Chanteur exceptionnel mais aussi compositeur, proche du roi d’Espagne ou encore collectionneur : découvrez les multiples facettes de la vie du plus célèbre castrat de tous les temps, Farinelli.
Adulé de son vivant pour ses prouesses vocales, Carlo Broschi (1705-1782), allias Farinelli, continue de fasciner bien au-delà de sa mort. Inspirant Auber et Scribe pour le personnage de leur opéra La Part du diable (1843), romancée maintes et maintes fois, adaptée au cinéma (Farinelli, il castrato, de Gérard Corbiau, 1994) la vie du virtuose est devenue une véritable légende.
Parmi les approximations historiques que l’on peut trouver à son sujet, un tri s’impose. Voici cinq anecdotes, peu connues, au sujet de ce personnage haut en couleurs.
Compositeur et instrumentiste
Si Farinelli est avant tout un chanteur extraordinaire, admiré pour la clarté de son timbre, l’agilité de ses ornements et la maîtrise de son souffle, il possède plus d’une corde à sa lyre.
Comme tous les musiciens du XVIIIe siècle, il est pluridisciplinaire. Formé auprès du maître napolitain Nicola Porpora, il connait également l’art de la composition. Il écrit ainsi un certain nombre de pièces instrumentales et d’arias, parmi lesquelles Ossequioso ringraziamento per le cortesissime Grazie ricevute nella Britannica Gloriosa Nazione, (un long) hommage à l’Angleterre qui l’a tant applaudi. Ses connaissances en écriture musicale lui permettent aussi d’agrémenter ses airs de passages (ornements virtuoses) et de cadences, très prisés du public.
Également instrumentiste, Farinelli s’adonne, à la fin de sa vie, à la pratique du clavecin et de la viole d’amour qu’il affectionne particulièrement, tout en continuant à chanter pour son plaisir.
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Collectionneur
Adulé aussi bien par le public que par des personnalités politiques, intellectuelles et artistiques, Farinelli est couvert, toute sa vie, d’or et de cadeaux. Sa fortune lui permet d’acquérir une collection digne d’un musée.
Amateur de peinture, il possède des œuvres d’artistes renommés tels que Velasquez, Murillo ou Mattia Preti, ainsi qu’une galerie de portraits, dont un certain nombre le représentant. Dans ses partitions, on trouve l’ensemble de l’œuvre de Domenico Scarlatti. Il possède également l’œuvre complète du grand poète et librettiste Metastasio, son meilleur ami.
Mais ce sont sans doute les instruments qui forment le clou de sa collection : clavecins, pianofortes (dont certains offerts par la reine d’Espagne) et deux violons signés Amati et Stradivarius, pour ne citer que les objets les plus prestigieux.
Farinelli musicothérapeute
A 32 ans, au sommet de sa gloire, Farinelli choisit de quitter la scène publique, acceptant l’invitation de la reine d’Espagne à se rendre à Madrid. Si la reine le demande, ce n’est pas tout à fait par caprice personnel mais pour qu’il guérisse son époux. Le roi Philippe V souffre en effet d’une neurasthénie (forme de grave dépression) et sa femme espère que la fabuleuse voix du virtuose saura aider le monarque à sortir de sa démence.
Tous les soirs, Farinelli se rend donc au chevet de Philippe V et lui chante quelques airs puisés dans son vaste répertoire, comme l’air « Per questo dolce amplesso », tiré d’Artaserse de Johann Adolf Hasse. Et la thérapie semble fonctionner ! Son effet est tel que le roi supplie Farinelli de ne pas quitter la cour. Au lieu des quelques semaines prévues au départ, le « séjour » du chanteur durera… 22 ans !
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Fin diplomate
Quelques jours seulement après son arrivée à la cour de Madrid, Farinelli est nommé Criardo familiar, c’est-à-dire « serviteur familier », un titre hautement honorifique. Proche des deux couples royaux qu’il sert (Philippe V et Élisabeth Farnèse puis Ferdinand VI et Marie-Barbara de Portugal) et intéressé par la politique internationale, Farinelli est courtisé par une multitude d’ambassadeurs.
La France comme l’Angleterre, craignant une alliance hispano-autrichien, lui envoient régulièrement des émissaires pour tenter de les rallier à leurs causes. Très diplomate et affable, le chanteur réussit à ne se mettre à dos aucun parti mais semble totalement incorruptible. Il reste, jusqu’au bout, parfaitement loyal aux souverains espagnols.
Les conséquences de la castration
La castration que Carlo Broschi a dû subir vers l’âge de 10 ans pour préserver sa voix d’enfant n’a pas été sans conséquence sur le reste de son corps. La perturbation hormonale entraînée par l’opération est en effet à l’origine d’un certain nombre de déformations. La plus flagrante, maintes fois relatée dans les descriptions et représentations de l’époque, étant sa taille particulièrement développée, due à la suractivation de l’hormone de croissance.
En 2006, l’exhumation du corps du célèbre castrat par une équipe de scientifiques italiens a permis de se faire une idée plus précise de son profil biologique. Les chercheurs ont notamment révélé la présence d’une hyperostosis frontalis interna, c’est-à-dire un développement anormal de l’os frontal de la boîte crânienne. Cette pathologie généralement asymptomatique est relativement courante chez les femmes après la ménopause. Elle est toutefois beaucoup plus rare chez les hommes. Dans le cas de Farinelli, elle est une conséquence directe de sa castration.