Marlène Schiappa : “Si la loi suffisait à changer la société, on aurait l'égalité salariale depuis 40 ans"

Marlène Schiappa
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Marlène Schiappa ©Radio France - Anne Audigier
Marlène Schiappa ©Radio France - Anne Audigier
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Marlène Schiappa, Secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargée de l'Égalité entre les femmes et les hommes, sera l'invitée de « Questions Politiques » ce dimanche. Une émission présentée par Ali Baddou avec Carine Bécard (France Inter), Françoise Fressoz (Le Monde) et Jeff Wittenberg (France Télévisions).

Avec
  • Marlène Schiappa Secrétaire d'état chargée de l’Économie sociale et solidaire et de la vie associative

Sur l’élection à la présidence de l’Assemblée nationale

A quelques heures du choix des députés de La République en Marche pour celui ou celle qui les représentera au perchoir, et alors que le duel semble se dessiner entre Barbara Pompili et Richard Ferrand, la Secrétaire d’Etat à l’égalité femmes-hommes Marlène Schiappa affirme qu’elle “ne peut pas exprimer publiquement de préférence en raison de la séparation des pouvoirs. 

Toutefois, elle affirme son attachement à Richard Ferrand : “Lorsque j’ai adhéré à LREM, j’ai tout de suite fait en sorte que l’égalité femmes-hommes soit un sujet d’importance, et j’ai trouvé à cet égard un allié en la personne de Richard Ferrand. S’il y a 47% de députées En Marche, c’est grâce à la commission d’investiture dont Richard Ferrand était président”. 

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Elle appuie toutefois, entre les lignes, la candidature d’une femme : 

"Ce qui est difficile quand on veut nommer des femmes à des postes de responsabilités, c’est que souvent il n’y a  pas de vivier. Là, le groupe EM a réussi à créer un vivier. On a énormément de femmes, c’est important de faire émerger ces talents et de les soutenir". 

Sur la démission de Nicolas Hulot

Au lendemain des marches pour le climat qui se sont déroulées à Paris et ailleurs en France, la Secrétaire d'Etat affirme "qu'il faut entendre cette initiative citoyenne de marche pour le climat, c’est ce que nous faisons en écoutant ce qui est dit lors de cette marche". "Il y a une prise de conscience à avoir de façon collective, et regarder tout ce qui a été fait pour mettre à l’agenda cette question", dit-elle, expliquant notamment que sur le glyphosate, il est important pour elle de proposer une alternative. 

Pourquoi, selon Marlène Schiappa, Nicolas Hulot a-t-il démissionné ? "Il a certainement trouvé que ça n’allait pas assez vite pour lui. Je trouve que son bilan est bon, qu’il est dur avec son propre bilan". "Quand vous êtes dans des combats culturels vous êtes sans cesse pris en étau entre d’un côté des opposants voire des climato-sceptiques et d’autres part des gens qui sont censés vous soutenir, mais qui, il y a un mois, trouvaient encore qu’il n’allait pas assez loin”. 

Sur #MeToo et la lutte contre le sexisme

Invitée à réagir à la dénonciation de violences sexuelles sur les réseaux sociaux par le mot-clé #MeToo, Marlène Schiappa explique que son premier réflexe "a été de me dire “enfin”. Cela fait des générations que les femmes subissent des violences sexistes ou sexuelles sans pouvoir réagir ou sans être écoutées. Enfin, la société a pu prendre conscience de ce que vivaient beaucoup de femmes". Elle assure que les abus ont été très minoritaires : "Il y a très peu de noms qui ont été donnés sur les réseaux sociaux sans que cela soit suivi de plaintes ou d’un procès.

Alors que le gouvernement s'apprête à lancer une Université d'été du féminisme, les 13 et 14 septembre prochains, elle explique que "le but de cette rencontre c’est aussi de valoriser des associations, l’enjeu c’est d’amener la société à s’engager auprès de ces associations : aujourd’hui, appeler une association est un fait très mineur dans la société". Et ce malgré les dissensions des mouvements féministes, qui sont selon elle aussi anciennes que ces mouvements eux-mêmes.  

Que faut-il conclure des chiffres qui font état d'une hausse des plaintes pour violences sexuelles cette année ? "Je ne peux pas vous dire s’il s’agit de plaintes pour des faits antérieurs ou s’il s’agit d’une augmentation des actes en tant que tels. Mais il est bon que des plaintes soient déposées, que la police soit formée pour recevoir ces plaintes", répond la secrétaire d'Etat, avant d'annoncer : 

"Nous allons développer une plateforme en ligne de signalement des violences sexistes et sexuelles : parmi les barrages à la plainte, il y a le fait de se déplacer et d’affronter une personne les yeux dans les yeux pour lui raconter ce qu’on a vécu”

Elle reconnait pour autant que la loi, seule, ne suffit pas à faire évoluer les comportements : “La loi en tant que telle ne suffit pas : si la loi suffisait à faire changer la société, ça ferait 40 ans qu’on aurait l’égalité salariale femmes-hommes”.  

Une société de la vigilance ?

Le risque n'est-il pas d'entrer dans une société de la vigilance ? Marlène Schiappa assure que d'une part, les idées reçues sur les Etats-Unis ou la Suède ne sont pas vraies ("Je n’ai jamais observé ce qui est décrit en France, on ne m’a jamais fait signer une autorisation écrite avant de monter avec un homme dans un ascenseur aux USA ou en Suède"), et d'autre part que "nous sommes Français, nous sommes latins, l’idée n’est pas de mettre en péril notre culture, nous allons garder la séduction, la gaudriole, les gauloiseries, mais il faut arrêter la vision romantique du harcèlement de rue. Ca a un impact sur la liberté des femmes à aller et venir”.

Si cela semble marquer un recul de la société patriarcale, la Secrétaire d'Etat affirme qu'il faut en permanence rester vigilant. Donnant l'exemple d'hôpitaux où il n'est plus possible de pratiquer des IVG, elle explique que "nous devons faire face à une union de circonstance des obscurantistes et des ultranationalistes qui veulent attaquer les droits des femmes, les droits des personnes LGBT, etc". Sans compter les menaces qui la visent directement, contre lesquelles elle a porté plainte. 

Sur l’éducation sexuelle à l’école 

Ce sujet, qui a fait polémique pendant l'été, dépend d'une loi de 2001, mais est très loin de ce qu'ont affirmé des rumeurs sur Internet. "Je me permets de saluer le travail des journalistes qui depuis le début de l’été n’ont de cesse de faire de la désintox, du fact-checking", déclare-t-elle. 

De quoi s'agit-il, alors ? "L’éducation à la vie affective et sexuelle commence au CP, mais elle est adaptée à l’âge des enfants, il n’y a pas de propos explicites, on ne parle pas de sexualité en tant que telle : on répond aux questions des élèves". L'idée est, en particulier, de lutter contre le fait que les enfants font souvent leur éducation sexuelle seuls face à des contenus pornographiques. "Nous allons exiger de la part de celles et ceux qui produisent ces contenus qu’ils mettent en place de vrais filtres : nous sommes prêts à aller très loin pour que ce ne soit pas à la libre disposition des enfants", ajoute-t-elle. 

Sur les écarts de salaires

Interrogée sur une possible publication par les employeurs de leurs écarts de salaires, elle explique que la mesure a justement été votée cet été

"Cet été a été voté un amendement qui oblige les employeurs à publier les écarts de salaires entre les femmes et les hommes et les oblige à résorber ces écarts de salaires". 

"C’est l’aboutissement de mois entiers de concertation avec les partenaires sociaux pour aboutir à cela : il faut faire une analyse fine pour obtenir un résultat juste", précise-t-elle 

Sur la PMA

Le sujet est compliqué si on le rend compliqué. Mais je pense qu’il est simple. La France autorise la PMA pour des femmes mariées avec des hommes mais pas pour les femmes mariées avec des femmes. C’est donc une discrimination fondée sur l’orientation amoureuse ou sexuelle d’une femme. Agnès Buzyn a indiqué que cela ferait partie de la révision des lois bioéthiques entre fin 2018 et 2019. In fine cela reviendra aux députés de voter”, explique-t-elle, assurant par ailleurs être "favorable au remboursement intégral de la PMA