Le groupe ukrainien DakhaBrakha a quitté l’Ukraine et la guerre pour sensibiliser la communauté internationale avec leur musique.
« Tu pourrais faire plus pour ton pays avec un micro qu'avec un fusil automatique ». Après avoir longuement tergiversé, cette phrase a convaincu Marko Halanevych, membre du groupe DakhaBrakha, de quitter l’Ukraine après l’offensive russe. En tournée en France puis aux Etats-Unis, les membres du quatuor ukrainien sont partis avec la conviction que leur musique aura plus d’impact hors d’Ukraine.
DakhaBrakha, en vidéo :
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Créé en 2004, le groupe composé de quatre membres (Marko Halanevych, Olena Tsybulska, Iryna Kovalenko et Nina Garenetska) s'inspire de la musique folklorique ukrainienne, notamment des chants traditionnels et des polyphonies. En Ukraine, ce type de musique connaît un regain d'intérêt depuis vingt ans. Le projet Polyphony project s’inscrit par exemple dans cette mouvance. Des ethnomusicologues et vidéastes sillonnent l’Ukraine pour filmer et enregistrer des groupes de femmes le plus souvent, dans les campagnes, chantant des chants traditionnels.
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La démarche de DakhaBrakha s'inscrit dans cette redécouverte du patrimoine musical. « Aujourd’hui, les chants traditionnels sont devenus une passion, un mode de vie pour les Ukrainiens : les musiciens, les ethnomusicologues et même les personnes normales recherchent l’authenticité de ces chants », explique Olena Tsybulska, chanteuse et percussionniste du groupe. Elle s'inquiète justement de la disparition de ce patrimoine avec l'arrivée de la guerre en Ukraine et la destruction des petits villages où vivent leurs aînés, passeuses et passeurs de cette tradition musicale.
Quitter l'Ukraine pour jouer
Dans la nuit du 24 février, lorsque la Russie a attaqué l’Ukraine, les membres du groupe étaient en pleine tournée dans le pays. Deux jours avant, ils jouaient dans la ville de Zaporijjia, dans le sud-est de l’Ukraine. Marko Halanevych raconte la nuit de l’offensive russe : « J’habite à 50 km de Kiev. La nuit de l’attaque, je devais me rendre dans une autre ville pour un concert et j’étais donc levé au petit matin. Sur la route, en voiture, à quatre heures, j’ai vu les éclairs de missiles dans le ciel. Je me suis arrêté. J’ai regardé les infos, mais je savais déjà ce qui se passait. Cela faisait trois mois que la menace russe pesait ».
Les quatre membres de DakhaBrakha doivent alors faire un choix difficile, ils pèsent le pour et le contre. « Les filles hésitaient énormément, elles voulaient rester en Ukraine, explique Marko Halanevych. Moi aussi j'hésitais, c'était très difficile, mais mes proches m'ont dit : 'Toi Marko, tu pourrais faire plus pour ton pays avec un micro qu'avec un fusil automatique' ». Sa décision est prise. Il demande alors une autorisation spéciale au ministère de la Culture pour pouvoir quitter le pays. Depuis fin février, la mobilisation militaire générale est enclenchée en Ukraine. Les hommes entre 18 et 60 ans ont interdiction de quitter le territoire. Cette exception a été faite pour que le groupe puisse sensibiliser la communauté internationale au sort de l’Ukraine, avec leur musique.
Pour quitter Kiev, ils prennent des chemins différents, sans leurs instruments. Leur manageuse, Iryna Gorban, parviendra à déplacer en voiture les violoncelles, accordéons, percussions, etc., qui ont fait la renommée du groupe. « Même sans eux, nous aurions joué. Nous aurions joué sur n'importe quoi ».
En tournée en France et aux Etats-Unis
Paris, Mulhouse, Besançon... en France, le groupe a commencé une tournée qu'il va poursuivre aux Etats-Unis. L'objectif : enchaîner les concerts bien sûr, mais aussi les interviews et chercher à débloquer des fonds « pour les militaires, les enfants et les médecins ukrainiens qui sont très sollicités en ce moment », souligne Marko Halanevych. Ils qualifient leur concert en France de concerts caritatifs.
Engagés sur scène,, ils le sont aussi sur internet. Sur leur chaîne Youtube, le groupe a remplacé toutes ses vignettes par une seule image, jaune et bleue aux couleur de l'Ukraine, et un slogan : No war, Stop Putin. « Nous ressentons déjà un très fort soutien de la communauté internationale et cet appel, No war, c'est pour garder ce soutien jusqu'au bout, pour que l'Ukraine ne reste pas seule, affirme Nina Garenetska. L'utilisation des armes au XXIe siècle, c'est une pure barbarie... Nous, notre seule arme aujourd'hui, c'est notre art ».
Pour en savoir plus
Le site de DakhaBrakha
Retrouvez DakhaBrakha dans Par les temps qui courent par Marie Richeux sur France Culture
Le site de Polyphonic Project