires ont arrêté des dizaines de milliers de Frères musulmans. Les associations des Droits de l'homme parlent de 40 000 prisonniers politiques en Égypte aujourd'hui.
Et parmi ceux-ci Mohamed Morsi, dont il fallait faire un exemple : il a été brutalement déposé, puis accablé d'une bonne demi-douzaine de charges et, depuis, il n'est apparu dans les médias – étrangers bien sûr – que derrière les barreaux, souvent émacié.
Pour vous donner une idée de la cruauté du régime en place en Égypte – mais aussi de la crainte face a un procès trop public de l'ancien président – il apparaissait derrière des vitres insonorisées, de façon à ce qu'on ne puisse rien entendre de ses protestations.
On le savait malade, mal soigné et mal défendu : cela-dit, qui a jamais imaginé que son procès fût équitable ? C'est pour cette raison que les plus folles rumeurs courent sur sa mort : personne en Égypte ne croit un mot de ce que raconte le régime.
Mohamed Morsi, une victime du régime
Quelle que soit les raisons objectives de sa mort, mauvais traitement, mauvaises conditions d'incarcération, sa mort est et doit rester sur la conscience – peu sensible de toute façon – des militaires égyptien.
Il faut savoir ce qu'est qu'une prison ou même un commissariat égyptien. Des culs de basse-fosse où les prisonniers sont détenus à l'isolement le plus sévère, parfois des années durant. Les tabassages sont fréquents et les liens avec l'extérieur rarissimes.
Donc, on peut avoir détesté Morsi président et son autoritarisme. Mais il a été élu, et doit être honoré comme tel. Quant aux 40 000 prisonniers politiques égyptiens, Frères musulmans ou pas, ils doivent être défendus.