

Ils ont choisi la France, le pays colonisateur. « Ils », ce sont les Berbères, les premiers peuples d'Afrique du Nord. Les Amazighs, ces hommes libres, ont un jour quitté leur pays. Contraints à l’exil pour des raisons économiques ou politiques, chacun a sa façon de se reconstruire et de vivre loin de sa terre.
Les Kabyles d'Algérie sont plus d'un million et demi à vivre en France métropolitaine.
En banlieue parisienne, des femmes ont recréé leur pays, leur mode de vie et leurs traditions, avec un brin de nostalgie. Elles ont trouvé ici une terre d'asile et leur exil rime avec liberté.
A Drancy
A quelques dizaines de kilomètres, d'autres mots, d'autres poésies. Des femmes kabyles ont trouvé en France une liberté nouvelle. Pour rien au monde elles ne repartiraient, même si la nostalgie de l’exil est toujours là. Nadia est arrivée en 2000, à l’âge de vingt-cinq ans. Elle a rejoint son père, installé en France depuis les années 60.
Après la décennie noire des années 90 en Algérie, c'est une nouvelle vague d'immigration. Des familles provenant des petits villages de Kabylie s'exilent, laissant derrière elles leur montagne et leur terre.
Aujourd'hui, c'est le nouvel an berbère, le « Yennayer ». En France, la marie de Paris a même organisé une réception et, pour la première fois, les autorités algériennes ont annoncé que cette fête serait désormais un jour férié.
A Drancy, les femmes ont préparé les plats du pays et les familles se retrouvent. Les grands-mères sont les gardiennes de la tradition. Coiffées d'un foulard à franges, elles portent leurs plus belles tenues brodées, aux couleurs vives, et laissent entrevoir quelques bijoux berbères.
Ce soir, elles racontent leurs souvenirs, comme Fathma. C'est l'histoire de toute une vie au pays.

Les Touaregs, eux, ne sont que quelques centaines. La France est un refuge, en attendant un jour le retour. Ces nomades du désert ont perdu leur culture nomade, ainsi que leur territoire, aujourd'hui réparti entre cinq états : de la Libye à l’Algérie jusqu'au Niger.
Marginalisés et menacés par la pression islamiste dans la bande du Sahel, leur exil rime avec résistance et nostalgie. Nostalgie quand tu nous tiens. Les Touaregs n'aiment pas exprimer leurs sentiments. C’est à demi-mot et avec beaucoup de pudeur qu'ils évoquent leur douleur de vivre loin du désert.
Omar a 27 ans. Il est originaire du Niger. Son père a été l'un des premiers nomades Touaregs à suivre l'éducation coloniale française. Il y a quelques années, il a envoyé son fils à l'université en France. Aujourd'hui informaticien, Omar s'est bien intégré. Il vit dans un appartement moderne de Villeurbanne, mais son cœur est toujours au pays. Et quand il rencontre un autre Touareg, il se sent revivre.

Les Tinariwen sont des princes sans royaume. Leurs chansons évoquent un monde et une culture perdue, mais aussi un rêve de liberté. Ils portent la musique et les valeurs Touaregs à travers le monde, de concert en concert, de Singapour à Stockholm. Ce soir, ils sont à Élancourt, en banlieue parisienne. Dans les coulisses du théâtre, les musiciens jouent aux dominos. D'autres discutent avec leurs frères en exil.
L'ACB de Paris…un petit coin de Kabylie.
6 min
Bibliographie : "Sahara : le grand récit", de Michel Pierre, paru aux éditions Belin, en 2014.
Remerciements :
- L' ACB,
- Farid Mammeri,
- Le Centre franco-berbère de Drancy,
- Belkacem Lounes, secrétaire général du Congrès mondial Amazigh,
- Aghali de l'Association Tilit,
- Arnaud Contreras, producteur à France Culture,
- La diaspora Touareg,
- Et le M usée des confluences.
Retrouvez Voyage en terre indigène dans Libération
Programmation musicale :
- Arthur H : "Reine de cœur"
- Yuma/Ramy Zoghlemi : "Khallini chwaya"
- Voyou : "Papillon"
Générique : "Raining for ages" de Daniel Breyer
Voix Off : le rappeur R.Can
Une autre manière d'être, de vivre et d'agir dans le monde. C'est le message de ces oubliés de la Francophonie que vous avez entendu cet été dans ce Voyage en terre indigène. Certes, ils se battent encore pour gagner leur place et leur liberté, mais 2019 est l'année des peuples autochtones. C'est un espoir pour faire entendre leurs voix et le début de la reconnaissance. Merci à toutes ces personnes de m'avoir accordé leur confiance, aux anthropologues pour leurs conseils, aux ONG, à France Inter et à toute l'équipe.
L'équipe
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