Une association et trente familles portent plainte contre Lactalis
Par Nasser Madji, Laetitia Cherel
L'association Foodwatch dépose une plainte contre X ce mercredi au pôle santé publique du parquet de Paris. Depuis le 22 décembre, le parquet mène une enquête préliminaire pour "blessures involontaires" et "mise en danger de la vie d'autrui" après la crise de la salmonellose. Parallèlement, 30 familles portent plainte
En France, 37 bébés ont été touchés par l'épidémie de salmonellose depuis 2017. En Espagne, deux cas ont également été détectés.
Une précédente épidémie, toujours liée à la présence de la même bactérie à l'usine de Craon (Mayenne), avait affecté 146 nourrissons en France en 2005. L'Institut Pasteur a révélé de son coté le 1er février dernier que 25 autres bébés ont été contaminés au cours de la période 2006-2017 par la même souche bactérienne à l'origine de deux épidémies de 2005 et 2017. Soit au total au moins 200 bébés contaminés.
Plainte contre plusieurs acteurs
L'association de défense des consommateurs Foodwatch porte plainte contre X au pénal concerne une douzaine d'infractions comme "mise en danger de la vie d'autrui", "tromperie aggravée" ou "manquement aux obligations légales de sécurité". L'association a été rejointe dans son action par plusieurs parents dont les enfants ont consommé des laits infantiles Lactalis.
Elle vise à la fois Lactalis bien sûr, mais aussi la grande distribution qui a continué de vendre des produits pourtant rappelés, le laboratoire qui a controlé les lieux à l'été 2017 et constaté la présence de salmonelle mais a tardé à communiquer et enfin les pouvoirs publics.
Selon Ingrid Kragl directrice de l'information de Foodwatch (au micro de Nasser Madji) :
Depuis cette affaire, tous les responsables se "refilent le bébé" et cette histoire est teintée d'opacité
Selon Foodwatch, 86 pays sont concernés par cette affaire et l'on ignore comment cette crise a été gérée par les autres pays, notamment des pays pauvres.
30 familles montent au créneau
De son coté, France Inter révèle ce mercredi que l**'Association des familles victimes du lait contaminé aux salmonelles déposera elle aussi 30 nouvelles plaintes** individuelles de familles, à l’encontre de Lactalis et de plusieurs grands groupe de distribution qui avaient vendu des produits retirés du marché. Elles sont déposées pour mise en danger de la vie d'autrui et blessures involontaires contre Lactalis et mise en danger de la vie d'autrui, pour certaines d'entre elles, contre des grandes enseignes de la distribution
Selon Maître Jade Dousselin, avocate de l'association :
Les faits dénoncés sont de nature à aggraver encore la responsabilité de la société Lactalis. J'espère que ces plaintes et celles qui suivront permettront de mettre au jour d’autres responsabilités et notamment celle des grands distributeurs
L'association attend toujours la désignation rapide d’un juge d’instruction :
Les victimes doivent avoir accès à la procédure en cours et devenir de vrais acteurs dans ce dossier
Ces plaintes s'ajoutent aux 15 premières plaintes déposées dans le cadre de l'enquête préliminaire ouverte par le Procureur de la République de Paris.
Une gestion jugée "catastrophique"
Emmanuel Besnier, le PDG de Lactalis, a adressé ses excuses aux familles des victimes, dans une lettre ouverte sur le site de l'industriel, deux mois après le début du scandale qui devrait coûter "plusieurs centaines de millions d'euros" au groupe, selon lui. Les chaînes de produits infantiles à Craon en Mayenne sont à l'arrêt, et tout ce qui était sorti du site depuis 2017 a été rappelé.
L'industriel a annoncé vouloir "fermer définitivement" la tour de séchage numéro 1 du site de Craon, empoisonnée par les salmonelles. Les bactéries sont en effet restées "confinées dans les infrastructures" du bâtiment pendant douze ans, depuis le premier incident en 2005.
Selon Foodwatch, la gestion de la crise a été "catastrophique".
Si tout le monde avait fait ce qu'il devait faire, on aurait évité ce scandale puisque la souche de 2017 est la même que celle de 2005.
Foodwatch réclame la création d'une agence indépendante qui gèrerait les scandales de ce type.
L'Assemblée nationale doit voter ce mercredi la résolution qui va entériner la mise en place d'une enquête parlementaire.
Au Sénat, les acteurs de la grande distribution seront entendus ce mercredi matin par la Commission des affaires économiques et sociales.