Police scientifique : ces experts qui traquent les nouvelles drogues

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Police scientifique : ces experts qui traquent les nouvelles drogues

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Un ingénieur du service national des douanes judiciaires (SNDJ) analyse avec un spectroscope à infrarouge du 4-MEC, une drogue de synthèse proche de l'ecstasy
Un ingénieur du service national des douanes judiciaires (SNDJ) analyse avec un spectroscope à infrarouge du 4-MEC, une drogue de synthèse proche de l'ecstasy
© AFP - PHILIPPE DESMAZES

Entretien avec Fabrice Besacier, chef de la division Chimie au laboratoire de l’Institut national de police scientifique de Lyon. Avec 27 experts venus de toute la planète, dans le cadre du congrès mondial, il a animé un atelier sur la détection des nouvelles drogues de synthèse produites en Chine.

800 experts du monde entier se sont réunis cette année à Lyon. Policiers, gendarmes, chercheurs de sociétés privées, européens, australiens ou encore asiatiques, sont venus partager les toutes dernières révolutions technologiques à l’occasion du congrès international des "experts", qui a lieu tous les trois ans et qui s'est déroulé cette année dans le berceau de la police scientifique à Lyon. 

Fabrice Besacier, chef de la division Chimie au laboratoire de l’Institut national de police scientifique de Lyon, a animé mardi une session de formation sur la comparaison d’échantillons de stupéfiants. Une formation qu'il a développé à Lyon, explique-t-il, dans l'idée que l'on puisse s'échanger des information dans de futures bases de données communes. "C’est un peu comme un congrès de neurochirurgiens. Vous êtes peu nombreux dans le monde, vous ne vous voyez pas souvent et si vous voulez vous améliorer, vous devez absolument échanger. Sur les drogues de synthèse par exemple, on a eu une dizaine d’intervenants européens, allemands, finlandais et français, mais aussi australiens ou de Singapour, parce que tout le monde est confronté à l’arrivée de ces nouveaux produits."

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Certaines drogues sont pour le moment indétectables

Certains produits posent beaucoup de problèmes aux "experts". Juridiques d'abord, quand ils sont classés dans certains pays et pas dans d’autres, et effectivement des soucis techniques car on ne sait pas comment les identifier. Il faut donc mettre en place, dans les laboratoires, des stratégies permettant d'identifier ces produits que l’on ne connait pas et qui ne sont jamais apparus auparavant. 

"Le premier laboratoire qui y est confronté, après une saisie par des gendarmes, des policiers ou des douaniers, doit être capable de mettre en œuvre tout un panel de techniques, explique Fabrice Besacier. Et ce travail, il ne faut pas qu’il soit refait ailleurs, d’où la nécessité d’échanger à l’international et de créer des bases de données. Si un confrère de Singapour identifie un nouveau produit, il faut que si le produit arrive en France, nous soyons capables de l’identifier très rapidement."

La rapidité des analyses est un enjeu important 

Quand quelqu’un se retrouve en garde à vue, il faut pouvoir caractériser le fait que le produit qu’il avait en sa possession est illégal, explique le chef de la division Chimie au laboratoire de l’Institut national de police scientifique de Lyon. Il faut pouvoir le faire d'autant plus vite qu'une garde à vue ça ne dure pas très longtemps…

En France, pour l'instant, les nouvelles drogues de synthèse ne représentent pas grand chose face aux quantités saisies de cocaïne, d’héroïne et de cannabis. _"On a déjà eu quelques affaire_s, explique Fabrice Besacier, mais Singapour, qui est pourtant un tout petit pays, connaît déjà énormément de dossiers m'explique ma collègue."

Que faire des données et des échantillons ?

Au congrès de Lyon, on a justement parlé des ces échanges d’information et sur quelles bases de données les stoker, ce qui pose tout un tas de problèmes administratifs. Il y avait jusqu'ici un représentant de la commission européenne pour les centres de recherche qui était présent à Lyon. "C'est lui justement qui a un rôle à jouer pour centraliser les données en appui de nos laboratoires", explique Fabrice Besacier. 

C’est un enjeu très important également pour les pays hors Union européenne. Il faut trouver le moyen de mieux échanger nos informations.

Après, les échanges d’informations, on a également parlé d'échanges échantillons.

Un somnifère pour les éléphants

"Nous avons été confrontés à un produit qui s'appelle le Carfentanil, raconte l'expert. Il est utilisé pour endormir les éléphants et on l'a retrouvé dans des doses de stupéfiants saisies, mélangées à de l’héroïne. C’est un produit extrêmement dangereux. Vous pouvez faire une overdose avec de très faibles quantités de ce produit. Jusqu'ici on n’avait pas de références de cette substance et donc on n’a pas été capables de faire le dosage, de mesurer la quantité de Carfentanil dans l’échantillon qui contenait surtout de l’héroïne. Mais un collègue étranger a heureusement mis au point une méthode pour doser ce produit. On en a discuté mercredi et on va s'échanger des échantillons. Donc, vous voyez, ça nous permet de résoudre des problèmes très concrets ce congrès, ce ne sont pas seulement des grandes idées qu'on échange !"