Avec YouTube TV, le site de vidéos proposera bientôt un bouquet de chaînes de télé pour 35 dollars par mois. Une offre très américaine pour les Américains, notamment les jeunes.
Le poids des opérateurs historiques
Au pays des Comcast ( 22 millions d’abonnés), DirectTV (20 millions) ou Verizon (4,6 millions), les grands opérateurs de télévision payante, les consommateurs ont longtemps été cantonnés à un choix insatisfaisant : souscrire l’offre disponible dans leur quartier ( 90 à 140 dollars par mois pour internet, la télé et le téléphone chez ComCast), ou payer très cher pour tirer le câble d’un concurrent jusqu’à son pas de porte. En d’autres termes, au-delà de l’accès à internet et au téléphone, les Américains n’avaient accès qu’à un seul choix de chaînes de télévision, un bouquet unique, à regarder en direct.
Les trublions d’internet
Mais ça, c’était avant. Avant internet, notamment, et Youtube en particulier.
Pourquoi regarder MTV quand on peut engloutir des clips sur le web ? Pourquoi se coller devant son téléviseur alors que CNN diffuse en direct sur son site ? Bref, pourquoi payer (cher) un service audiovisuel quand on peut « zapper » gratuitement sur le web ?
Première réponse du marché aux États-Unis, l’arrivée de Netflix (93 millions d’utilisateurs dans le monde, dont 49 aux États-Unis), Hulu (12 millions) ou Amazon Prime (63 millions), pour ne citer qu’eux. Avec leurs séries, leurs films, leurs documentaires exclusifs par centaines, le tout sans publicité, ces plateformes payantes ont pris des parts de marché aux opérateurs historiques. Mais les bonnes vieilles chaînes américaines sont absentes de leur catalogue.
Le retour de la télévision de flux
À l’heure où la consommation de programmes audiovisuels tend à se reporter sur la vidéo à la demande (VOD), la télévision en direct, très parasitée par la publicité (hors chaînes à péage) a du plomb dans l’aile. A-t-elle pour autant perdu son intérêt pour les téléspectateurs ? Sont-ils tous allergiques à la publicité ? A l’évidence, non. Il y a toujours une place pour le direct, en particulier dans l’information ou le sport.
C’est, sans doute, le pari fait par Youtube : les habitudes de consommation ont changé – on ne regarde plus seulement la télévision sur un téléviseur, on la regarde beaucoup plus en différé… – mais l’appétence pour les programmes de flux n’est pas éteinte.
Les jeunes, en particulier, consomment beaucoup d’images sur mobile. D’où l’intérêt de pouvoir proposer un bouquet de chaînes, avec du CNN, du MSNBC ou du ESPN dedans, accessibles partout et tout le temps, probablement dans quelques mois (pas de date de lancement arrêtée).
La question du prix
Youtube TV coûtera au minimum 35 dollars par mois. Une somme qui vient s’ajouter aux coûts d’accès à internet, à la maison (30 à 50 dollars par mois) ou sur mobile (60 à 145 dollars par mois pour le téléphone et les données) et à la nécessité de disposer d’un terminal : ordinateur, smartphone, tablette… C’est donc sur l’offre de programmes que le choix se fera. Ceux qui ont fui la télévision à l’ancienne pour s’abonner aux plateformes de vidéo à la demande (moins de 10 dollars par mois) ne paieront sans doute pas pour retrouver CNN en direct via Youtube. Mais les amateurs de sport, de talk-shows ou d’info y auront peut-être intérêt. A condition que Youtube parvienne à négocier tous les droits audiovisuels nécessaires (c’est difficile), et ce n’est pas encore fait.
Pourquoi pas en France ?
Dans l’Hexagone, la plupart des services audiovisuels, du moins dans les zones les plus denses, sont désormais fournis par les opérateurs de télécommunications. Les box, qui donnent accès à internet, aux programmes de télévision et au téléphone (« triple play », donc), sont généralisées et leurs performances indiscutables. Le tout pour, en général, moins de 40 euros mensuels. Loin des factures qu’un abonné Verizon ou Comcast doit honorer chaque mois pour un service « équivalent » (voir ci-dessus). Et avec, en plus, la possibilité d’accéder aux plateformes de vidéo à la demande. Autant dire que Youtube TV, à supposer que l’entreprise s’intéresse au marché français, n’arriverait pas en terrain conquis.