C’est quoi, le scat ?

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C’est quoi, le scat ?

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Le scat est né avec le jazz, au début du XXe siècle.
Le scat est né avec le jazz, au début du XXe siècle.
© Getty

Qui n’a pas déjà laissé échapper un petit Wap Wap A Doo Wa ou Bi Bi Dou Wa, comme ça, pour le plaisir ? Si vous pensez que cela n’a aucun sens, détrompez-vous…

Ces petites formules musicales sont en fait un héritage du jazz et de l’une de ses techniques vocales les plus complexes, le scat.

Everybody wants to be a (s)cat

Qu’est-ce que c’est, le scat ? Tout simplement l’art de chanter sans parole. Et il n’y a pas que les chats de gouttière d’un célèbre dessin animé qui en maîtrisent la technique, mais aussi Louis Armstrong, Cab Calloway, Ella Fitzgerald, Sarah Vaughan, Melody Gardot… bref, les plus grands noms du jazz.

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En quoi le scat est-il différent de tous les la la la et da be di da be da que nous entonnons lorsque nous ne ne connaissons pas les paroles d’une chanson ? Parce qu’il est improvisé et que, par conséquent, il requiert de l’anticipation, du travail, du feeling, du swing... Scater n’est pas chanter de manière passive.

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Mais qui a bien pu avoir cette idée ?

Nous sommes en 1926 et Louis Armstrong enregistre une version de Heebie Jeebies. C’est alors que lui échappe le petit papier sur lequel sont écrites les paroles de la chanson… le maître se lance alors dans un génial exercice d’improvisation vocale, le tout sur de simples syllabes. Et c’est ainsi que ses Dip Dop Doo entrent dans l'histoire du scat.

L’anecdote est avérée, puisque gravée dans la gomme d’un 78 tours, mais elle est malheureusement contredite par des enregistrements plus anciens, ceux de Don Redman et Cliff Edwards notamment.

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En fait la naissance, tout comme le développement du scat, sont indissociables de celui du jazz. Puisque les instrumentistes improvisent, les chanteurs font de même. Leur voix est comme un instrument.

Scat un jour, scat toujours

Si Armstrong n’a pas “inventé” le scat, il l’a en tout cas popularisé. Le lâcher prise de l’interprète, l’exclusivité de la performance et souvent sa dimension comique, presque clownesque, séduisent le public. Pas étonnant donc, que le comédien Charlie Chaplin s’en inspire dès 1936 dans l’une des scènes de son film Modern Times.

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Le scat est une technique vivante, qui s’adapte à tous les styles, à toutes les époques. C’est ainsi que des musiciens comme Al Jarreau ont ouvert le genre à un plus grand public, en intégrant des parties de scat à des morceaux pop ou RnB.

Le scat évolue, donc, et ceux qui cherchent à faire de leur voix un instrument de percussion ont l'idée de lui retirer ses voyelles... cela donne le beatbox, développé et popularisé notamment par les artistes hip-hop.

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On ne s’improvise pas improvisateur

Avec le scat, on n’est pas dans la reproduction de ce qu’on entend, on cherche ce qui manque à un son, ce qu’on pourrait lui apporter”, explique Médéric Collignon, jazzman. Et pour trouver le juste apport, il faut déjà être doté d’un excellent sens du rythme et de l’harmonie, et posséder, évidemment, une excellente technique vocale.

Lorsque j’enseigne le scat à mes élèves, raconte Michele Hendricks, chanteuse jazz et professeure à l’American School of Modern Music de Paris, la première chose que je leur dis c’est de travailler l’harmonie, les accords, comme pour un instrument. Ensuite, on peut développer son sens du rythme, son phrasé, et son attitude”.

Des rythmes et des lettres

Car le scat n’est pas seulement une prouesse technique ou solfégique. Le chanteur est interprète et doit avant tout véhiculer des émotions, raconter une histoire, sans s'appuyer sur les mots.

C’est ainsi que chaque artiste développe son propre style de scat. Cab Calloway, par exemple, affectionne les syllabes dynamiques, dansantes, telles que Zaz-Zuh-Zaz ou Dou Bi Di Gui Di, tandis que Sarah Vaughan préfère les Cha Ba Doi Beu Dou Wi, plus sensuels.

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Les ancêtres

Certains penseront que les chanteurs jazz n’ont pas été les premiers à faire des merveilles sur des syllabes… Et ils auront raison ! La pratique date même de plusieurs siècles, puisque déjà en 1528, Clément Janequin écrit des Ti Ti Ti Ti Ti Ti Pity et des Chou Ty Thou Thouy dans ses chansons, pour que la voix imite le cri des oiseaux.

Et au fil du temps, alors que se développe l’art lyrique, les syllabes gagnent de l’espace sur les partitions des chanteurs. D’abord parce qu’il est plus facile de vocaliser sur des Tra La La La que sur des mots. Mais aussi parce que ces syllabes chantées ont, selon la partition et le caractère du personnage, un sens. Comme des onomatopées musicales.

Le Tra la la la du petit Oscar du Bal Masqué de Verdi est ainsi moqueur, narquois, tandis que celui de Carmen est plus menaçant et méprisant. Le jazz aurait-il hérité d’un petit bout d’opéra ? Certainement. Mais c’est bien tout ce qui fait le charme du jazz : on ne sait pas exactement comment il est né ni de quoi il hérite.

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Les cousins

Certains penseront qu’il n’y a pas que dans les musiques occidentales que l’on chante sur des syllabes… Et ils auront raison ! Direction l’Inde du Sud, par exemple, où les musiciens traditionnels débutent leur apprentissage par le konnakol.

Le konnakol est un langage rythmique, composé de séries de syllabes telles que Ta Ka Di Mi, Ta Ki Ta, Ta Di Ki Na Thom. Leur mélange et leur répétition créent une musique hypnotisante, qui peut être ensuite reprise par un instrument.

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