A l'occasion des 110 ans du naufrage du paquebot, la nuit du 14 au 15 avril 1912, les documentalistes de Météo France ont revisité les données atmosphériques et océaniques de l'époque. Un phénomène optique pourrait expliquer le drame au cours duquel 1 500 passagers sur 2200 ont péri.
Chaque année, Météo France puise dans ses archives pour revisiter à l'aune des critères météorologiques des événements phares du passé. Avant de se pencher cette année sur le voyage de Christophe Collomb vers l'Amérique, les documentalistes ont souhaité reprendre l'enquête du naufrage du Titanic.
Selon les commissions d'enquête britannique et américaine, trois causes principales expliquent cet événement tragique : une trop grande vitesse malgré la présence signalée d'icebergs, une veille défaillante à la passerelle du navire et une désorganisation de l'évacuation des passagers. Ont aussi été évoqués des défauts de conception du navire et un feu qui couvait dans une soute à charbon et qui aurait fragilisé la coque du navire.
Ni brouillard, ni vent, ni courants
La météorologie de la nuit du drame a été largement étudiée. Et ce sont les paramètres atmosphériques et physiques que les prévisionnistes documentalistes de Météo France ont repris. Tous les experts s'accordent sur l'hiver anormalement doux de 1912. "Dans nos cartes météorologiques de l'époque, nous voyons que le Titanic est au centre d'un vaste anticyclone. Il fait très beau, il n'y a pas de vent, pas de nuages, le temps est parfait", détaille Marie-Hélène Pépin, cheffe du département documentation à Météo France. Ces températures clémentes ont conduit à repousser vers le sud la limite des glaces au printemps 1912. Provenant des glaciers de Groenland et de la Terre de Baffin, les icebergs se sont retrouvés plus tôt dans l'année sur la route empruntée par le paquebot. Les secours dépêchés sur place ont comptabilisé 25 icebergs, de plus de 60m de haut au moins, dans la zone.
Le brouillard a aussi un temps été envisagé comme cause d'une collision inévitable. Car, les eaux chaudes du Gulf Stream en s'évaporant, se condensent avec l'air très froid de l'arctique. Mais cette nuit là, il n'y avait ni brume ni brouillard. Alors que s'est-il passé ? La piste que privilégie Météo France est celle de phénomènes optiques.
La piste du mirage
Les mirages pourraient expliquer que la vigie n'ait pas vu l'iceberg, situé 500m devant lui, même depuis la passerelle situé à 23m en surplomb de la mer. Ces mirages, toujours dus à la réfraction de la lumière, sont différents sur mer et sur terre et suivant la température de surface. Les plus connus, sur une route très chaude, sont dits mirages inférieurs et conduisent à "voir" sur le sol un morceau du ciel ou un objet en miroir. "En région polaire, la surface de la mer est très froide mais l'air au dessus plus chaud. Cela génère un mirage supérieur, c'est à dire que l'on voit l'objet au dessus de l'horizon. Un bateau, la mer se retrouvent en hauteur", explique Xavier Popineau, bibliothécaire et auteur du dossier réalisé par Météo France, disponible sur son site internet.
Ces phénomènes optiques, appelés Fata Morgana et Fata Bromosa sont typiques des régions polaires. Les distorsions optiques conduisent à une inversion et une élévation des images. Le Fata Bromosa conduit à ce que l'observateur ait l'impression qu'une épaisse couche de brouillard surplombe la mer, créant un faux horizon au dessus de l'horizon réel. "Ce n'est pas une brume, ce n'est pas le brouillard, c'est un mirage de brume", ajoute Xavier Popineau. Un mirage qui aurait rendu invisible l'iceberg, caché derrière.
C'est la piste privilégiée. Elle aurait conduit au choc entre le navire et l'iceberg car à 41 km/h, la vitesse du Titanic était trop importante pour qu'il puisse dévier suffisamment sa route en 500m. Voilà pourquoi la rencontre avec ce monstre de glace dont le volume immergé peut atteindre 9 fois la partie émergée a été fatale au paquebot.
Dossier à retrouver sur le site de Météo France ici.