Des histoires de femmes

Femmes qui pilent le mil.
Femmes qui pilent le mil. ©Radio France - Anne Pastor
Femmes qui pilent le mil. ©Radio France - Anne Pastor
Femmes qui pilent le mil. ©Radio France - Anne Pastor
Publicité

Très souvent exploitées et discriminées, en tant que femmes et "autochtones", elles seraient près de cent cinquante millions dans le monde à se battre au quotidien pour gagner leur place et leur reconnaissance.

Au Québec, 

Les amérindiennes sont les grandes oubliées de la société canadienne. Elles ne jouissent pas des mêmes droits et sont cinq fois plus victimes de violences sexuelles que les autres femmes. Pendant des années, leurs histoires sont restées ignorées mais la révélation de milliers de femmes autochtones disparues, assassinées ou victimes d'abus sexuels ternit un peu plus ce pays des droits de l'homme. Aujourd'hui, une commission d'enquête leur offre l'espoir de connaître la vérité.

Aujourd'hui, 80 % des femmes autochtones subissent des violences conjugales, 50 % des agressions sexuelles, si ce n’est plus. En trente ans, quatre mille, peut-être plus, toutes amérindiennes, ont été assassinées ou sont portées disparues au Canada. 1.200, officiellement au Québec, sont victimes de la violence ou de la misère, sans que les pouvoirs publics daignent enquêter sur leur sort. Un féminicide dans l’indifférence la plus totale. Mais la parole s'est libérée et, depuis 2015, une commission d'enquête sur les femmes disparues et assassinées entend les témoignages des familles.

Publicité
Fanny Wylde, première avocate autotchtone
Fanny Wylde, première avocate autotchtone
- Patrick Bard pour l'association en Terre Indigène

Fanny Wylde est procureure. Membre de la commission, elle a rencontré plus de cinquante familles. Aujourd'hui, elle revient à l’hôtel Bonaventure de Montréal. 

A Val d’Or, dans cette petite ville minière de 42.OOO habitants, située à sept cent kilomètres de Montréal, une autre femme soutient ces femmes autochtones discriminées ou abusées.

Edith Cloutier est la directrice du Centre d'amitié autochtone, et c'est ici que les femmes ont témoigné de violences ou d'abus de la part de la police. Elles se sont senties protégées dans ce lieu, crée il y a près de quarante ans. C’est devenu une mini communauté autochtone avec ses propres services : sa garderie, ses logements, ses formations, sa résidence pour personnes âgées ou encore son restaurant à 1 dollar. Le foyer a ouvert en janvier 2016. Toujours à l’écoute, il accueille et accompagne les femmes en souffrance ou les sans-abris.

Car l'itinérance à Val d'Or a une couleur : elle est autochtone. En moins de dix ans, elle est devenue l’un des maux qui ravage cette ville de l'or en territoire Anishinaabe, avec son lot de préjugés et de racisme.

Alors chez Willy, c'est un peu comme si on était à la maison. L'esprit est communautaire, bienveillant, le téléphone est gratuit. Sur le mur, une guitare est accrochée, comme un appel aux musiciens. Même le perroquet participe à la vie de ce refuge de jour aux allures de Far-West, sur la 3ème avenue.

Edith Cloutier sait qu'au-delà de l'accompagnement, c'est aussi en retrouvant leurs racines, le bois, la vie d'autrefois et ses savoirs, que ces femmes se reconstruisent peu à peu. 

A vingt kilomètres de Val d’Or, Kinawit est un site culturel autochtone, mais aussi un lieu de ressourcement et de guérison. Dans la forêt qui accueille aussi des non-autochtones pour que la rencontre ait lieu, que ce soit un lieu d'échange et de partage.

Edith Cloutier, directrice du Centre d’amitié autochtone de Val d'Or
Edith Cloutier, directrice du Centre d’amitié autochtone de Val d'Or
- Patrick Bard pour l'association en Terre Indigène

Au Tchad,

A neuf mille kilomètres de là, les femmes peules sont le pivot central de la communauté. C'est elles qui gèrent les ressources, la maison et qui assurent l’éducation physique et morale des enfants. 

Pourtant, elles sont prisonnières des us et coutumes comme l'excision ou le mariage forcé et le taux de scolarisation est nul. Aujourd'hui, certaines se battent contre le mariage forcé et luttent pour l'émancipation de ces femmes.

Hindou Oumarou Ibrahim, présidente de l’Association des femmes autochtones au lancement du livre « Les cent femmes du Tchad ».
Hindou Oumarou Ibrahim, présidente de l’Association des femmes autochtones au lancement du livre « Les cent femmes du Tchad ».
© Radio France - Anne Pastor

L'objectif de l’ Afpat est d’améliorer les conditions de vie des femmes. C’est à l'âge de quinze ans qu'elle prend conscience du sort réservé à ces « sœurs », nomades, à trois cents kilomètres au sud de N'Djaména. Épouse et mère dès l'âge de douze ans, sa vie se résume à un dur labeur silencieux.

Au lever du soleil, elles se retrouvent en groupe autour de ces jarres de mil à piler. Pas moins de dix kilos par jour et par famille. 

Hindou est venue apporter une machine à piler et organise la premier réunion sur le droit des femmes.Sur des nattes, au milieu du village, entre les cases (propriété de la femme d'ailleurs) et le passage des bœufs, ce fameux rideau bleu sépare les hommes et les femmes, assis ensemble, mais séparés. C'est déjà une mini révolution dans cette société patriarcale où la polygamie et le mariage forcé sont encore la règle et ses conséquences toujours aussi dramatiques, comme la surmortalité des jeunes filles en couche.

Ce matin, Hindou Oumarou Ibrahim est venue accompagnée d'un avocat et de sa sœur Aissatou, engagée elle aussi dans l'association. Le thème de la réunion : le droit des femmes. Tout le village est présent. Elles savent que l’éducation est la clef de l'émancipation de ces femmes nomades.

L’émancipation des femmes : une histoire de famille

6 min

Remerciements :

  • GITPA (Groupe International de Travail pour les Peuples Autochtones),
  • Audrey Rousseau, chercheur(e) au Centre féministe d'Ottawa,
  • Et l'association En terre Indigène

Ce programme a reçu le soutien de la compagnie Air Transat et TUI, au Québec, et de l' agence Tamera et de l' Ibis la Tchadienne, pour le Tchad.

Retrouvez Voyage en terre indigène dans Libération 

Programmation musicale :

  • Mounira Mitchala : "Al sahara"
  • Hana Vu/Satchy : "Cool"

Générique : "Raining for ages" de Daniel Breyer

Voix Off : le rappeur R.Can.

L'équipe