Pourquoi la température corporelle des Américains a baissé depuis le XIXe siècle

Publicité

Pourquoi la température corporelle des Américains a baissé depuis le XIXe siècle

Par
Photo d'illustration
Photo d'illustration
© Radio France - Pierre Rousseau

La température corporelle moyenne des Américains a légèrement baissé depuis la révolution industrielle. C’est ce que montre une étude de chercheurs de l’université de Stanford en Californie, publiée dans la revue eLife, le 7 janvier dernier.

La température de votre corps n’est peut-être plus de 37°C comme on l’enseigne partout dans le monde. D’après l’étude des chercheurs Myroslava Protsiv, Catherine Ley, Joanna Lankester, Trevor Hastie et de Julie Parsonnet, de l’université de Stanford, aux Etats-Unis, la température corporelle des hommes a baissé depuis le XIXe siècle de 0,59°C et celles des femmes de 0,32°C.

Pour obtenir ces chiffres, les chercheurs se sont appuyés sur plusieurs cohortes. D’abord, 23 710 vétérans de la guerre civile américaine qui ont été suivis de 1860 à 1940. Ensuite, 15 301 personnes suivies dans le cadre d’une étude sur la nutrition pendant 5 ans, de 1971 à 1975. Enfin, 150 280 autres Américains étudiés pendant 10 ans, de 2007 à 2017. Soit au total, 677 423 mesures de températures du corps humain sur trois cohortes de population, couvrant 157 années de mesures et 197 années de naissance.

Publicité

La température moyenne de 37°C a été établie en 1851 par le médecin allemand Carl Reinhold August Wunderlich à Leiptzig, après l’analyse de millions de températures prélevées sur quelques 25 000 patients. Mais ces dernières années, les chercheurs savaient que la norme fixée par Wunderlich n’était plus d’actualité. "Une compilation de 27 études a rapporté que la température moyenne était uniformément inférieure à l'estimation de Wunderlich. Récemment, une analyse de plus de 35 000 patients britanniques avec près de 250 000 mesures de température, a révélé que la température orale moyenne était de 36,6 °C, confirmant cette valeur inférieure", précise l’étude des chercheurs de Stanford.

D’après les résultats obtenus par les chercheurs de l’université de Stanford, en moyenne, la température corporelle des hommes a baissé de 0,03°C par décennie de naissance et de 0,029°C pour les femmes. 

Comment expliquer cette baisse ? 

Dans un premier temps, les chercheurs californiens se sont demandé si les différents thermomètres utilisés au XIXe et ceux utilisés de nos jours et les différentes méthodes utilisées ne pouvaient pas expliquer les différences de températures mais pour eux, cette explication est très peu probable. "Nous pensons que la baisse de température observée reflète des différences physiologiques plutôt qu'un biais de mesure", explique l’étude de Stanford.

Les chercheurs avancent deux principales hypothèses. Premièrement, et c’est leur explication la plus plausible, ils estiment que le niveau d’inflammation diminue avec les progrès de la médecine et de l’amélioration des conditions sanitaires. "Le développement économique, l'amélioration du niveau de vie et de l'assainissement, la diminution des infections chroniques causées par les blessures de guerre, l'amélioration de l'hygiène dentaire, le déclin de la tuberculose et des infections paludiques, et l'aube de l'âge antibiotique ensemble sont susceptibles d'avoir diminué l'inflammation chronique depuis le 19 e siècle. Par exemple, au milieu du XIXème siècle, 2 à 3% de la population vivaient avec une tuberculose active", expliquent les chercheurs.

Autre explication possible, les changements de température ambiante. "Au XIXe siècle, les maisons aux États-Unis étaient chauffées de façon irrégulière et jamais refroidies. Dans les années 1920, cependant, les systèmes de chauffage atteignaient un large segment de la population, la température nocturne moyenne continuant d'augmenter même à l'époque moderne. La climatisation est désormais présente dans plus de 85% des foyers américains. Ainsi, le temps que la population a passé dans les zones thermoneutres a considérablement augmenté, entraînant potentiellement une diminution de la RMR et, par analogie, de la température corporelle", précise l’étude.