Marie-Lou Dulac : "La République nous fait miroiter le mythe de la méritocratie"

Marie-Lou Dulac, à Gisors, dans les années 1990.
Marie-Lou Dulac, à Gisors, dans les années 1990. ©Radio France - DR
Marie-Lou Dulac, à Gisors, dans les années 1990. ©Radio France - DR
Marie-Lou Dulac, à Gisors, dans les années 1990. ©Radio France - DR
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L'écriture comme passion, pour s'échapper de son quotidien, de son milieu, pour oublier les difficultés. C'est le moteur de Marie-Lou Dulac qui a compris très tôt qu'il allait falloir en faire plus que les autres pour s'en sortir.

Marie-Lou Dulac a passé son enfance et toute son adolescence à Gisors, dans l'Eure. Lorsqu'elle a six ans, ses parents se séparent. Sa mère travaille de nuit dans une usine pour pouvoir s'occuper d'elle le jour. 

Très jeune, Marie-Lou apprend à être autonome. L'école est son refuge, Lara Croft son héroïne. Elle écrit aussi, s'invente des histoires, édite seule son premier roman à 16 ans. Intitulé Bienvenue à Dingopolis, il raconte les aventures d'une jeune fille un peu perdue dans un univers complètement loufoque. Le fantastique et l’imaginaire sont aussi une façon pour elle de fuir son quotidien précaire et la conscience d’être pauvre. Face aux autres, Marie-Lou ressent “de la honte” : “c'était le sentiment qui prédominait. Ça m'a amenée à beaucoup mentir, j'essayais de cacher ma condition.” Adolescente, elle n'est pas certaine d'avoir les moyens de faire des études, mais grâce à l'insistance d'un professeur, elle postule en classe prépa à Rouen.

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Sans argent, les études sont synonymes de galère, d'incertitude et de petits boulots. Malgré les instants de doute et de découragement, Marie-Lou trace sa route, sans abandonner son désir d'écriture. Sans oublier non plus d'où elle vient : face aux inégalités et aux carences de l'école, elle s'engage aujourd'hui pour que chaque jeune puisse avoir le choix. 

Ses mots

Je comprenais qu'on n'avait pas beaucoup d'argent et que ma mère devait se battre pour que j'aie une vie décente. Je voyais les efforts qu'elle faisait pour tout concilier. Je pense que c'est une des raisons pour lesquelles j'ai été une enfant très sage : je ne voulais pas causer de problèmes à mes parents. 

L'écriture servait un besoin d'évasion. Je faisais toujours vivre à mes personnages des aventures extraordinaires dont ils sortaient victorieux, évidemment. Je pense que je me voyais à travers eux : secrètement je rêvais d'avoir des super-pouvoirs pour devenir puissante et prendre le contrôle de ma vie.

La République nous fait miroiter le mythe de la méritocratie. Moi je suis un contre-exemple, parce que j'ai rencontré tellement d'obstacles sur ma route que c'est presque miraculeux que j'ai réussi à sortir de mon milieu social.

Sa chanson de galère

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Gala - Freed from Desire

Le message vocal

Marie Morellet, la responsable du programme Cap Essec auquel Marie-Lou a participé. Elle aujourd'hui en charge du Centre Egalité des Chances de l'école de commerce.

L'archive

Les manifestations lycéennes en 2008 contre les réformes menées par le ministre de l'Education nationale Xavier Darcos.

Pour aller plus loin

Se ressaisir, enquête autobiographique d’une transfuge de classe féministe, de la sociologue Rose-Marie Lagrave, aux éditions La Découverte (2021).

Marie-Lou a été accompagnée et s'implique aujourd'hui dans l'association Article 1. Article 1 promeut l'égalité des chances et mentore des jeunes dans leur parcours scolaire et universitaire. 

Elle est aussi ambassadrice de l'ONG ONE contre l'extrême pauvreté, avec laquelle elle a publié une tribune en juin dernier pour promouvoir l'éducation des filles.

Marie-Lou Dulac
Marie-Lou Dulac
© Radio France - Nassira El Moaddem

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