A Bondy, la Maîtrise de Radio France fête ses 10 ans

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A Bondy, la Maîtrise de Radio France fête ses 10 ans

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Morgan Jourdain, chef de choeur assistant, fait travailler les élèves de la Maîtrise de Radio France issus des sites de Bondy et de Paris
Morgan Jourdain, chef de choeur assistant, fait travailler les élèves de la Maîtrise de Radio France issus des sites de Bondy et de Paris
© Radio France - Christophe Abramowitz

Installé à Bondy en Seine-Saint-Denis il y a 10 ans, le second site de la Maîtrise de Radio France avait pour but de faire connaître la musique et le chant choral à des enfants issus de milieux éloignés de la culture. L'objectif est rempli puisque 187 enfants de Bondy ont pu en bénéficier.

Une quarantaine d'enfants est sagement assise dans l'auditorium Angèle et Roger Tribouilloy de Bondy (93). Sous la direction de leur chef de chœur Morgan Jourdain, ils travaillent une pièce de Pablo Casals qui sera jouée ce mardi 5 décembre lors d'un concert qui marquera le début des festivités du 10e anniversaire du site de la Maîtrise de Radio France à Bondy. Les enfants sont âgés de 11 et 12 ans mais ne sont pas scolarisés au même endroit. C'est en effet l'une des particularités de ce chœur d'enfants qui est à cheval sur deux villes, le XVIe arrondissement de Paris et Bondy en Seine-Saint-Denis.

Premier concert de la Maîtrise de Radio France pour célébrer les 10 ans de l'ouverture du site de Bondy. Mardi 5 décembre, 19h, à l'auditorium Angèle et Roger Tribouilloy. Oeuvres de Casals, Canteloube, Pierné, Roesenthal et Alboulker. Direction, Morgan Jourdain. Entrée libre. Concert diffusé ultérieurement sur France Musique.

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Invitée de la matinale de France Musique ce mardi 5 décembre, Sofi Jeannin, directrice musicale de la Maîtrise, souligne que le choix de ce morceau de Pablo Casals est un hommage à Toni Ramon. Décédé en 2007 à l'âge de 41, le chef de chœur espagnol fut directeur de la Maîtrise et c'est lui qui avait décidé d'ouvrir un second site en Seine-Saint-Denis. Il n'aura malheureusement pas eu le temps d'observer sa mise en oeuvre. Son idée était à la fois sociale et musicale. Il souhaitait donner la chance à des enfants issus de milieux a priori éloignés de la musique la possibilité de pratiquer dans un cadre d'excellence. Il était également question de pouvoir rajeunir la Maîtrise en recrutant les enfants dès la classe de CE1, afin de pouvoir élargir les possibilités de répertoire.

C'est à l'école Olympe de Gouges de Bondy qu'est installée la Maîtrise, un établissement dirigé par Sandrine Palagonia, classé en réseau d'éducation prioritaire. La directrice était enseignante, il y a 10 ans, lorsque le site a ouvert et a pu noter les effets bénéfiques de cet apprentissage chez les enfants. « On sent qu'ils sont contents d'être à la Maîtrise, d'apprendre quelque chose de nouveau, de faire partie d'un projet fort. Nous avons aussi remarqué des effets sur l'implication des parents, ils s’investissent davantage dans la scolarité de leurs enfants. Ils ne viennent pas uniquement à l’école parce qu’ils sont convoqués dans le cadre des situations compliquées. Ils assistent aux concerts, aux répétitions et on sait bien à quel point le rôle des parents est très important en matière de réussite scolaire ».

A Bondy, une soixantaine d'enfants de l'école élémentaire Olympe de Gouges est à la Maîtrise de Radio France
A Bondy, une soixantaine d'enfants de l'école élémentaire Olympe de Gouges est à la Maîtrise de Radio France
© Radio France - Christophe Abramowitz

Le fonctionnement du site de Bondy diffère de celui de Paris. A la fin du CP, tous les enfants scolarisés dans les 6 écoles du réseau d’éducation prioritaire sont auditionnés par l’équipe pédagogique de la Maîtrise. Si un talent particulier pour le chant et détecté, et en accord avec les parents, l’enfant sera alors scolarisé à l’école Olympe de Gouges dès le CE1. A Paris, il s’agit d’un concours national qui permet d’intégrer le chœur dès le CM1. Actuellement, une soixantaine d’enfants est inscrite à la Maîtrise sur les 290 enfants que compte l’établissement.

En CE1 et CE2, les enfants pratiquent la musique à raison de 8 heures par semaine et, dès le CM1, ils découpent leur journée avec école le matin et musique l’après-midi. Un système qui peut générer des craintes sur la réussite scolaire des maîtrisiens en ce sens qu’ils ont mathématiquement moins d’heures de cours que leurs camarades. Heureusement, le classement de l’école en réseau d’éducation prioritaire permet de bénéficier d’un accompagnement pédagogique spécifique. Les encadrants aident les enfants à mieux s’organiser, à gérer l’importante masse de travail et à améliorer leur concentration.

Le système semble fonctionner à la perfection pour Coralie, élève en classe de 5e et inscrite à la Maîtrise depuis 6 ans. « J’aime pouvoir apprendre de nombreuses matière différentes, la formation musicale, le piano, le chant, le chœur, le déchiffrage et la culture musicale. Je trouve cela très riche ». Coralie avoue modestement être une excellente élève et sent que le cadre de la Maîtrise l’aide à mieux s’organiser à tous les niveaux. « J’espère pouvoir continuer la Maîtrise le plus longtemps possible et devenir plus tard professeur de chant. Je trouve cela important de pouvoir partager la musique avec d’autres gens », estime Coralie.

Ecole le matin, musique l'après-midi, les élèves de la Maîtrise reçoivent des cours de piano, de chant, de formation musicale ou de déchiffrage
Ecole le matin, musique l'après-midi, les élèves de la Maîtrise reçoivent des cours de piano, de chant, de formation musicale ou de déchiffrage
© Radio France - Christophe Abramowitz

Cet effet bénéfique de la Maîtrise sur la scolarité des enfants, Sylvie Kolb, déléguée pédagogique du chœur au collège Pierre Brossolette de Bondy, (établissement qui prend la suite de l’école Olympe de Gouges) le constate au quotidien. Grâce au lien permanent qu’elle entretient avec les professeurs des maîtrisiens, elle a constaté que le dispositif tirait tout l’établissement vers le haut.

Son rôle est avant tout de surveiller que les enfants arrivent à suivre le rythme assez soutenu qu’impose la maîtrise. « Ils ont des longues journées pour leur âge. Collège de 8h à 13h, puis musique de 14h à 18h avec parfois un concert le soir. Il faut vraiment veiller à ce que soit supportable pour eux. Mais les retours que nous font les parents sont très positifs. Tous disent que leur enfant a gagné en autonomie. J’ai également de nombreux retours des autres professeurs du collège qui remarquent que les enfants savent mieux s’organiser, ne font pas les devoirs qu’on leur demande au dernier moment ». Sylvie Kolb évoque leur capacité de concentration qui est accrue ainsi que l’esprit d’entraide qui se développe dans cette seconde famille qu’est la maîtrise : « Nos partenaires de l’éducation nationale nous le disent tous les jours, la maîtrise rayonne sur l’ensemble de la classe et sur l’établissement en entier ».

Arrivé à la Maîtrise de Radio France lors de sa création en 2007, Morgan Jourdain se félicite tous les jours de la réussite du projet. Le chef de chœur assistant estime que le pari est gagné puisque désormais « la question ne se pose plus de savoir ce qu’est la maîtrise, de connaître le répertoire, etc. Nous n’avons plus à convaincre nos interlocuteurs. Désormais, ce sont les enfants qui viennent à nous ».

Pari gagné pour la Maîtrise de Radio France dans sa volonté de s’ouvrir au plus grand nombre. A la fin, c’est évidemment la qualité musicale qui l’emporte tout en agissant positivement sur un tissu social isolé. Un des indicateurs qui permet de l'affirmer se reflète dans l’accroissement de petites sœurs et petits frères de maîtrisiens qui sont, eux aussi, intégrés. Et s’il est encore un peu tôt pour avoir des retours sur le nombre d'entre eux qui poursuivent la Maîtrise jusqu'au lycée à Paris, tous les élèves de 3e scolarisés à Bondy se sont inscrits au conservatoire.