Karol Beffa compose Tenebrae, un requiem pour une "droite défunte"

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Karol Beffa compose Tenebrae, un requiem pour une "droite défunte"

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Portrait du compositeur Karol Beffa. Avril 2017.
Portrait du compositeur Karol Beffa. Avril 2017.
© AFP - Constant Forme-Becherat / Hans Lucas

L'homme d'affaires Philippe Villin a commandé à Karol Beffa un requiem pour une “droite défunte”, en référence à la présidentielle de 2017. L'oeuvre a été présentée le mardi 6 mars, à Paris.

Dans l’émission Musique Matin du 7 mars 2018, Saskia de Ville reçoit l’homme d’affaires et mécène Philippe Villin, le compositeur Karol Beffa ainsi que le violoncelliste Victor Julien-Laferrière. Leur point commun ? Tous les trois ont participé à la création d’un Requiem contemporain : Tenebrae

L'invité du jour
52 min

Etape 1 : l’idée

Le 5 mars 2017, devant les militants amassés sur la place du Trocadéro, François Fillon déclare maintenir sa candidature à l’élection présidentielle 2017 malgré les révélations du Canard Enchaîné et sa convocation par les juges français pour une mise en examen.  

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Dès le lendemain, l’homme d’affaire et mécène Philippe Villin annonce pour plaisanter à l’occasion d’une soirée musicale privée : « Je viens de commander à un grand compositeur français un Requiem pour une droite défunte. »

Philippe Villin est un banquier et homme d'affaires, impliqué dans le mécénat musical français.
Philippe Villin est un banquier et homme d'affaires, impliqué dans le mécénat musical français.
© AFP - Damien Grenon

Une plaisanterie qui n’en est pas une : « Quelques mois plus tard, j’ai réalisé que je n’avais toujours pas commandé ce Requiem », raconte Philippe Villin à Saskia de Ville. J’ai contacté Karol Beffa et je lui ai demandé s’il acceptait de composer un petit Requiem pour le 6 mars [2018]. Je lui ai dit que ce serait un Requiem pour une droite défunte. Karol Beffa a accepté mais m’a demandé s’il pourrait intituler l’oeuvre différemment. »

Etape 2 : la composition 

Pour Karol Beffa, cette commande est d’abord un prétexte de composition, de création, et en aucun cas une démarche politique. « Pour moi, il s’agit de musique ‘pure’. C’est-à-dire que ça n’est pas une oeuvre à programme, malgré l’intention première de Philippe Villin. »

« J’ai surtout pris cette commande comme un prétexte pour écrire une pièce dans un climat un peu sombre », poursuit Karol Beffa au micro de France Musique. Un climat sombre qui explique le titre choisi pour l’oeuvre : Tenebrae. Quant au sous-titre, Petit Requiem, il s’explique par la brièveté de l’oeuvre - une dizaine de minutes seulement - ainsi que par la possibilité d’interpréter indépendamment chacun de ses courts mouvements. « Le public n’est pas obligé de subir d’un trait ces 10 minutes de noirceur », plaisante le compositeur. 

Etape 3 : la création

Tenebrae est une oeuvre de musique de chambre, créée le 6 mars 2018 chez Philippe Villin par 4 jeunes musiciens : le flûtiste Gustav Villegas, le violoniste Guillaume Chilemme, l’altiste Léa Hennino et le violoncelliste Victor Julien-Laferrière

« Victor Julien-Laferrière m’a demandé s’il y avait une signification derrière les trois notes que l’on entend de manière répétitive, à la fin de l’oeuvre. Si Sol La. Je lui ai répondu que cela m’évoquait seulement le tintement des cloches, quelque chose de sombre », explique Karol Beffa. 

Pas de message politique, donc, dans la partition de Tenebrae et « la création s’est faite dans une ambiance tout à fait ‘républicaine’ » précise avec humour le violoncelliste Victor Julien-Laferrière, rappelant que lui aussi n’avait pas rejoint ce projet de manière engagée. 

Ainsi, si la commande de Philippe Villin exprime un message politique, fait écho à l’actualité, l’oeuvre de Karol Beffa, elle, s’autorise une seconde vie et s’ouvre à toutes les interprétations possibles. Une liberté d’appropriation et d’implication que possèdent les musiciens, mais aussi les spectateurs. Victor Julien-Laferrière en témoigne : « Le soir de la création, certains ont cru entendre quelques notes d’espoir à la fin de ce requiem... »