Retrait des soldats français du Mali : "Ça nous étreint le coeur", réagit Jean-Marie Bockel
Par Luc Chemla, Yaël Goosz
Après neuf ans d'intervention au Mali, Emmanuel Macron s'apprête à annoncer le retrait des troupes françaises du pays. Un moment douloureux pour l'ancien ministre Jean-Marie Bockel, dont le fils, soldat, est décédé en 2019 au Mali. Malgré un sentiment de gâchis, il dit néanmoins comprendre la décision.
Le président français Emmanuel Macron réunit mercredi soir à Paris plusieurs dirigeants africains et européens. Cette réunion, qui se tient à la veille d'un sommet entre l'Union Européenne et l'Union Africaine à Bruxelles, doit entériner le retrait des troupes françaises et européennes du Mali et un redéploiement régional pour poursuivre la lutte antiterroriste au Sahel.
Une conférence de presse est prévue jeudi matin à l'Elysée, selon la présidence. Un départ rendu inévitable par les relations exécrables avec la junte au pouvoir à Bamako, qui refuse d'organiser des élections avant plusieurs années et fustige la présence militaire occidentale sur son sol.
"Pouvait-on faire autrement ?"
Cela signifierait donc la fin de l'opération "Barkhane" et de neuf années d'intervention militaire dans le pays, en comptant l'opération Serval. Cette nouvelle procure évidemment une émotion particulière chez tous les proches des soldats, notamment ceux qui sont décédés au combat. C'est le cas de l'ancien ministre, Jean-Marie Bockel, dont le fils a été tué en novembre 2019 au Mali, lors d'une collision entre deux hélicoptères qui a fait 13 victimes françaises.
"Je ressens, ainsi que ma famille, une très grande peine", confie l'ancien maire de Mulhouse, contacté par France Inter. "Cela nous étreint le cœur, cela nous fait quelque chose. Notre fils, comme ses camarades sont morts au Mali pour la France mais aussi pour cette partie de l'Afrique que nous connaissons bien et que nous aimons, donc c'est très très dur."
Je pense que le départ est hélas inéluctable
Si Jean-Marie Bockel explique ressentir , "comme parent et citoyen", un "sentiment de gâchis", il l'affirme "évidemment que l'on comprend la position de notre pays. On ne peut pas rester. (...) Pouvait-on faire autrement ?"
De par son passé politique, l'ex-sénateur connaît bien le pays et a participé en 2020 au sommet de Pau, qui a réuni Emmanuel Macron et les dirigeants du G5 Sahel. "Nous étions plein d'espérance sur la possibilité de passer de la situation de présence militaire à une situation de sécurité et de retour de l'Etat, de développement... toutes les conditions étaient réunies pour cela." Il ajoute que suite au coup d'Etat, "le premier président de la transition s'est comporté de manière correcte vis-à-vis du partenaire français puis des partenaires internationaux qui étaient présents". Mais ensuite, la situation "s'est très vite dégradée et en effet, je pense que le départ est hélas inéluctable."
"Il ne faut surtout pas tourner la page du Sahel"
Aujourd'hui, Jean-Marie Bockel dit penser beaucoup "à tous ces soldats français morts ou blessés pour la France mais aussi pour ce morceau d'Afrique si proche de nous." "Notre espérance c'est que cela ne s'arrête pas là, d'une manière ou d'une autre. Il y a toujours de l'espoir mais là nous vivons un moment à la fois de peine, de tristesse mais quand même d'espérance."
Selon l'ancien député du Haut-Rhin, "il ne faut surtout pas tourner la page du Sahel et de cette région, pour notre sécurité, pour l'avenir de cette partie de l'Afrique. Mais simplement, ça sera d'une autre manière."
Depuis 2013, 53 soldats français ont été tués au Sahel, dont 48 soldats au Mali.