Recrutement des enseignants : une année 2022 noire avec moins de candidats et moins d'admissibles
Par Sonia Princet, Adrien Toffolet
Plus de 200 candidats manquants en mathématiques, plus de 130 en allemand. Les premiers résultats des épreuves d'admissibilité du Capes sont inquiétants. Y aura t-il assez d'enseignants devant les élèves à la rentrée prochaine ?
On savait le métier de moins en moins attirant ces dernières années, mais 2022 semble être une année catastrophique pour le recrutement des enseignants. Les concours pour entrer dans la profession ont de plus en plus de mal à faire le plein. D'après les premiers résultats des épreuves d'admissibilité du Capes connus depuis mardi, dans plusieurs disciplines il faut s'attendre à d'importants déficits dans les effectifs, notamment en mathématiques et en allemand.
Une chute vertigineuse
Cela fait des années que la discipline des maths est déficitaire, mais cette année les prétendants sont encore moins nombreux : 816 candidats admissibles sur 1035 postes de professeurs de mathématiques ouverts, soit deux fois moins de prétendants qu'en 2021. Il manque donc déjà plus de 200 professeurs potentiels et ce sera bien plus après les oraux d'admission puisque les jurys veillent tout de même à ne pas trop abaisser le niveau de recrutement.
Même constat concernant la discipline allemand, avec une chute vertigineuse : 83 candidats admissibles pour 215 postes ouverts, et là aussi les prétendants ont fondu de plus de moitié par rapport à l'année dernière.
Année de transition
"C’est une année noire mais ce n’est pas la première”, réagissait jeudi matin sur France Info Sophie Vénétitay, secrétaire générale du SNES-FSU, "ça fait plusieurs années qu'on perd des postes".
C'est dû en partie à une réforme des concours qui se passent désormais à la fin du master 2 et non plus en master 1. Ceux qui ont passé le concours en master 1 l'an dernier, et qui l'ont déjà eu, ne vont pas se représenter, le vivier de candidats est donc moins important cette année en master 2. C'est une année de transition. Mais le phénomène est en réalité plus ancien, avec une érosion continue du nombre de candidats dans certaines disciplines, qui s'est accélérée depuis 2018.
A France Inter, Bruno Bobkiewicz, le secrétaire général du principal syndicat des chefs d'établissement (SNPDEN), explique qu'il y a "d'abord un problème important d'attractivité du métier qui dépasse largement le cadre des mathématiques, qui est lié à l'image globale qu'a le métier d'enseignant aujourd'hui, et évidemment, au niveau de rémunération. Et puis, on a une conséquence très directe de la logique de mastérisation qui fait qu'aujourd'hui, on attend un bac +5 pour le passage des concours et qui, effectivement, réduit le vivier. Et quand on a bac +5, objectivement, on a certainement d'autres opportunités que celui de devenir enseignant avec un niveau de rémunération qu'on connaît."
Le ministère assure qu'il avait anticipé. Qu'en maths par exemple, il y a des professeurs fonctionnaires en surnombre et 20% de contractuels en moins depuis 3 ans. "Y aura t il suffisamment d'enseignants ? Le ministère nous dit que oui. On a quand même quelques inquiétudes puisque la crise Covid nous a montré que le vivier de remplacement était déjà complexe à identifier. Donc, on ne peut être qu'inquiet", alerte Bruno Bobkiewicz.
Une situation aussi alarmante dans le premier degré
On constate aussi cette désaffection pour le métier de professeur des écoles avec des taux d'admissibilité en baisse selon les académies. A Dijon par exemple, la marge est très faible : 198 admissibles pour 172 postes.
Et ce sont les académies d'Ile de France qui seront les plus déficitaires.