

Pour faire face aux diverses crises, dont celle climatique, certains chercheurs comme Kevin Jean ont recours à la désobéissance civile pour tirer la sonnette d’alarme et sauver notre planète.
- Kevin Jean Epidémiologiste, maître de conférences au CNAM
Avec
Kevin Jean, Maître de conférences et chercheur en épidémiologie au Conservatoire national des arts et métiers et membre du conseil d'administration de l'association Sciences citoyennes qui milite pour la démocratisation de la science.
Qu’est-ce qui fait qu'on passe de scientifique à scientifique en rébellion ?
Pour Kevin Jean : « Nous sommes tous beaucoup plus à l'aise dans nos laboratoires que dans ses activités. On fait ces actions quand on commence à se rendre compte que le simple fait d'énoncer des faits scientifiques ne suffit pas à déclencher une action suffisante de la part des décideurs quand on commence à entrevoir le premier acte d'une catastrophe climatique. On l'a vu cet été, on le voit avec les chiffres de records de température cette année alors qu'on continue dans cette lancée en accélérant les émissions de gaz à effet de serre continue d'augmenter. Il faut donc trouver d'autres manières, d'autres façons de faire passer le message. »
Les origines des scientifiques en rébellion
C'est en février 2020 que le mouvement des scientifiques en rébellion a vu le jour. On le doit à deux doctorants en physique de Saint Andrews Collège en Écosse. Leur source d'inspiration est claire, Extinction Rébellion, un groupe d'activistes formé en 2018 pour protester contre le dérèglement climatique et organiser des opérations de désobéissance civile, non-violente. D'Extinction Rébellion à scientifique en rébellion, il n'y aura pas fallu attendre longtemps. Une des premières actions d'ampleur de ces scientifiques devenus militants avait été de s'en prendre à la publication scientifique Springer et à la British Royal Society. C'était au printemps 2021. Depuis, le mouvement s'intensifie et se mondialise. Si les débuts ont été perturbés par la crise sanitaire, dès la fin des restrictions, on a vu apparaître une série d'opérations comme celle du printemps dernier en France. Une vingtaine de scientifiques ont perturbé la fermeture du Musée d'Histoire Naturelle à Paris. En Allemagne, 6 avril dernier, plus de 1000 scientifiques se sont mobilisés pour pointer du doigt la banque américaine JP Morgan Chase, qui finance les énergies fossiles. Alors, faut-il désobéir ?
Une impression de ne pas être écouté
Malgré les rapports du GIEC et près de 50 ans passés à alerter sur le climat, les scientifiques peinent encore à se faire entendre et ont l'impression de ne pas se faire écouter : « On a des tribunes qui ont été signées par des scientifiques et encore une fois, les actions ne suivent pas. Au bout d'un moment, il faut revoir nos propres méthodes, et avec quels moyens d'expression on peut adopter et on se tourne donc vers ses actions. » Mais comment ces scientifiques se « forment » à ces actions ? « Le recours à la désobéissance civile, c'est quelque chose qui est devenu, pour les associations environnementales notamment, un recours beaucoup plus fréquent depuis quelques années, avec des groupes comme Extinction, Rébellion ou à une vraie COP21. Effectivement, ce sont des groupes qui ont cette expertise et, initialement, nous étions invité sur ce genre d'actions et nous avons bénéficié de l'expérience que ces groupes ont acquise. Le problème, c'est toujours la distance qu'on a entre les engagements où l'on nous dit qu'en 2030, on va baisser nos émissions d'aux moins 55 %, ce qu'a répété le président de la République il y a peu de temps et des mesures en face de ces engagements. Et c'est ça, c'est tout ce fossé qu'on essaye de dénoncer et qu'on essaye de rendre visible pour montrer qu'on ne peut pas se contenter de promesses creuses. »
Comment ces scientifiques sont perçus dans leur communauté ?
Est-ce qu'il y a une unanimité derrière ce type d'engagement ou bien certains scientifiques estiment que la désobéissance n'est pas leur rôle ? « Ce qui est assez surprenant, c'est qu'effectivement, on a beaucoup de sympathie, de reconnaissance de ce mouvement ans la communauté scientifique. On a plusieurs éléments qui nous montrent qu'en France, le mouvement est né d'une tribune qui a été signée en février 2020. On appelait les scientifiques à s'engager dans ces mouvements. On pensait qu'on allait collecter 70 signatures. On en a collecté plus de 1000. Tout récemment, avec les épisodes de mobilisations en Allemagne, on a eu quatorze scientifiques qui ont passé une semaine en prison pour s'être collé la main sur une des BMW. En moins de deux jours, on a eu plus de 700 scientifiques français avec des grands noms qui ont soutenu ces actions. Dans mes discussions, je récolte beaucoup plus de sympathie que de condamnation de ces actions. Nous avons un sentiment de soutien de la communauté et on commence à voir dans les revues scientifiques, des articles, même des éditos de revues très prestigieuses qui soutiennent et qui appellent à ces actions. Nous avons vraiment une sorte de reconnaissance de la légitimité de ces actions de la part de scientifiques. »
Pour en savoir plus, écoutez l'émission...
Programmation musicale
- 16h14
- 16h31
Les dormantes Zaho De SagazanLes dormantesAlbum Les dormantes (2022)Label VIRGIN RECORDS FRANCE - 16h50
Souled out on you Robert FinleySouled out on youAlbum Sharecropper's son (2021)Label EASY EYES SOUND
L'équipe
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