Présidentielle : le Brésil entre rejet de la gauche et tentation de l'extrême-droite
Par Olivier Poujade, Olivier Bénis
Le pays pourrait élire ce dimanche le successeur du président actuel, Michel Temer. Lors de ce premier tour, près d'un Brésilien sur trois compte voter pour le candidat d'extrême-droite Jair Bolsonaro. À l'inverse, le parti de gauche de l'ancien président Lula a perdu la confiance de nombreux électeurs.
Lula avait quitté le pouvoir en 2010 avec plus de 80 % d'opinions favorables. Aujourd'hui, près de la moitié des Brésiliens disent vouloir se débarrasser du PT, le Parti des Travailleurs. "C'est un rejet par rapport à ce qu'ils ont fait", explique Paolo. "Ils ont dit une chose et en ont fait une autre ! Le discours du PT, lors de la première élection de Lula, c'était 'le Parti des Travailleurs ne vous volera pas'. Ça a été le contraire : ils ont institutionnalisé la corruption."
Même si des hommes politiques de tous bords sont impliqués, c'est le PT qui incarne aujourd'hui la corruption. Cet autre électeur rejette les amalgames, mais estime que le parti doit reconnaître ses erreurs. "Il y un minimum d'autocritique à faire", assure Eduardo-Gomez. "Ceux qu'on voit aujourd'hui sortir du placard pour faire l'apologie de la violence, le font à cause des politiques que nous avons menées. C'est la responsabilité du Parti des Travailleurs."
Le candidat du PT, Fernando Haddad, persiste pourtant à défendre les bilans de Lula et Dilma Roussef, sans prendre ses distances. Probablement une erreur stratégique dans cette campagne : une aubaine pour Jair Bolsonaro, le candidat d'extrême-droite.
L'ancien militaire séduit de plus en plus
Car ce dernier fait toujours la course en tête. Tout juste sorti de l'hôpital la semaine dernière (après avoir été poignardé), le candidat recueille 32 % d'intentions de vote. Il pourrait même, selon certains analystes, l'emporter dès le premier tour.
"Il nous promet de remettre de l’ordre dans la maison", résume Carlos, l'un de ses partisans. Faire appel à plus de militaires dans son gouvernement, abaisser l’âge de la majorité pénale, permettre à chaque citoyen de posséder une arme : c’est avec ces mesures que Jair Bolsonaro compte lutter contre la violence, et c’est justement ce qui plait à ses électeurs. "Imaginez une maison où vous avez beaucoup d’enfants rebelles : ou vous optez pour une doctrine rigide, ou vous laissez filer", analyse Carlos. "Au Brésil, c’est l’heure de la doctrine rigide. Au début c’est dur, mais c’est le seul remède."
La méthode forte pour faire plier les minorités, comme le dit le candidat d’extrême-droite. Un discours radical, provocateur, populiste... Mais pour Rildo, ce ne sont que des mots et il ne faut pas en avoir peur : "Bolsonaro c’est un peu comme Trump : il doit tenir sa ligne. Un peu comme le type qui veut draguer une fille... Il lui dit ce qu’elle veut entendre, 'comme tu es belle', 'comme tu sens bon'... La population est réceptive et il commence vraiment à montrer que c’est la solution ! Vous savez ce qu’il a réveillé en moi ? Le patriotisme !"
L’amour d’un Brésil dirigé par un candidat qui n’a cessé de multiplier les déclarations racistes, homophobes et misogynes. Des mots qui l’ont placé largement en tête des enquêtes d’opinion.