Selon Amnesty International, Twitter n'en fait pas assez pour protéger les femmes
Par Julien Baldacchino
Dans un rapport rendu public ce mardi, l'ONG accuse Twitter de ne pas faire suffisamment d'efforts pour lutter contre les violences et les abus en ligne faits aux femmes sur ce réseau. Sur dix recommandations transmises il y a deux ans, Amnesty International affirme que Twitter n'en a suivi qu'une seule.
Le réseau social Twitter est-il un lieu sûr pour les femmes ? Pour l'ONG Amnesty International, c'est loin d'être le cas. Dans un rapport publié ce mardi, l'organisation explique que "Twitter n'en fait toujours pas assez pour protéger les femmes contre les violences et les abus en ligne, malgré de multiples promesses". Deux ans après avoir alerté Twitter sur ce problème dans un premier rapport intitulé "Toxic Twitter", Amnesty International a tenté, dans ce nouveau document, de faire le bilan de ce que Twitter a mis en oeuvre, ou pas, pour faire en sorte que les abus soient mieux signalés et pris en charge.
Selon l'association, ces problèmes "sapent le droit des femmes de s'exprimer équitablement, librement et sans craintes". Ces abus sont "intersectionnels", c'est-à-dire que les femmes issues de minorités, les lesbiennes, bisexuelles ou transsexuelles, ou les femmes handicapées, sont victimes de ces violences "de façon disproportionnée".
Dix recommandations il y a deux ans, une seule appliquée
En 2018, Amnesty avait mis en place dix recommandations pour Twitter, regroupées en quatre catégories : la transparence sur ces question, les recours possibles, le traitement de ces recours, et les mesures prises pour le renforcement de la vie privée et de la sécurité. Dans le bilan tracé ce mardi, une seule de ces dix recommandations a été réellement appliquée : la mise en place d'explications plus claires sur le fonctionnement de la procédure de recours et sur la façon dont les décisions sont prises – ce qui permet de faciliter les recours.
Six mesures sont indiquées comme "Work in progress" (processus en cours), comme le développement de plus de fonctionnalités pour collecter des témoignages et des retours tout au long de la procédure de recours, ou encore une plus grande transparence sur le type de pénalités prévues en fonction du niveau de violence et du type de comportement signalés.
Manque de transparence sur les chiffres
Plus problématique : sur trois critères proposés par Amnesty International, Twitter n'a encore rien fait, selon l'ONG. Or ceux-ci seraient importants pour prendre conscience de l'ampleur du phénomène. Selon le rapport, "Twitter ne fournit toujours pas de données ventilées par pays sur les signalements d'abus par les utilisatrices ou sur le nombre d'utilisatrices qui signalent des types spécifiques de propos injurieux", ni sur "le nombre de modérateurs qu'elle emploie et sur le type de couverture déployée dans les différents pays et dans les différentes langues". Un manque de transparence auquel l'ONG, qui ne peut donc pas formuler de chiffres concrets et globaux sur la situation, adresse un carton rouge.
Autre problème majeur : le manque de transparence sur la mise en place de processus automatisés :
"Twitter a révélé qu'elle se sert d'algorithmes pour combattre la désinformation dans le cadre de la pandémie de Covid-19, mais n'a pas affiché le même degré de transparence sur la façon dont les algorithmes sont utilisés pour lutter contre les tweets violents."
Ainsi, si Amnesty International salue certains efforts du réseau social, elle l'appelle à en faire encore plus, d'autant plus que selon elle, "il est tout à fait dans ses cordes de mettre en place ces changements". L'ONG assure que Twitter a reconnu devoir en faire davantage – mais reste réticente à publier des données par pays ou par région, disant que "cela pourrait se prêter à une mauvaise interprétation".