
Le maître d'œuvre du putsch au Soudan, le général Abdel Fattah al-Burhan, s'est exprimé pour la première fois aujourd'hui à Khartoum. Il a dit avoir pris le pouvoir pour éviter une guerre civile dans son pays. Un conflit qui, selon lui, aurait été préparé par le Premier ministre et des partisans.
Le général Abdel Fattah al-Burhan ne se considère pas comme un putschiste. Si l'armée a pris le pouvoir, a-t-il expliqué lors d'une conférence de presse à Khartoum, c'est pour "rectifier la trajectoire de la transition politique" démarrée il y a deux ans après le renversement par la rue du régime d'Omar al-Béchir. "On a discuté avec le Premier ministre de la nécessité de construire une solution ensemble", a-t-il fait savoir. "Mais, on n’a pas pu arriver à un accord. Les forces politiques ont refusé. La situation est arrivée à une impasse."
Pour les forces armées, il est alors devenu clair qu’elles ne pouvaient plus se taire. Donc on a pris cette décision. Nous voulons continuer à réaliser la volonté du peuple pour construire un Etat de liberté, de paix et de justice.
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Le Premier ministre en "bonne santé"
Quant au Premier ministre Abdallah Hamdok, arrêté et démis de ses fonctions, il se trouverait assigné à résidence dans la maison même du général Abdel Fattah al-Buhran_. "Il est en bonne santé et rentrera chez lui quand la crise sera terminée",_ a certifié ce dernier. Évidemment sans préciser la durée de la mise à l'écart du chef du gouvernement.
Le général Abdel Fattah al-Burhan a pris tout le monde par surprise, à commencer par les États-Unis, dont l'envoyé spécial pour la Corne de l'Afrique discutait encore avec lui dimanche dernier la transition démocratique, quelques heures avant le passage à l’action.

Le Soudan entre dans une zone de turbulence
Résultat : Washington a décidé de suspendre une aide de 700 millions de dollars au Soudan, pays-clé dans la région, notamment avec sa façade sur la mer rouge qui offre des facilités portuaires pour les grandes puissances et les pays régionaux. Khartoum a aussi récemment normalisé ses relations avec Israël. Le général al-Burhan a pris soin de préciser qu'il entendait respecter tous ses engagements internationaux.
En tout cas, le Soudan entre dans une zone de turbulence et d'instabilité politique. Avec le risque d'affrontements internes entre civils et militaires. Trois ambassadeurs soudanais ont annoncé leur défection, condamnant le coup militaire. Les ambassadeurs en France, en Belgique et en Suisse ont proclamé leurs représentations diplomatiques respectives comme celles du "peuple soudanais".
Dans Khartoum, comme aux plus belles heures de la révolution, la rue appelle à la désobéissance civile. Les magasins, sauf les commerces alimentaires, ont baissé leurs rideaux en signe de protestation.