Réforme des retraites : ce qu'il faut retenir de l'interview d'Elisabeth Borne sur France 2

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Réforme des retraites : ce qu'il faut retenir de l'interview d'Elisabeth Borne sur France 2

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La première ministre Elisabeth Borne explique la réforme des retraites sur France 2, le 2 février 2023.
La première ministre Elisabeth Borne explique la réforme des retraites sur France 2, le 2 février 2023.
© AFP - EMMANUEL DUNAND

Une réforme "indispensable" pour "l'avenir du système". La Première ministre a fait de la pédagogie sur France 2, pour tenter de convaincre les Français de la nécessité de la réforme des retraites. Sur l'emploi des séniors, elle estime qu'il faut "aller plus loin" que l'index déjà annoncé.

La première ministre Elisabeth Borne était l'invitée de l'émission politique "L'Évènement" sur France 2. Durant 40 minutes, elle a répondu aux questions de la journaliste Caroline Roux et fait de la pédagogie pour expliquer une réforme qu'elle juge "indispensable", sans quoi "notre système [de retraites] par répartition ne tiendra pas". "J'entends les réticences, les inquiétudes" mais "ma responsabilité, c'est de dire la vérité aux Français", a-t-elle déclaré.

"Les dépenses n'explosent pas, mais les recettes baissent"

D'abord interrogée sur le rapport du Conseil d'Orientation des Retraites (COR), selon lequel "les dépenses de retraite ne dérapent pas, elles sont relativement maîtrisées", Elisabeth Borne a souhaité "dire toute la vérité aux Français" : "Peut-être que les dépenses n'explosent pas, mais les recettes baissent, et c'est normal puisqu'il y a de moins en moins d'actifs pour financer les pensions des retraités." Alors que "dans les années 1970, on avait trois actifs pour un retraité, aujourd'hui on est à 1,7", a-t-elle illustré.

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Pourquoi alors ne pas financer cette réforme par une hausse des cotisations sociales ? "On pense que c'est très important de préserver le pouvoir d'achat, a fortiori dans la période actuelle", a dit la ministre. Concernant une mise à contribution des retraites aisés : "Il y a des mesures qui ont été prises dans le précédent quinquennat, pour que les retraités aisés contribuent aux cotisations sociales des salariés à travers la CSG. On pense qu'il ne faut pas alourdir les cotisations sociales, les impôts", a-t-elle répété. "Cette réforme est à l'équilibre, j'ai été très attentive à la répartition de l'effort", a-t-elle ajouté.

"Un système protecteur" pour les femmes

"Par le passé, les femmes partaient à la retraite plus tard que les hommes. Aujourd'hui, elles partent à peu près au même âge que les hommes. Demain, elles partiront plus tôt que les hommes", a résumé Elisabeth Borne, en montrant un graphique du gouvernement. L'une des mesures prises et qui justifie ce résultat a été de conserver "l'âge d'annulation de la décote" à 67 ans. "En faisant [ce choix], on protège les femmes les plus modestes", car "une femme sur cinq aujourd'hui à qui il manque des trimestres doit travailler jusqu'à 67 ans", a déclaré la Première ministre.

Concernant le montant des retraites, "les femmes ont des pensions en moyenne 30% plus basses que celles des hommes", a-t-elle rappelé. Grâce notamment à la "revalorisation de la retraite minimum", "dans 10 ans, l'écart passera de 30 à 20%", a-t-elle assuré. Si Elisabeth Borne a admis que "six Françaises sur dix devront travailler plus longtemps", puisque c'est l'objet de la réforme, elle a insisté : "Je veux vous assurer que cette réforme protège les femmes qui ont commencé à travailler tôt, qui sont dans des métiers difficiles, qui ont dû interrompre leur carrière".

"Il faut que les pratiques changent en entreprise"

Une deuxième partie importante de l'interview était consacrée à l'emploi des séniors. "Au moment de liquider ses droits à la retraite, près d'un sénior sur deux n'est plus en emploi", a fait remarquer la journaliste Caroline Roux. Elisabeth Borne a évoqué l'index seniors prévu par le projet du gouvernement, à ce stade pour les entreprises de plus de 300 salariés. "Cet index va permettre de mettre en évidence les entreprises qui ont un bon comportement à l'égard des séniors, et celles qui n'ont pas un bon comportement", a-t-elle expliqué.

Est-ce suffisant ? "Je pense qu'on doit aller plus loin", a lâché la Première ministre, ajoutant que "le débat de la semaine prochaine" à l'Assemblée nationale serait "sans doute l'occasion de le faire". Elle est notamment "favorable" à ce que cet index concerne les entreprises dès 50 salariés. Elle propose par ailleurs des "sanctions" pour les entreprises "dont l'index montre qu'elles n'ont pas des bonnes pratiques à l'égard des seniors" et sous réserve que ces sociétés ne mettent pas en place de "plan d'action" pour améliorer les choses.

Concernant "les plans de départ volontaire" ou les "ruptures conventionnelles collectives" souvent mis en œuvre par les grandes entreprises, "je pense qu'il faut que ces pratiques s'arrêtent", a dit Elisabeth Borne. "Et on veillera à ce qu'il ne soit pas plus avantageux pour une entreprise de se séparer d'un sénior avant la retraite plutôt que d'attendre que ce salarié parte à la retraite."

Un "dispositif" pour "identifier les métiers qui génèrent de l'usure professionnelle"

Troisième point largement abordé : la pénibilité de certains métiers. Si l'exécutif n'a pas prévu de réintroduire des critères de pénibilité supprimés comme celui des "charges lourdes", "on créé un dispositif dans lequel on va identifier les métiers qui génèrent de l'usure professionnelle", a expliqué Elisabeth Borne. Pour ces professionnels - parmi lesquels les carreleurs, les déménageurs - une visite médicale sera prévue à 45 ans et "à partir de 60-61 ans, il y aura une visite médicale permettant un départ anticipé à 62 ans. C'est le médecin du travail qui fera ce suivi", a détaillé la Première ministre.

Pas de 49.3 "envisagé"

Interrogée sur un possible recours au 49.3, "je n'envisage pas cette hypothèse", a-t-elle assuré, ajoutant que son "objectif, sur ce texte" était de "trouver le compromis". Alors que les sondages font état d'une opinion majoritairement défavorable à cette réforme, Elisabeth Borne est, elle, défavorable à un référendum sur la question. Elle y préfère le "débat au Parlement", où "on voit ce qui est la position du gouvernement et ce que proposent les autres." " Je cherche le système le plus protecteur ", sans " perdre de vue l'objectif de la réforme ", a-t-elle conclu.

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