Pourquoi le collectif #MeTooThéâtre ne va finalement pas prononcer de discours à la cérémonie des Molières
Par Juliette GeayLa youtubeuse Marie Coquille-Chambel, à l'origine du mouvement #MeTooThéâtre, accuse l'organisation d'avoir censuré le discours qu'elle devait prononcer. Le président des Molières Jean-Marc Dumontet réfute cette accusation. Le collectif a appelé à protester devant les Folies Bergère.
C'est une cérémonie très attendue par la profession, mais tout le monde ne sera pas là pour autant. Le collectif #MeTooThéâtre, fondé en octobre 2021 pour dénoncer les violences sexuelles dans ce milieu, a annoncé ce samedi qu'il ne participerait finalement pas à la remise des Molières. Invitée par l'organisation pour prononcer un discours sur scène sur les violences sexistes et sexuelles, la fondatrice du collectif, Marie Coquille-Chambel, accuse les Molières d'avoir "censuré" son texte. Le président des Molières, Jean-Marc Dumontet, rejette cette accusation. Il estime que le texte proposé ne correspondait pas à l'accord conclu entre les deux parties.
"Je m’appelle Marie Coquille-Chambel et j’ai été violée par un acteur de la Comédie-Française en 2020", écrit la fondatrice de #MeTooThéâtre en première phrase de son discours, qui ne sera finalement pas prononcé, mais qu'elle a publié samedi 28 mai sur un blog de Mediapart. Cette première phrase est au centre de la polémique. Marie Coquille-Chambel, critique de théâtre sur YouTube, fait directement référence à son ex-conjoint, Nâzim Boudjenah, sociétaire de la Comédie Française contre lequel elle a porté plainte pour "viol", avec constitution de partie civile.
Un désaccord sur le contenu du discours
Or, explique Jean-Marc Dumontet, lorsqu'il a proposé à la fondatrice de #MeTooThéâtre en avril dernier de prononcer un discours sur les violences sexistes et sexuelles dans le milieu lors de la cérémonie des Molières, "nous avons convenu qu'à aucun moment il n'y aurait d'attaques ad hominem, que des affaires personnelles ne seraient citées."
Au contraire, il s'agissait selon lui d'annoncer "une proposition" suggérée par Marie Coquille-Chambel, pour "la mise en place d'un référent sur les agressions sexuelles dans chaque théâtre ou compagnie", comme cela existe dans le cinéma. Or "aucune proposition", selon lui, dans ce discours relu avant la cérémonie. Mais pour le collectif, il n'était pas question "de policer notre parole, pour correspondre à une demande qui serait de proposer simplement une solution", explique Marie Coquille-Chambel.
Le refus de policer sa parole
Elle renchérit : "Tout au long de la semaine on m'a demandé le texte, en me disant que ce n'était pas pour nous policer mais pour préparer les répétitions". Elle le fournit finalement ce samedi, "très en retard", selon l'organisation. Marie Coquille-Chambel indique qu'on l'a tout de suite rappelée pour opérer un certain nombre d'"amendements". À ce moment-là, le collectif #MeTooThéâtre décide de ne plus répondre, et publie un communiqué samedi 28 mai au soir sur Twitter. "Ce n'était pas possible qu'on nous censure. Pouvoir dire à une heure de grande écoute qu'on croit des victimes, dans une cérémonie officielle de remise de prix culturels, ça ne me parait pas étonnant, ni politiquement trop engageant."
Un autre passage a été l'objet de discorde. Marie Coquille-Chambel décrivait dans son discours "une cérémonie où des hommes accusés de viol sont nommés et continuent de se produire sans jamais avoir été inquiétés par la justice". "Je ne crois pas que c'est vrai", et surtout "ça n'avance à rien", répond Jean-Marc Dumontet. Le collectif #MeTooThéâtre a appelé à un rassemblement de protestation devant les Folies Bergère à partir de 19h30.