Scarlett O'Hara, reine de la procrastination
(Victor Fleming, 1939) tous les Noëls. Cette année, en plus de voir le film, elle a aussi lu le livre (Margaret Mitchell, 1936). Elle partage quelques conseils et réflexions… savoureux.
Pour éviter d’être horriblement déçu(e)(s) par l’adaptation cinématographique d’un livre qu’on a adoré, faites le chemin à l’envers : commencer par le film et, ensuite, lire le livre. Outre la non déception, ce système offre un grand plaisir supplémentaire : une version plus fouillée et plus détaillée - la littérature n’a pas besoin de durer 1h40 max.
Et ainsi on passe plus de temps avec ses personnages chéris.
Résumée en dix secondes, l’histoire d’Autant en emporte le vent donne à peu près ça : "C’est l’histoire d’une fille pendant la guerre de Sécession et les dix années qui suivent, dans l’état de Géorgie. Elle pense qu’elle aime un mec, Ashley Wilkes , mais en fait en aime un autre, Rhett Butler … et quand elle finit par le comprendre, c’est trop tard".
Sauf que synthétiser l’œuvre de Margaret Mitchell comme cela, revient à résumer la Bible par : "C’est l’histoire d'un dieu - ou de dieux car les gens ne sont pas d’accord sur ça - qui fabrique une planète. Et, vu que ses habitants renâclent à faire comme il avait prévu, il leur fait péter des calamités sur le coin de la gueule".
Parce que 1500 pages, ça ne se résume pas si aisément.Autant en emporte le vent , c’est un point de vue passionnant sur cette guerre civile terrible qu’est la guerre de Sécession, sur la fin d’un Sud triomphant… Mais c’est vrai que ce qu’on retient surtout, c’est le portrait de Scarlett O’Hara. “Le portrait d’une emmerdeuse ”, diraient certains.
Certes, mais c’est un peu court. Scarlett O’Hara est une femme qui fait face à beaucoup d’emmerdements : la guerre de Sécession, la fin de sa civilisation, la mort de sa mère (alors qu’elle n’a que 17 ans), la folie de son père (alors qu’elle n’a, toujours, que 17 ans), la misère, la faim et vas-y qu’elle accouche pendant la guerre, seule, la femme enceinte de l’homme dont elle est secrètement éprise alors qu’elle n’y connaît rien en médecine, mais c’est pas grave, elle le fait quand même. Et elle peut ainsi dire cette phrase formidable : "Faites bouillir de l’eau et apportez-moi des linges propres ! "
Si on commence à citer le livre, il y a aussi cette pépite (qui n'est pas dans le film - d’où l’intérêt de lire le livre !) :
J'ai l'impression que les femmes pourraient faire n'importe quoi sans le secours d'un homme... sauf avoir des enfants, et Dieu sait qu'aucune femme saine d'esprit n'aurait d'enfants si elle pouvait faire autrement.
Autre citation notable, en arrivant au terme des 1500 pages : la phrase culte du livre, la presque dernière, au moment où Scarlett dit, alors que Rhett vient de la quitter : "Je penserai à cela demain, à Tara " (ce qui est traduit au cinéma par "Demain est un autre jour ").
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Cette phrase fait de Scarlett la reine de la procrastination . [Procrastination : action de toujours remettre à demain ce qu’on peut faire aujourd’hui. C'est aussi assez joliment et clairement expliqué dans une vidéo ici ]En cela Scarlett est la cousine d’un autre héros de la littérature américain, le Gatsby de Scott Fitzgerald :
Gatsby croyait en la lumière verte, en l'extatique avenir qui d'année en année recule devant nous. Il nous a échappé ! Qu'importe ! Demain nous courrons plus vite, nos bras s'étendront plus loin... Et un beau matin...C'est ainsi que nous avançons, barques luttant contre un courant qui nous rejette sans cesse vers le passé.
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… C’est pas étonnant, cette Amérique sensément symbole du triomphe de l’ambition et qui a parmi ses deux plus grand héros littéraires ces procrastinateurs que sont Scarlett et Gatsby ?
et aussi
►►► LIRE | "Autant en emporte le vent", 1500 pages, trois volumes chez Folio.
►►► ECOUTER | la chronique de Juliette Arnaud dans Si tu écoutes j'annule tout