Violences gynécologiques : le collège de la profession veut limiter les examens pelviens injustifiés

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Violences gynécologiques : le collège de la profession veut limiter les examens pelviens injustifiés

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Alors que de nombreuses femmes dénoncent les violences gynécologiques, les médecins souhaitent éviter de systématiser les examens pelviens.
Alors que de nombreuses femmes dénoncent les violences gynécologiques, les médecins souhaitent éviter de systématiser les examens pelviens.
© AFP - Anne-Christine POUJOULAT

Les sociétés savantes de gynécologie et obstétrique recommandent d’éviter le recours aux examens pelviens quand ils ne sont pas pertinents. La profession entend rétablir la confiance avec les patientes, alors que plusieurs praticiens sont accusés de violences dans le cadre de leur activité.

C’est la première fois que les choses sont formalisées de cette façon. Réuni à Lille depuis mercredi pour son congrès annuel, le Collège national des gynécologues et obstétriciens français (CNGOF) vient de produire un document pour fournir aux professionnels des recommandations officielles sur la pratique clinique de l’examen pelvien. Cet examen, parfois inutile, ne doit pas être systématique, selon le CNGOF, qui entend ainsi répondre aux inquiétudes soulevées par de nombreuses femmes sur les violences gynécologiques, via des hashtags comme #PayeTonUtérus ou #PayeTonGynéco.

Diminuer la fréquence des examens intrusifs

Près de 40 situations ont été analysées pour savoir si, à chaque fois, l’examen des organes pelviens (utérus, vagin, rectum) par le toucher sont nécessaires ou non. L’examen pelvien, quand il est mené, consiste souvent à insérer un spéculum et pratiquer un toucher digital vaginal ou rectal. Des examens qui “peuvent être vécus comme intrusifs”, note auprès de France Inter le professeur Xavier Deffieux, gynécologue-obstétricien à Clamart.

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Incontinence urinaire, pilule, pose de stérilet ou encore dépistage du cancer de l'ovaire : autant de situations qui ont donc été analysées. Par exemple, chez une femme enceinte sans symptômes et sans antécédent d'accouchement prématuré, la mesure systématique de la longueur cervicale par échographie endovaginale n'est pas recommandée. Idem pour “la mise en place d’une contraception hormonale type pilule”, explique le gynécologue.

En cas de douleur au deuxième ou au troisième trimestre de grossesse, autant le toucher vaginal que l’insertion de spéculum seront recommandés pour mieux diagnostiquer et garder de meilleures chances d'éviter un accouchement prématuré. Ils ne le seront pas pour une simple consultation post-natale. Chez une femme non enceinte, l’examen pelvien sera recommandé en cas de pose de stérilet ou de dépistage de cancer du col de l’utérus, mais pas en cas de pose de diaphragme.

Rassurer les femmes qui évitent des consultations

Anxiété, inconfort, douleurs, gêne, honte : autant de sentiments qui peuvent amener certaines personnes à déserter les cabinets des gynécologues. “Si les femmes sont rassurées sur le fait qu’on ne leur proposera un examen que si c’est vraiment nécessaire, elles viendront plus facilement, et du coup elles pourront profiter du dépistage du cancer du col [de l’utérus], par exemple, pour le prendre en charge si c’est dépisté très tôt”, insiste auprès de France Inter le professeur Xavier Deffieux.

Un peu plus d'un an après l'affaire Emile Daraï, ce gynécologue poursuivi pour viol par plusieurs de ses patientes, la parole des femmes s'est libérée sur les violences gynécologiques. Les professionnels espèrent maintenant rétablir un climat de confiance. “Ca n’a échappé à personne que les femmes en général se posent des questions sur la nécessité de l’examen pelvien. Nous, on a voulu retourner dans la littérature [scientifique]  pour voir s’il y avait vraiment des preuves [de nécessité ou non] pour chacun des examens réalisés”, explique le Pr. Xavier Deffieux.

Le médecin rappelle que ces recommandations doivent pouvoir être adaptées individuellement et à chaque situation.  "Même si un examen pelvien est recommandé, il n'est que proposé à la femme, qui l'accepte ou non", insiste Xavier Deffieux. Le CNGOF souhaite néanmoins éviter de parler de viols. “Un examen gynécologique peut être mal ressenti, peut manquer de bienveillance, mais il ne peut pas être assimilé à un viol, faute de quoi les gynécologues - déjà trop peu nombreux dans les salles de naissance - deviendront encore de plus en plus rares, tant la profession ressent mal cette assimilation", écrit le collège.