En détresse, le monde de la culture attend des réponses de l'Etat

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En détresse, le monde de la culture attend des réponses de l'Etat

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Le parvis désert du Palais Garnier à Paris
Le parvis désert du Palais Garnier à Paris
© AFP - Clara Pauthier

Totalement à l'arrêt depuis le confinement, le monde de la culture attend des réponses fortes de la part d'Emmanuel Macron, qui doit s'exprimer sur le sujet mercredi 6 mai.

Alors que le déconfinement devrait a priori avoir lieu à partir du 11 mai, le monde de la culture ne sait toujours pas quand son activité pourra reprendre. Les festivals d'été ont presque tous été annulés et il n'y a pour l'instant aucune visibilité pour les conditions d'une reprise à la rentrée. En attendant, c'est tout un pan de l'économie française qui est à l'agonie. 

La culture représente 2,2% du PIB, sept fois plus que l'industrie automobile. Pourtant, les professionnels du secteur sont toujours autant dans le flou. Tribunes, lettres ouvertes et pétitions se font de plus en plus nombreuses pour alerter les pouvoirs publics sur la situation. 

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A commencer par les intermittents du spectacle qui, avec deux pétitions à plus de 250 000 signatures, réclament une année blanche pour le calcul de leurs droits. Il y a bien entendu les salles de concerts, les festivals, qui se demandent tous comment éviter la faillite. 300 d'entre eux, structures indépendantes à l'instar des Nuits de Fourvière à Lyon, viennent de lancer un appel "à l'unité et à la solidarité" et craignent que l"'ensemble de ces structures ne disparaissent". 

A noter également, cette tribune des musiciens classiques indépendants qui n'ont pas forcément le statut de l'intermittence et qui ne veulent pas être les oubliés des mesures de soutien. Les 334 signataires jugent la "situation inacceptable" et critiquent le fait que le décret signé le 14 avril, fixant les modalités d'indemnisation des salariés, ne prenne en compte aucune de leurs spécificités. 

Des premières mesures attendues 

Toutes ces questions, ces inquiétudes, ces angoisses, n'ont toujours pas obtenu de réponse de la part du gouvernement. Après plus de deux mois d'arrêt total des activités, Emmanuel Macron doit s'exprimer mercredi 6 mai sur le sujet. Dans un tweet, le Président a dit : "Aux artistes qui se sont exprimés, je veux dire que je les entends. L’État continuera de les accompagner, protégera les plus fragiles, soutiendra la création. L’avenir ne peut s’inventer sans votre pouvoir d’imagination. Mercredi j'annoncerai des premières décisions en ce sens".

Les professionnels attendent donc beaucoup du Président et regrettent unanimement le peu de réponses apportées jusqu'à présent par Franck Riester. Invité ce matin sur Europe 1, le ministre de la Culture a évoqué un dispositif de protection des intermittents du spectacle durant les mois d'été mais n'a encore rien dit sur l'éventualité de leur accorder "l'année blanche" qu'ils réclament. 

L'Opéra de Paris fermé jusqu'en novembre ? 

Lui aussi invité, cette fois dans la matinale de France Inter, Stéphane Lissner, le directeur de l'Opéra de Paris, s'est fait le porte-parole d'un secteur durement touché par les baisses régulière des financements publics depuis une vingtaine d'années. "Et cette restriction les amène [les collectivités territoriales] à se désengager peu à peu, puisque la culture n’est pas prioritaire, nous ne sommes pas dans une logique de gain de productivité. La diversité, l’innovation, la création vont être peu à peu remplacées par une forme de globalisation, de marchandisation, et c’est ça qui est très préoccupant et que révèle aujourd’hui cette situation" a t-il déclaré_._

Le directeur de l'Opéra de Paris a également évoqué le rapport Bricaire, remis au gouvernement et qui contient des préconisations pour rouvrir les lieux de culture. "Absolument impraticable, pour le public, pour les artistes et pour les salariés de l'Opéra de Paris" a répondu Stéphane Lissner. 

Le rapport Bricaire préconise une distance de 1 mètre 50 entre chaque spectateur, le port du masque obligatoire et le lavage des mains, un marquage au sol pour les entrées et les sorties. Sur scène, il propose une distanciation des artistes, la suppression des entractes ou encore la désinfection des instruments de musique. "Impossible" répond Stéphane Lissner qui rappelle, par exemple, que Tristan et Isolde de Wagner dure 5 heures et que cela paraît totalement inenvisageable sans entracte. "Comment faire entrer les 2 700 spectateurs de l'Opéra Bastille en respectant les distances, c’est impossible, la distance dans l’orchestre, dans les chœurs, c’est impossible".

Stéphane Lissner le dit clairement, il ne veut pas "proposer de spectacles au rabais dans lesquels l'exigence artistique serait mise à mal". Le directeur de l'Opéra de Paris évoque la piste de fermer tout simplement encore "deux ou trois mois à la rentrée pour faire les travaux" qui sont prévus à l'été 2021. Une situation qui ne va pas arranger la grave crise financière qui touche déjà l'Opéra de Paris. 15 millions d'euros de perdus pendant la grève contre les réforme des retraites. "C'est grave" dit Stéphane Lissner qui rappelle que l'Opéra de Paris s'autofinance à 60%. "L'Opéra de Paris va se retrouver sans fonds de roulement et un déficit autour de 40 millions d'euros" a t-il précisé. 

Mais il l'assure, l'Opéra ne fera pas faillite. "L'Etat l'a dit, il sera toujours au côté de cette institution publique". Mais Stéphane Lissner se dit tout de même inquiet pour la culture en général : "si nous n'avons pas un changement profond de soutien pour la culture, je pense que le futur s'annonce très sombre".