Turquie : la tentative de putsch "mise en échec", plus de 260 morts

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Turquie : la tentative de putsch "mise en échec", plus de 260 morts

Le camp du président turc Recep Tayyip Erdogan affirme avoir repris le contrôle du pays samedi matin, après une tentative de putsch sanglante de militaires rebelles vendredi soir.

Les forces loyales au président Recep Tayyip Erdogan affirment avoir repris le contrôle d'Istanbul et de la capitale Ankara, selon l'agence pro-gouvernementale Anadolu. Un groupe de militaires putschistes avait déclaré avoir pris le pouvoir en Turquie vendredi soir.

"Cette tentative de coup a été mise en échec", a déclaré le général Ümit Dündar, chef de l'armée turque par intérim et soutien du président turc Recep Tayyip Erdogan. Il affirme que 104 putschistes ont été abattus. Le Premier ministre turc, Binali Yildirim, a lui déclaré que 161 personnes sont mortes dans les violences, en plus des putschistesPlus de 1400 personnes auraient par ailleurs été blessées dans les affrontements. Des avions de chasse et chars ont fait feu dans la nuit, donnant lieu à des scènes de violences inédites à Ankara et Istanbul depuis des décennies.

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Tentative de coup d'Etat par l'armée en Turquie, vendredi 15 juillet
Tentative de coup d'Etat par l'armée en Turquie, vendredi 15 juillet
- Visactu

Des combats sanglants à Istanbul et Ankara dans la nuit

Dans la soirée de vendredi, des avions et des hélicoptères militaires ont grondé dans le ciel d'Ankara et que des militaires ont coupé les ponts sur le Bosphore reliant les rives européenne et asiatique d'Istanbul. Le siège du parlement à Ankara a été pris pour cible par des chars. De la fumée s'élevait à proximité. Un élu de l'opposition a déclaré que le parlement avait été touché à trois reprises et qu'il y avait des blessés.

Peu avant minuit, un communiqué des "forces armées turques" annoncent la proclamation de la loi martiale et d'un couvre-feu dans tout le pays, après des déploiements de troupes notamment à Istanbul et dans la capitale Ankara. Les putschistes ont justifié leur "prise de pouvoir totale" par la nécessité d'"assurer et restaurer l'ordre constitutionnel, la démocratie, les droits de l'Homme et les libertés et laisser la loi suprême du pays prévaloir".

Le président turc Recep Tayyip Erdogan, cible ces dernières années de nombreuses critiques l'accusant de dérive autoritaire, était en vacances à Marmaris, dans l'Ouest du pays. Il a appelé la population à s'opposer au putsch, dans une intervention en direct à la télévision depuis un téléphone portable. La dynamique semble s'être inversée au cours de la nuit au profit du pouvoir en place lorsque des milliers de partisans sont descendus dans les rues à l'appel du président turc.

Le président turc accueilli par la foule à l'aéroport

Recept Tayyip Erdogan a aterri à l'aéroport d'Istanbul tôt samedi matin, dénonçant une "trahison" devant une foule compacte de sympathisants. Et de féliciter les Turcs pour être descendus "par millions" dans les rues, notamment sur l'emblématique place Taksim à Istanbul, noire de manifestants conspuant les putschistes. La présidence turque a exhorté les Turcs sur Twitter à rester dans les rues, mettant en garde contre une "nouvelle flambée".

De nombreux hauts responsables militaires s'étaient désolidarisés publiquement dans la nuit des putschistes, dénonçant "un acte illégal" et appelant les rebelles regagner leurs casernes. Plus de 2800 militaires ont été arrêtés suite à la tentative de putsch, selon le Premier ministre turc.

Huit hommes aterrissent en Grèce et demandent l'asile politique

Le ministère grec de l'Intérieur a annoncé avoir arrêté samedi huit hommes à bord d'un hélicoptère de l'armée turque qui a atterri en milieu de journée au nord de la Grèce. Ces hommes ont aussitôt demandé l'asile politique, a précisé le ministère de l'Intérieur. Peu après cette annonce, le ministre turc des Affaires étrangères a fait savoir via Twitter qu'il avait demandé à Athènes de les remettre aux autorités turques. Selon la chaîne de télévision publique grecque ERT, les hommes arrêtés ont pris part à la tentative de coup d'Etat.

Le président turc a accusé les putschistes d'être liés à son ennemi juré l'imam Fethullah Gülen, un ancien allié exilé depuis des années aux États-Unis. "Je réfute catégoriquement ces accusations", a rétorqué ce dernier dans un communiqué. "J'ai souffert de plusieurs coups d'État militaires au cours des 50 dernières années et trouve donc particulièrement insultant d'être accusé d'avoir un quelconque lien avec cette tentative".

La communauté internationale inquiète

Les condamnations internationales se sont multipliées contre la tentative de putsch. Le président américain Barack Obama a appelé à soutenir le gouvernement turc "démocratiquement élu", et l'Union européenne a demandé un "retour rapide à l'ordre constitutionnel" assurant "soutenir totalement le gouvernement démocratiquement élu, les institutions du pays et l'État de droit"Des inquiétudes qui se sont vite tournées vers la crainte d'une forte répression par le pouvoir de Recep Tayyip Erdogan à l'encontre des putschistes. La chancelière allemande Angela Merkel a demandé au président turc de traiter les putschistes en conformité avec "l'Etat de droit".

En Allemagne, plusieurs milliers de personnes de la communauté turque ont manifesté dans le calme dans la nuit de vendredi à samedi dans plusieurs villes du pays. A Essen, quelque 5.000 personnes se sont rassemblées devant le consulat général de Turquie tandis qu'à Berlin environ 2.000 manifestants se sont regroupés devant l'ambassade.

Depuis l'arrivée au pouvoir de Recep Tayyip Erdogan en 2003, la hiérarchie militaire a été purgée à plusieurs reprises. L'armée de ce pays clé de l'Otan, qui compte 80 millions d'habitants, a déjà mené trois coups d'Etat, le dernier en 1980. Elle a aussi forcé un gouvernement d'inspiration islamiste à quitter sans effusion de sang le pouvoir en 1997.