
Ce dimanche, on fait de la spéléologie dans les oubliettes de la gastronomie française et en particulier dans l’œuvre d’un certain Marie-Antoine Carême, dit Antonin Carême . A l’exception d’une poignée de grands chefs et d’historiens, ce nom ne nous dit plus grand chose aujourd’hui... Et pourtant, ce fut le grand cuisinier français de la fin du XVIIIe et du début du XIXe siècle . Il est considéré comme le premier grand pâtissier de l’histoire de la gastronomie : il a modernisé la pâte à chou, inventé l’éclair et les pièces montées. Il a créé le vol au vent, il fut le cuisinier de Talleyrand, pendant plus de 10 ans, il officia à la cour d’Angleterre et de Russie et pour le baron et la baronne de Rotschild. Et il fut surtout l'un des grands codificateurs de la cuisine française à travers L’Art de la cuisine française au XIXe siècle, une œuvre majeure en 5 volumes qui vient justement d’être rééditée chez Menu Fretin.
C’est un livre extrêmement complet sur les produits et les recettes.
Jugez plutôt : 28 recettes d’omelettes, 14 recettes de farces à quenelles, des ragoûts de crêtes et de rognons de coq à la Toulouse, des grosse pièce de bœuf à la Richelieu, un beurre d’anchois...
Pour en parler ce matin, nous accueillons l'historien Pascal Ory et le chef Stéphane Duchiron.
L'art de la cuisine française au XIXe siècle
Marie-Antoine Carêmeavec Armand Plumereypréface de Pascal Ory Paru le 5 novembre 2015 Disponible, Coffret 110,00 EUR Editeur Menu Fretin

Marie-Antoine - dit Antonin - Carême est né à Paris le 7 juin 1784 et mort dans la même ville le 12 janvier 1833. Celui que d'aucuns considèrent comme le Raphaël de la cuisine, fut le plus célèbre cuisinier de son temps. Il régala le futur roi d'Angleterre George IV, le tsar de Russie, l'empereur d'Autriche et Talleyrand qu'il accompagna au Congrès de Vienne.Théoricien, saucier, pâtissier, Carême doit être regardé comme le fondateur de la grande cuisine. On lui doit, entre autres, la création du tournedos Rossini, du vol-au-vent et de la toque des cuisiniers.Il est également l'auteur du Cuisinier parisien et du Pâtissier royal parisien.Rééditée dans un coffret en édition limitée, L'Art de la cuisine française au XIXe siècle constitue sans doute la première tentative de théorisation de la cuisine française. Écrite par Marie-Antoine Carême, à la fin de sa vie - et terminée par son disciple Armand Plumerey - cette oeuvre marque l'aboutissement culinaire de celui qui fut, et demeure, le "cuisinier des rois et le roi des cuisiniers". Carême réalise ainsi son rêve : "Publier un livre sur l'état entier de ma profession à l'époque où nous sommes." De fait, cet ouvrage est un témoignage unique sur ce qui fut la plus glorieuse période de la cuisine française.Chaque livre aborde une thématique : potages, bouillons, jus, sauces, garnitures, pièces de boucherie, volaille et gibier, poissons, crustacés, hors-d'oeuvre, oeufs, etc.
Pascal Ory

Né en 1948 à Fougères en Ille-et-Vilaine, le breton Pascal Ory a élu domicile à Chartres, la ville royale par excellence, c’est à dire au plus près de la Grande Histoire, celle qu’il côtoie depuis près de quarante ans. Très jeune, il découvre sa vocation pour l’histoire, entre autre auprès de son père, journaliste grand reporter qui éveille sa curiosité naturelle. Agrégé d’histoire, docteur d’état en histoire, ses maîtres sont deux grands historiens catholiques : Jean Delumeau et René Rémond. Fier de ses origines, il avoue « conserver les valeurs et les réflexes de ce peuple catholique de l’ouest ». Il a « la nostalgie de son esprit communautaire et de ses convictions » (La Croix, 2008). Né après-guerre, il interroge, pour des raisons éthiques, la période de la collaboration s’intéressant à l’attitude des universitaires durant ces années douloureuses. (Les collaborateurs, Le Seuil, 1976).Son parcours le conduit du CNRS (attaché de recherches) à la fondation Thiers (pensionnaire 1973-1976) à l’enseignement : tout d’abord professeur de collège 1976-79, puis maître de conférences à l’IEP de Paris (76-98 et depuis 2005), assistant à l’Université Paris X-Nanterre (79-91), chargé d’enseignement à l’Inalco (87-92) et à l’université Paris IX-Dauphine, chargé de conférence à l’Ehess depuis 1995, professeur à l’Université de Versailles-Saint-Quentin (91-98) et à l’Université Paris 1-Sorbonne depuis 1997.Passionné de bande dessinée, il collabore au magazine Lire depuis trente ans et siège comme président du jury du prix de La Bande dessinée historique des Rendez-vous de l’histoire de Blois. Depuis 1977, il anime sur France Culture, une émission dédiée à l’actualité en compagnie d’autres historiens. En 1983, il avait déjà laissé courir sa plume en écrivant une pièce de théâtre diffusée sur cette même chaîne, et intitulée Mélancolies du 29 mai, une évocation de mai 1968.Médiateur dans l’âme, il apprécie la direction de recherches, participe avec plaisir aux oraux des jurys d’examens mais accepte aussi la charge de Conseiller historique à la Télévision (depuis 1982) pousse la porte de la politique (chargé de mission au cabinet du secrétaire d’état aux Grands Travaux (91-93) et adjoint du maire socialiste de Chartres entre 1995 et 2001. En 2011, il a été nommé pour deux ans au Comité d’orientation scientifique de la Maison de l’histoire de France, un projet soutenu par le Président Nicolas Sarkozy et qui fait polémique dans le milieu des historiens.
Stéphane Duchiron

Chef du restaurant Renaissance Trocadéro Le Relais du Parc
Passionné de cuisine depuis son plus jeune âge il a fait de sa passion son métier, il aime le classique, le beau produit et de saison.Il officie aujourd'hui dans un bel hôtel du 16e Parisien mais se prépare à faire une très belle ouverture d'ici quelques mois dont il ne peut livrer les détails pour le moment.Depuis 2 ans il est Membre de l'équipe de France de gastronomie et des maîtres du service, dont le président est Bernard Vaussion, le capitaine Michel Roth et le sélectionneur Dominique Fabre- Le 2 avril prochain 150 chefs et maîtres du service organisent bénévolement un dîner pour 250 convives à l'Hôtel Westin dont les bénéfices seront reversés à une association. www.renaissanceleparctrocadero.com
Les recettes de Stéphane Duchiron inspirées d'Antonin Carême
La sauce Béchamel
Extrêmement riche du temps de Carême ! Pour ma part :
- 40cl de lait frais entier
- 10cl de crème fraiche épaisse crue de préférence
- 25g de farine
- 25g de beurre
- 1 râpée de noix de muscade
- 5 champignons de Paris
- 1/4 de botte d'estragon
- Comme disait Marie-Antoine Carême, « une idée de sel, poivre du moulin »
- Chauffer le lait avec les champignons émincés et l'estragon, le sel, le poivre du moulin et la muscade.
- Laisser infuser quelques minutes (15 min) afin que les champignons et l'estragon libèrent leur arôme.
- Chauffer le beurre (moussant mais sans coloration) ajouter la farine et cuire doucement au fouet jusqu'à ce qu'une bonne odeur de petit gâteau se dégage, c'est rapide : 3 minutes maximum.
- Hors du feu, verser votre lait petit à petit sur le beurre/farine, cuire à nouveau minimum 10 minutes en ajoutant la crème fraiche épaisse.
- Débarrasser dans une plaque et couvrir au contact d'un film.
- Cette recette peut être ré-adaptée si vous aimez d'autres épices telles que la cardamome, l'anis étoilé, le romarin, le thym ... faites infuser ce que vous voulez dans votre lait et vous aurez le goût désiré.
- Elle est la base des gratins de légumes, croque-monsieur, soufflés salés.
Recette de soufflé
- Cuire une pomme de terre Bintje au four dans sa peau sur un lit de gros sel, récupérer la chair puis
la passer au moulin à légumes il faut 180 à 200g de chair, verser la béchamel dessus à chaud.
(Faites une béchamel telle que présentée en doublant le beurre et la farine, ajouter 5 jaunes d'œufs à la fin et hors du feu et 30g de parmesan ou fromage rapé)
- Monter les 5 blancs en neige avec 1 pincée de sel fin, ils doivent garder une texture crémeuse.
- Mélanger délicatement et en 3 fois pour ne pas laisser retomber les blancs, verser dans un moule à soufflé qui aura été beurré et chemisé de fromage râpé ou parmesan en poudre.
- Cuisson environ 40 minutes à 180° ne jamais ouvrir la porte durant la cuisson.
- Manger bien chaud.
Horly de maquereaux revisité sans le persil frit ni la tomate
- 4 maquereaux moyens extrêmement frais levés en filets avec la peau et sans arête (demander au poissonnier)
- Tailler le filet en sifflets ou goujonnettes puis râper un zeste de citron vert bio de préférence, son jus et un peu d'huile d'olive, sel et piment d'Espelette.
- Mariner 1 heure au maximum.
- Tailler une douzaines de radis roses en rondelles très fines puis les mettre dans de l'eau glacée pour les raffermir.
- Egoutter les filets puis les fariner et les frire aussitôt à 180° très rapidement afin qu'ils restent croustillants.
- Servir accompagné des radis que l'on aura assaisonnés comme les maquereaux.
Eau de poulet rafraichissante
Très moderne pour l'époque et beaucoup plus digeste ! Je n'y ajouterais que quelques herbes
- 1 poulet fermier désossé (demander à votre boucher de le faire et de concasser la carcasse)
- Mouiller la carcasse et les cuisses coupées en deux à hauteur avec 1 litre d'eau, 1 pincée de sel.
- Porter à ébullition et cuire à frémissement 20 minutes en écumant.
- Ajouter 3 branches d'estragon, 5 de cerfeuil, 5 de coriandre, 1 petite botte d'oseille, 1 anis étoilé et quelques grains de poivre.
- Couvrez et laissez infuser au moins 20 minutes hors du feu, passez dans un torchon pour récupérer le bouillon.
- Vous pouvez le dégraisser et vérifier l'assaisonnement puis le servir dans un bol avec les mêmes herbes fraiches que vous aurez ciselé.
- Les cuisses pourront être mangées froides le soir ou à côté en salade par exemple.
- Je ne cuirais pas les filets dans le bouillon mais plutôt rôtis au beurre à part pour un autre repas.
Œufs au lait
- 450g de lait frais entier
- 8 œufs fermiers
- 150g de sucre sont pour moi suffisants. On peut aussi remplacer le sucre par du miel de printemps.
- Antonin Carême ajoutait de l'eau de fleur d'oranger, je la remplacerais par de la vanille, 1 gousse de préférence Tahiti
- Bouillir le lait ajouter sucre et vanille grattée avec sa gousse.
- Battre les œufs au fouet puis ajouter au lait.
- Verser dans un plat en porcelaine ou des ramequins.
- Cuire au bain marie jusqu'à temps que le mélange soit pris.
- Servir chaud ou froid.
La tournée des popotes
Coup de coeur de François-Régis Gaudry
Les Apothicaires , le bistrot gastronomique de Tabata et Ludovic Mey



23, rue de Sèze, Lyon (Vie)
04 26 02 25 09
Menu déj. : 24 €.
Menus dîner : 39, 45, 50 €.
Fermé le week-end.
Chronique de Dominique Hutin
Domaine des Bernardins
Muscat Beaumes de Venise « Doré » 2014 - 13,4 euros
Muscat Beaumes de Venise Rosé « Hommage » - 16,5 euros
138 Avenue Gambetta 84190 Beaumes de Venise
04 90 62 94 13 - domainedesbernardins@gmail.com
www.domaine-des-bernardins.com
Domaine des Enchanteurs - Bertrand Seube
52 Chemin d’Aubignan 84330 Saint Hippolyte le Graveyron
04 90 12 69 82 - 06 73 99 98 26
bertrand@domainedesenchanteurs.fr
www.domainedesenchanteurs.com
Aoc Beaumes De Venise
www.beaumesdevenise-aoc.fr
Place de l'Eglise 84190 Beaumes de Venise
04 90 36 11 26 - aocbeaumesdevenise@wanadoo.fr
Les lundi, Mardi, Jeudi et Vendredi, de 8 h 30 à 12 h 00
Coup de coeur de Dominique Hutin
Le Dictionnaire insolent du vin , d'Alain BRADFER
Editeur « La Vie Du Rail », 168 pages - 19,00 €

Les 2 âges du Muscat de Beaumes de Venise
Chronique d'Arnaud Daguin

Cuisinières, cuisiniers !
Mangeuses, mangeurs !
Ces temps de Carnaval m'incitent à vous parler d'Arlequin.
Pas le jeune homme bondissant et polychrome, celui qui se mange
Les arlequins étaient jadis les reliefs bigarrés, car d'origines variées, issus de repas plus ou moins
somptueux. Ces restes finissaient tant bien que mal leur carrière en une rustique friture vendue sur
le pavé.
En ces temps-là, on savait la valeur de la nourriture et le mot jeter n'existait pas.
Un faisan rôti en plumes à peine picoré à la table du duc filait aussi sec se faire redresser et servir
chez un bourgeois cossu puis en recuite à l'auberge d'à côté pour finir assemblé à d'autres restes
en échaudés vendus au coin de la rue éponyme.
Affiner, maturer, mariner, saler, fumer, sécher, hacher, mélanger, cuire, recuire, appertiser : toutes
ces techniques ont été peaufinées par nos anciens dans le seul but de ne rien perdre de la valeur
de ces produits.
C'est exactement ça l'économie circulaire
Alors pourquoi aujourd'hui sur la planète, jetons nous un TIERS de ce que nous produisons?
Rien qu'en France on fout en l'air 38kg de bouffe par SECONDE!
Comment peut-on passer en trois siècles seulement du respect de la nourriture au mépris de la
bouffe?
Eh bien peut être qu'à force de brader le bifteck on finit par lui enlever sa valeur. A force de se faire
dire que ça ne coûte pas cher, peut être que nous en venons à penser que ça ne vaut pas cher
non plus Et vous savez quoi? Peut-être que nous avons raison et que cette bouffe-là, elle pourrait
aller directement à la poubelle même sans passer par nos tuyauteries intimes !
Mais je m'emporte, on en reparlera...
A ceux qui savent donc déjà que non seulement "ce que tu manges te constitue", mais aussi et
surtout que "ce que tu manges dessine ton monde"
A ceux-là donc, je propose ceci:
Allons au marché un samedi choisir le beau poulet pour dimanche,
Profitons-en pour prendre beaucoup plus de légumes que nécessaire,
en ce moment :
gros poireaux d'hiver, céleri rave, betterave, navets, carottes, choux pommés, bien serrés, jeunes quoi!
Enfin, l'hiver, c'est la saison des gros légumes, profitons-en.
Juste grattés ou rincés sous un filet d'eau, pas besoin de peler bien sûr, on a dit de bons
produits donc bio au minimum
Nous les ferons rôtir en même temps que la volaille mais séparément et à sec, bien serrés dans
des plaques ou lèchefrites.
Quand ils sont dorés et tendres à cœur, le plus gros du boulot est fait pour vos dîners de la
semaine, vous aurez sous la main la matière première de vos compositions.
Ces légumes vous fourniront leurs bienfaits au long cours:
- Émincés dans un coup de wok avec les restes du poulet le lundi,
- Dans le bouillon de la carcasse avec des nouilles le mardi,
- Écrasés à l'huile d'olive avec des harengs fumés le mercredi,
- Coupés en morceaux en gratin avec une béchamel intelligente et du bon vieux brebis d'estive
basque le jeudi, battus en brandade avec des sardines de conserve le vendredi...
Pour peu que vous ayez pensé le samedi à cuire une gamelle de lentilles ou de pois chiches, que
vous ayez un peu de boulgour, riz ou autre polenta sous la main et vous voilà capable de
"ménager" admirablement au moins toute la semaine, produire du plaisir, de la santé et du sens et
Croyez-moi, c'est pas si souvent que l'on peut se sentir aussi utile en ce monde.
Vous l'aurez compris, il ne s'agit pas tant d'accommoder les restes que de faire en sorte qu'il n'y en
ait plus du tout.
Appelons de nos vœux l'arlequin de demain, le pain rassis des restos trempé de bonne sauce
poêlé dans la ruelle : du pain perdu à l'enseigne du Père Paindu !
Allez, faites-vous à manger les uns les autres et vivez joyeux!
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