Le Centre Pompidou et l’Ircam célèbrent l’union de la musique et des arts visuels
Par Alice BoccaraJeudi 1er juin débute le festival ManiFeste 2017 de l’Ircam, revenons sur les liens qui unissent cette institution historique et le Centre Pompidou, qui fêtent leurs 40 ans cette année.
Les liens entre le Centre Pompidou et l’ Institut de Recherche et Coordination Acoustique/Musique (Ircam) ont toujours été très forts. Cette année, plusieurs évènements organisés par les deux institutions viennent rappeler que musique et arts visuels ont un destin commun.
Une création commune
Fondé par Pierre Boulez en 1977, l’Ircam fait partie intégrante du Centre Pompidou mais possède son propre fonctionnement.
En 1969, le président Georges Pompidou décide de créer Beaubourg : « Je voudrais passionnément que Paris possède un centre culturel [...] qui soit à la fois un musée et un centre de création, où les arts plastiques voisineraient avec la musique, le cinéma, les livres... ». Pour créer le pôle musique du Centre, il fait appel à Pierre Boulez - alors directeur musical de l’Orchestre de Cleveland - qui fonde l’Ircam avec l’aide de Luciano Berio.
Vidéo d'archive de l'Ina montrant Pierre Boulez à la création de L’Ircam
D’emblée, le Centre Pompidou et l’Ircam ont donc eu vocation à affirmer les liens entre la musique et les arts plastiques. Situé sur la place Igor Stravinsky, où trônent les oeuvres de Niki de Saint Phalle et Jean Tinguely, le centre de recherche et de création se trouve à quelques mètres de Beaubourg, et cette proximité facilite le passage d’un lieu à l’autre. Pourtant, il a été reproché au Centre Pompidou et à l’Ircam de n’avoir qu’une proximité géographique. Guillaume Cerutti - directeur général du Centre Pompidou de 1996 à 2001 - a même préconisé de séparer l’Ircam du Centre Pompidou et de le déplacer à la Villette (où se trouvent déjà la Philharmonie de Paris, et l’Ensemble intercontemporain créé aussi par Boulez) pour y créer un pôle de musique contemporaine.
Les directeurs actuels des deux institutions (Frank Madlener, directeur de l’Ircam depuis 2006 et Serges Lasvignes, président du Centre Pompidou depuis 2015) sont eux totalement opposés à cette séparation, qui irait contre la vocation initiale du Centre Pompidou : la pluridisciplinarité. Cette année anniversaire a donc été l’occasion pour l’Ircam et le Centre Pompidou de réaffirmer leurs liens institutionnels mais aussi artistiques avec la mise en place de deux expositions : « Imprimer le monde » et « L’oeil écoute ».
L’oeil écoute : abolir les frontières entre les arts
Au 5e étage du Centre Pompidou, la nouvelle exposition-parcours « L’oeil écoute » met à l’honneur les liens qui unissent arts visuels et musique. Dans l’espace d’exposition dédié aux collections permanentes du Musée National d’Art moderne, un fil rouge a été tracé par une quinzaine de commissaires du musée.
Plusieurs salles sont consacrées aux grandes rencontres entre la musique et les arts visuels, des Ballets russes à l’amitié entre John Cage et Marcel Duchamp en passant par le futurisme italien. D’autres espaces sont moins attendus, comme cette salle consacrée à la partition. On apprend que la notation musicale a été un point de contact essentiel entre la musique, le dessin et la performance dans les années 1960, avec notamment les partitions-dessins de Pierre Boulez ou de Stockhausen, et les Events de George Brecht (élève de John Cage). Ces events sont des petites fiches où sont notés les gestes d’une performance à réaliser.
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Dans une autre salle, on découvre les croquis de décors des ballets de Georges Braque, jusque là inédits, tandis que des hauts-parleurs diffusent de la musique d’époque et la poésie sonore de Heidsieck. Ce que montre cette exposition, c'est que les artistes modernes du XXe siècle n'ont cessé de tisser des liens entre musique, photographie, peinture, ready-made... pour abolir les frontières entre les arts.
La 3D en design et en musique
Une autre exposition vient réaffirmer les liens entre les arts visuels, la musique, et la recherche scientifique. Consacrée à l’impression 3D, «Imprimer le monde» réunit artistes, designers, architectes, compositeurs et ingénieurs. On y voit des objets de design, des prototypes, des logiciels et deux installations produites par l’Ircam. Disenchanted Island de la compositrice Olga Neuwirth donne à entendre l’empreinte sonore de l’église vénitienne de San Lorenzo. Et le Jardin d’Eden de Hyuan-Hwa Cho et Raphaël Thibault, une oeuvre musicale et visuelle, projette le spectateur dans un monde entre nature et artifice électronique.
Création, recherche et exposition
Toutefois, une différence de taille subsiste entre l’Ircam et le Musée National d’Art moderne du Centre Pompidou : les missions du musée sont la conservation et l’exposition des collections d’art moderne, ainsi que l’aide à la création contemporaine. L’Ircam, lui, a la spécificité d’être une « communauté de scientifiques et d’artistes ». C’est à la fois un lieu de création artistique et de production de spectacles vivants mais aussi un centre de recherche qui abrite une unité mixte du CNRS (Centre National de la Recherche Scientifique). Le défi pour ces deux institutions sera donc de poursuivre cette étroite collaboration sans pour autant se fondre l’une dans l’autre...
Informations pratiques :
Festival ManiFeste 2017, week-end spécial du 1er au 4 juin 2017 puis jusqu’au 1er juillet, diffusion en direct sur France Musique de la soirée du vendredi 2 juin
« L’oeil écoute », du 4 mai 2017 au 1er avril 2018
« Imprimer le monde », du 15 mars au 19 juin 2017