George Gershwin – Tout savoir (ou presque) sur la comédie musicale « An American in Paris »

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George Gershwin – Tout savoir (ou presque) sur la comédie musicale « An American in Paris »

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An American in Paris, la comédie musicale inspirée du poème symphonique de George Gershwin
An American in Paris, la comédie musicale inspirée du poème symphonique de George Gershwin
© Getty - Chesnot

« An Américan in Paris » de George Gershwin : un film et une comédie musicale mais surtout une œuvre pour orchestre unique, qui réunit le jazz et des formes sophistiquées de la musique classique. (Re)découvrez l’œuvre qui fascine toujours son public, près d’un siècle après sa création.

Compositeur et « mélodiste » américain, George Gershwin puise dans l’héritage musical à la fois classique et populaire. Si Gershwin n’est certes pas le seul à se servir du jazz - de nombreux compositeurs, à commencer par Ravel, y puisent leur inspiration – le « mélodiste » et compositeur fusionne ces deux genres de manière équilibrée afin de créer une musique aux allures classique et aux harmonies complexes avec un style et une légèreté dérivés des chansons modernes et populaires.

Créée le 13 décembre 1928 au Carnegie Hall à New York, l'œuvre pour orchestre An American in Paris s’inspire d’un séjour à Paris effectué par Gershwin en 1926. L'oeuvre pour orchestre, qualifiée de « ballet rhapsodique » par son compositeur, représente le style unique de George Gershwin à son apogée, un mélange à la fois complexe et décontracté de musique populaire américaine et de musique savante française. 

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Une idée à Paris

Après la création du Concerto en fa, commandé en 1925 par le directeur musical du New York Symphony Orchestra Walter Damrosch, ce dernier demande à George Gershwin une nouvelle œuvre pour orchestre. Gershwin fait alors en voyage à Londres et à Paris en 1926, et rencontre notamment Maurice Ravel, Igor Stravinsky et Nadia Boulanger. Et c'est à son retour à New York qu'il trouve l'inspiration, en regardant le fleuve Hudson : « J'adore ce fleuve et j'ai pensé au nombre de fois que j'avais eu le mal du pays, et puis l'idée m'est venue : un Américain à Paris, le mal du pays, le blues », explique-t-il à un journaliste en 1929. 

George Gershwin (droite) avec Maurice Ravel (au piano) en 1928
George Gershwin (droite) avec Maurice Ravel (au piano) en 1928
© Getty - Hulton Deutsch

Son cadre choisi, Gershwin repense à cette mélodie de quatre mesures nommée Very parisienne et sous-titrée « An American in Paris » qu’il offre en 1926 à ses hôtes parisiens Robert et Mabel Schirmer. De ces quatre mesures va naître le « poème symphonique pour orchestre » comme sera sous-titrée l’œuvre, l’une des plus grandes œuvres de George Gershwin et du répertoire américain : « Mon but est de décrire les impressions d’un Américain visitant Paris, ses promenades, les sons qu’il entend et la façon dont il s’absorbe de l’atmosphère française » écrit-il en 1928 dans la présentation de sa composition.

Divisée en 5 parties, l’œuvre commence par deux thèmes joyeux qui représentent l’animation quotidienne des rues de Paris, les bruits et les klaxons de taxis que Gershwin retranscrit littéralement en écrivant pour quatre klaxons, achetés à Paris, Avenue de la Grande Armée, en 1928. 

Une introduction aux allures musicales françaises écrite « à la manière de Debussy et des Six » selon Gershwin, qui ajoute même une citation du Nocturne n°2 - Fêtes de Debussy et de la chanson populaire française La Mattchiche de Charles Borel-Clerc, composée en 1905.

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Après le brouhaha parisien arrivent deux passages plus mélancoliques : « Peut-être en rentrant dans un café pour prendre un verre, notre ami américain ressent soudainement un profond mal du pays », continue Gershwin. Ce mal du pays est annoncé par de nouveaux timbres évocateurs du jazz américain, tels que les rythmes décalés, les notes « blue », le saxophone et la caisse claire.  

« La nostalgie n’est pas une maladie mortelle », nous rassure le compositeur, et la musique retrouve finalement son élan. Son « coup de blues oublié, l’américain retrouve la vivacité parisienne avec les thèmes joyeux de l’ouverture, mais avec une dernière pensée enjouée pour l’Amérique, annoncée par le saxophone. 

Un américain dans tous ses états 

Mort le 11 juillet 1937 d’un cancer du cerveau foudroyant, George Gershwin ne vit jamais le véritable succès de son œuvre. En 1949, le studio américain Metro-Goldwyn-Meyer annonce qu'il souhaite produire une comédie musicale située à Paris, et inspirée de l’œuvre de Gershwin. 

Ayant obtenu les droits de l'œuvre pour le cinéma lors d’une partie amicale de billard américain avec Ira Gershwin, le frère parolier de George, le producteur Arthur Freed confie le projet au réalisateur américain Vincente Minnelli (père de Liza), auquel se greffe Gene Kelly, superstar de la comédie musicale. 

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Situé à Paris dans l’après-guerre, le film met en scène Jerry Mulligan, ancien soldat américain devenu peintre. S’il est toujours histoire d’un américain à Paris, ce dernier ne ressent plus le mal du pays mais plutôt le mal d’amour : il est tombé sous le charme de la jeune française Lise, qui s'avère être la fiancée d’Henry, un ami de Jerry. 

Un sujet mélancolique égayé par la musique de Gershwin, et pas seulement dans le ballet rhapsodique éponyme. De nombreuses compositions de George et Ira Gershwin forment l’ossature du film, dont le Concerto en fa et de nombreuses chansons issues d’autres comédies musicales telles qu’I Got Rhythm, I'll Build a Stairway to Paradise et 'S Wonderful. Ce n’est qu’à la fin du film, pour le grand ballet final, qu’apparait le ballet rhapsodique An American in Paris en entier, une scène d’environ quinze minutes qui coûte au studio près d’un demi-million de dollars. Le film est un succès immédiat, et remporte le prix du meilleur film aux Oscars en 1952 . 

Si An American in Paris est l’une des grandes références de la comédie musicale, ce n’est qu’en 2014 que l’œuvre de Gershwin monte finalement sur la scène d'un théâtre. Dix ans après le ballet sur la musique de Gershwin, le chorégraphe Christopher Wheeldon est invité par Jean-Luc Choplin, directeur du Théâtre du Châtelet, et les producteurs américains Van Kaplan et Stuart Oken à créer une version scénique inspirée du film de 1951. Plus qu'une simple adaptation pour scène du film, la comédie musicale de Wheeldon varie le répertoire des œuvres du film, faisant appel notamment à plusieurs raretés du Songbook de Gershwin telles que les chansons The Man I Love et Fidgety Feet.

La création mondiale en 2014 à Paris de cette nouvelle comédie musicale, avec la participation de stars du Royal Ballet, du New York City Ballet et de Broadway, est un succès incontestable, récompensé par 4 Tony Awards et une tournée mondiale à guichets fermés. 

Des décennies après la création de l’œuvre et son adaptation cinématographique, « l’américain » de Gershwin trouve finalement sa place à Paris. En 1925, le magazine américain demandait à George Gershwin d’écrire sa propre épitaphe : « Ici repose George Gershwin, Compositeur Américain. Compositeur ? Américain ? », répond le compositeur avec un certain manque de confiance. Près d’un siècle plus tard, les points d’interrogations sont assurément inutiles