Six idées reçues sur l'endométriose

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Six idées reçues sur l'endométriose

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Endométriose : Non, ce n'est pas normal d'avoir mal au moment des règles
Endométriose : Non, ce n'est pas normal d'avoir mal au moment des règles
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Douleurs insoutenables, malaises, vomissements : la période des règles est parfois synonyme d'enfer. Une femme sur dix est touchée par l'endométriose, une maladie encore trop peu reconnue et qui reste méconnue, d'où quelques idées reçues.

C'est un médecin égyptien qui le premier décrit l'endométriose, en -1855. Quelques siècles plus tard, les disciples d'Hippocrate comprennent qu'il s'agit d'une maladie organique, mais le Moyen-Âge la renvoie au rang des maladies psychiques jusqu'à l'avènement d'une médecine un peu plus scientifique au XIXe.

Cela fait donc un peu plus de 150 ans que la maladie est clairement identifiée : ce n'est pas une maladie psychique mais bien organique. Mais, déplore Erick Petit, "on n'éradique pas si facilement une idée qui a traversé les siècles, y compris au sein du corps médical".

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Erick Petit est radiologue, responsable de l’unité d’imagerie de la femme de l'hôpital St Joseph à Paris, il y a créé le Centre de l’endométriose. Pour parler de ce mal qui handicape la vie de nombreuses femmes et répondre aux questions posées par les auditeurs de la Tête au Carré, Mathieu Vidard a également convié Isabella Chavanaz Lacheray, gynécologue obstétricienne au centre de l'endométriose de la clinique Tivoli à Bordeaux.

L'endométriose, c'est quoi ?

C'est la présence d’endomètre ailleurs que dans la cavité utérine. Voilà pour la définition médicale. Isabella Chanavaz Lacheray explique comment et pourquoi cet endomètre se retrouve là ou il ne devrait pas être :

L'utérus est composé de deux parties : un muscle qui s’appelle le myomètre et une muqueuse que l'on appelle l'endomètre. Cette muqueuse, tous les mois s'épaissit pour devenir bien douillette afin d'accueillir un embryon s'il y a une grossesse. S'il n'y pas de grossesse, la muqueuse doit être évacuée : c'est pour ça qu'une femme a ses règles. Les règles sont un mélange de sang et d'endomètre.

"L'essentiel de ces règles est évacué par les voies naturelles", poursuit la gynécologue, "mais il y en a toujours une partie qui au lieu de sortir par le vagin coule aussi par l'intermédiaire des trompes et se déverse dans le bas ventre". Dans les jours qui suivent la fin des règles, un "ménage" se fait. Or chez une femme sur dix, une partie des cellules d'endomètre vont rester et s'accrocher. C'est comme ça que l'on se retrouve avec de l'endomètre ailleurs que dans la cavité utérine.

Ces lésions, qui vont se développer avec le temps, vont d’abord provoquer des règles douloureuses, mais en fonction de l'endroit ou l'endomètre s'est accumulé, d'autres symptômes et d'autres douleurs apparaîtront :

  • Au dessus du vagin = douleurs pendant les rapports sexuels, au fond
  • Sur le tube digestif = troubles digestifs tels que diarrhée et constipation

… et ainsi de suite, donnant des douleurs différentes en fonction de chaque femme et en fonction de chaque emplacement.

Info ou intox ?

  • C'est normal d'avoir mal

C'est sans doute ce que les femmes entendent le plus : "Vous avez vos règles, vous êtes une femme, c'est normal d'avoir mal". 

"Et bien non, ce n'est pas normal d'avoir mal" confirme Erick Petit. "Le sous diagnostic est permanent. Il y a encore un retard de diagnostic moyen de 7 à 9 ans, ce qui est considérable."

Le problème, c'est qu'on n'écoute pas la souffrance féminine.

"Beaucoup de jeunes femmes ne considèrent pas que c'est anormal d'avoir mal au ventre pendant les règles", ajoute Isabella Chanavaz Lacheray, "et même si elles consultent, dans un certain nombre de cas, on va leur dire que c'est normal. Par conséquent, lorsque de nouvelles douleurs vont survenir, comme celles qui apparaissent lors des premiers rapports, par exemple, soit elles ne vont pas en parler parce qu'elles ne vont pas avoir l'impression que c'est anormal, soit elles ne seront pas entendues à nouveau et ça retarde le diagnostic."

  • La grossesse guérit l'endométriose

Non, mais la grossesse permet de souffler pendant quelques mois

"Le premier traitement de l'endométriose", rappelle la gynécologue, "c'est la suppression des règles. Pendant la période de la grossesse, la patiente est soulagée parce qu'elle n'a pas ses règles. Ce qui ralentit l’évolution de la maladie. Voilà pourquoi on a longtemps cru que la grossesse guérissait l'endométriose. C'est faux, elle la met juste en sommeil".

  • On ne voit rien donc il n'y a rien

"Pas toujours. Il arrive", explique Isabella Chanavaz Lacheray, "que les échographies soient faites à un stade où la maladie est encore trop petite pour être vue ou bien ne soient pas faites par des radiologues qui ont l'habitude de cette maladie. Le "on ne voit rien" devient "il n'y a rien". Ce qui n'est pas vrai. On peut très bien avoir une échographie, éventuellement une IRM normale et avoir cette maladie au stade "superficiel" de l'endométriose mais qui fait extrêmement mal.

Ce n'est que lorsque l'endométriose commence à infiltrer les organes qu'elle se voit en imagerie. Parfois cela représente plusieurs années de souffrance pour rien."

  • L'utilisation de tampon favorise l'endométriose

Non. Comme le précise Isabella Chanavaz Lacheray, le reflux et l'écoulement des règles dans le ventre par l'intermédiaire des trompes est naturel. Ce n'est pas lié aux tampons, ni aux cups.

  • L'endométriose entraîne une stérilité

C'est un non catégorique et conjoint d'Erick Petit et Isabella Chanavaz Lacheray, qui précise : C'est un facteur de risque d'infertilité d'avoir de l'endométriose, mais au même titre que d'autres facteurs tels que le tabac, par exemple. Beaucoup de femmes qui ont de l'endométriose ne sont absolument pas infertiles. Ce n'est pas une condamnation.

En revanche, ajoute le radiologue, "en cas d'endométriose, il ne faut pas attendre quand il y a un désir d'enfant".

  • L'endométriose ne se guérit pas

C'est vrai, l'objectif c'est avant tout de soulager la douleur.

"Au-delà des médicaments, des traitements hormonaux et de la chirurgie", ajoute Erick Petit, "il y a de nombreuses techniques parallèles qui permettent de soulager la douleur : le sport, l'ostéopathie, l'acupuncture, l'hypnose. Il y a tout un arsenal thérapeutique qu'il ne faut pas sous-estimer".

Aller plus loin

LIRE | Tout sur l'endométriose: soulager la douleur, soigner la maladie par Delphine Lhuillery, Eric Sauvanet et Erick Petitet (Odile Jacob)

LIRE | Les idées reçues sur l'endométriose (Editions Le Cavalier Bleu)

VOIR | EndoFrance - Le site de l'Association française de lutte contre l'endométriose

VOIR | Resendo - Le site du Réseau Ville Hôpital Endométriose