

Pour conclure cette semaine de nouvelles chansons d'ici, quoi de mieux qu'un album intitulé 'Chansons' ? C'est le troisième disque de la chanteuse Raphaële Lannadère, qui se fait appeler L, auquel Didier Varrod consacre son 'Pop & Co' .
Un piano, une harpe et un quatuor à cordes. Le décor est planté pour Raphaële Lannadère,elle qui s’appelle à nouveau L, et qui renoue dans cet album avec la vertu des chansons au pluriel. Des chansons de style, racées, comme lorsque Léo Ferré aimait confronter chimiquement sa culture classique à la poésie. Ainsi, L, pour évoquer une ville meurtrie par les attentats, préfère la métaphore : une femme, des escarpins, des hôtels de passe qui ressemblent à l'Hôtel Negresco. Tout ce qui fait qu’une ville est belle et libre. Le message de la chanson "Ta Ville" est d’autant plus clair qu’il est d’une douceur innoffensive.
Ferré, encore lui, disait :
La poésie contemporaine ne chante plus. Elle rampe. Elle a cependant le privilège de la distinction : elle ne fréquente pas les mots malfamés.
C’est tout le sel de ces chansons majestueuses qui n’ont pas peur de leur exigence, de leur ambition, de leur affront intemporel et volontaire au son urbain dominant. Une caractéristique que l'on remarque parfaitement sur la chanson qui ouvre cet album, Chansons, et qui s'intitule "La Meuse". La Meuse, c’est la région dont L est originaire, et où l’on chantait tout le temps à la fin des repas, des chansons de Brel ou de Barbara. On lui demandait de chanter toute petite déjà, alors qu’il n’y avait pas de musiciens dans cette famille. Non pas pour exhiber son talent mais pour offrir un recueillement. D’où cette vision sacrée de la musique pour Raphaële Lannadère : la chanson possède en effet aujourd’hui pour L une fonction de communion, de catharsis, de mémoire, afin de guérir la mélancolie ou de prolonger un travail de deuil.
C'est ce qu’elle fait dans la chanson "Orlando" en évoquant l’attentat et la tuerie dans un club gay de Orlando, le rapprochant subtilement des exterminations d’Amérindiens dans la même région.
Pour cet album, Raphaële Lannadère dit qu’elle s’est laissée faire. L a effectivement fait confiance au tandem extraordinaire Clément Ducol et Maxime Le Guil qui ont délicatement et sobrement habillé ces chansons de cordes, matière de tulle et de voiles vaporeux, sensuels, qui structurent la voix mélancolique de L dans une lumière d’oiseau de feu. De la haute-couture.
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