Pourquoi il faut vraiment se préoccuper de la jeunesse du monde arabe

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Pourquoi il faut vraiment se préoccuper de la jeunesse du monde arabe

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Les moins de 30 ans ont un rôle capital à jouer dans le développement du monde arabe, selon les Nations unies
Les moins de 30 ans ont un rôle capital à jouer dans le développement du monde arabe, selon les Nations unies
© AFP - Fethi Belaid

Il y a de plus en plus de jeunes de moins de 30 ans dans la population des pays arabes. Selon un rapport des Nations unies, leur rôle est incontournable pour l'avenir de ces pays.

Les deux tiers de la population des pays arabes ont moins de 30 ans. Cela concerne déjà plus de 100 millions de personnes. Et la tendance, quoique fléchissante, restera positive jusqu’en… 2050. Mais cette masse, une ressource incroyable, un potentiel de développement économique et social unique, peut aussi constituer un risque majeur pour la stabilité de la zone.

Aujourd’hui, ceux que l’on appelle les jeunes – ils ont entre 15 et 29 ans — dans le monde arabe sont plus éduqués et plus connectés au reste du monde qu’ils ne l’ont jamais été. Les poussées contestataires depuis 2011 en l’Afrique du Nord et au Proche-Orient ont prouvé la capacité de cette tranche d’âge à se mobiliser et à formuler des voies de changement.

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Marginalisation politique et économique

Mais paradoxalement, elles ont aussi révélé le fort degré de marginalisation politique et sociale dont les jeunes sont victimes et leur incapacité, de fait, à porter le changement de façon durable. Selon les Nations unies, la disparité entre leur participation aux mouvements populaires et leur participation institutionnelle est particulièrement forte : les jeunes des pays arabes participent beaucoup plus aux manifestations qu'ailleurs dans le monde, alors qu'ils participent beaucoup moins aux élections, comme le montre le graphe ci-dessous.

Vers une hausse du chômage ?

Les jeunes dans les pays arabes sont aussi mis de côté sur le plan économique. En matière d’emploi, le taux de chômage moyen en 2016 dans les pays arabes étudiés avoisine les 30%, contre une moyenne mondiale d’à peine 15%. Selon les estimations des Nations unies, la situation devrait empirer avec les années: le rapport publié mardi estime à 60 millions le nombre d’emplois qui devraient être créés d’ici 2020 pour absorber le nombre de personnes qui vont entrer sur le marché du travail. Or, selon le rapport ce nombre ne sera jamais atteint, et le chômage devrait augmenter.

L’histoire des régimes politiques locaux et leur évolution pèsent lourdement dans ce bilan. Mais surtout, le monde arabe concentre depuis 1948 17,6% des conflits (plus de deux morts sur trois du fait de guerres) et 57,5% des déplacements de population. A lui seul, le monde arabe concentre 36,1% des attaques terroristes perpétrées entre 2000 et 2014.

Trois ressortissants sur quatre exposés aux conflits

L’ONU estime que 4 Yéménites sur 5, soit 21,2 millions de personnes, ont eu recours à l’aide humanitaire depuis 2015. 250.000 personnes ont trouvé la mort en Syrie depuis 2010, et 11,6 millions de personnes ont fui leur maison ou le pays. L’accès à la nourriture est difficile pour 1,2 millions de Libyens

Lorsqu’on regarde la totalité du monde arabe, le nombre de pays en conflit a bondi en une dizaine d’années : ils n’étaient que quatre en 2003 (Irak, territoire palestinien, Soudan, Somalie) ; aujourd’hui il y en a 11. Et cela ne devrait pas s’arranger : en 2050, 3 ressortissants des pays arabes étudiés sur 4 seraient exposés à un risque de conflit.

En rouge, les pays en conflit actuellement. En rouge foncé, les pays qui connaissaient déjà un conflit en 2003.

Un modèle de développement "axé sur les jeunes"

L’urgence est donc double, pour les Nations unies : agir sur les structures politiques, économiques et sociales pour qu’elles puissent s’enrichir de la parole et des intérêts des jeunes générations, d’un côté, et de l’autre faire en sorte que l’économie génère suffisamment d’emplois et des niveaux de revenus suffisamment élevés pour sécuriser la vie quotidienne des 15-29 ans mais aussi pour leur permettre de s’engager dans les sphères politiques officielles et de faire entendre leur opinion.

Ce “modèle de développement axé sur les jeunes”, préconisé par le rapport de l’ONU, passe par l’éducation, évidemment, mais aussi par un effort renforcé en faveur de l’égalité des chances et contre les discriminations (de genre, ethniques, religieuses…), pour qu’ils puissent “réaliser leur plein potentiel”.