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- Avec Meagan Miller, Ricarda Merbeth, Eleonore Marguerre, Claudia Mahnke, Gerhild Romberger, Nikolai Schukoff, Boaz Daniel, Albert Dohmen, L'Orchestre National de France, l'Orchestre Philharmonique, le Choeur et la Maîtrise de Radio France, le Choeur Philharmonique de Munich dirigés par J.P. Saraste28 juill. 2019 • 1h 19
À propos du concert
Théâtre Antique,Orange
Le
Concert donné en direct du Théâtre Antique d'Orange dans le cadre des Chorégies d'Orange, le 29 juillet 2019.
Avec
Meagan Miller, soprano : Magna peccatrix
Ricarda Merbeth, soprano : Una poenitentium
Eleonore Marguerre, soprano : Mater gloriosa
Claudia Mahnke, mezzo-soprano : Mulier Samaritana
Gerhild Romberger, alto : Maria Aegyptica
Nikolai Schukoff, ténor : Doctor Marianus
Boaz Daniel, baryton : Pater ecstaticus
Albert Dohmen, basse : Pater profondus
Direction : Jukka-Pekka Saraste
« Aucun de ceux qui ont entendu Mahler diriger la création de sa Huitième Symphonie à Munich, en juillet 1910, un an avant sa mort, n’oubliera jamais cette soirée. Ce fut l’un des sommets de sa vie de compositeur. » L’auteur de cet aveu, le chef d’orchestre Bruno Walter, se trompait de deux mois ; mais il n’exagérait pas la portée de l’événement, à la hauteur de la campagne publicitaire orchestrée par Emil Gutmann ; l’impresario avait annoncé à grand bruit la création de l’oeuvre, prenant sur lui de la baptiser « Symphonie des mille ».
C’est le 12 septembre 1910 que Mahler leva la baguette dans la salle de concerts de l’Exposition internationale pour emmener huit cent cinquante choristes, près de cent cinquante musiciens (parmi lesquels six harpes, un harmonium, un orgue, un célesta et des mandolines) et huit solistes dans la plus folle de ses aventures. Les efforts de Gutmann avaient payé : trois mille quatre cents auditeurs s’étaient pressés dans les tribunes, qui firent à Mahler un accueil incroyable. On comptait parmi eux les fidèles du compositeur, mais aussi nombre de critiques, de musiciens (les chefs d’orchestre Willem Mengelberg et Otto Klemperer, les compositeurs Richard Strauss, Alfredo Casella, Anton Webern, Arnold Schönberg, ou encore Siegfried Wagner, le fils du maître de Bayreuth), le peintre Fritz Erler, les écrivains Thomas Mann et Stefan Zweig – qui vient d’offrir à Mahler, pour ses 50 ans, le poème Le Chef d’orchestre. Le jeune chef américain Leopold Stokowski, âgé de 28 ans, reçut le concert comme un coup de tonnerre : « La musique de Mahler produit sur l’auditeur l’effet de stupeur qu’a dû éprouver le premier Blanc devant les chutes du Niagara. » Il dut cependant attendre 1916 et une subvention suffisante pour pouvoir assurer, à la tête de son Orchestre de Philadelphie, la création américaine de l’oeuvre.
Mahler craignait que ce déploiement peu commun de forces musicales ne tournât au « grand numéro de Barnum et Bailey ». Il multiplia donc les recommandations et s’appuya, dans le choix et la préparation des solistes, sur le fidèle Walter. Cette symphonie, il y tenait plus qu’à toute autre de ses oeuvres. « C’est la plus grande [symphonie] que j’aie faite jusqu’à présent, écrivit-il le 18 août 1906 à Mengelberg, à peine le point final posé. Et si singulière dans le fond et la forme que l’on ne trouve rien à en dire. Imaginez-vous que l’univers commence à retentir, à résonner. Ce ne sont plus des voix humaines, mais des planètes, des soleils, décrivant leur orbite. »
Claire Delamarche