Leopold Stokowski : un chef d’orchestre à l’encontre de la tradition

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Leopold Stokowski : un chef d’orchestre à l’encontre de la tradition

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Leopold Stokowski, un chef d'orchestre pas comme les autres
Leopold Stokowski, un chef d'orchestre pas comme les autres
© Getty - Erich Auerbach

De sa façon de diriger à ses expérimentations avec l’enregistrement sonore, Leopold Stokowski n’a cessé de redéfinir le métier de chef d’orchestre. Voici l’histoire d’un homme qui ne faisait rien comme les autres.

Vous connaissez sans doute sa silhouette aux côtés de Mickey dans Fantasia, mais la célébrité du chef d'orchestre britannique Leopold Stokowski ne s’arrête pas là. Brillant musicien, expérimentateur infatigable, grande figure médiatique et célèbre don Juan, Leopold Stokowski fut le premier chef d'orchestre superstar dont la réputation a dépassé la sphère de la musique classique. Doté d’un sens du spectacle jusqu’alors jamais vu chez un chef d’orchestre, il ne cesse de se démarquer par ses choix hors-normes et d’aller à l’encontre des habitudes musicales de l’époque.

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L'expérimentation et l'innovation sont les maîtres-mots de la carrière de Leopold Stokowski, qui s’intéresse notamment aux nouvelles techniques d'enregistrement et de diffusion de l’époque et s’associe notamment aux développements révolutionnaires du cinéma, de l'opéra et du ballet.

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La scène, terrain d’expérimentation

D’abord chef d'orchestre à la tête de l’Orchestre symphonique de Cincinnati de 1909 à 1912, Leopold Stokowski est ensuite nommé directeur musical de l’Orchestre de Philadelphie. C’est là qu’il tente ses expérimentations musicales les plus radicales, qui ne manquent pas de marquer ses publics et d’inscrire son nom dans l’histoire de la direction d’orchestre.

A la tête de son nouvel orchestre, Stokowski acquiert rapidement une réputation de « showman » musical. Sa théâtralité scénique comprend de grands gestes très visuels, dont celui de jeter sa partition au sol afin de montrer au public qu'il n’en a pas besoin pour diriger. Il expérimente également les éclairages de concert, dirigeant souvent dans une salle sombre avec seulement sa tête et ses mains éclairées, ou alors les lumières arrangées de manière à ce qu'elles projettent des ombres impressionnantes.

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Stokowski s’attaque également à l’un des objets les plus incontournables dans l’image d’un chef d’orchestre, symbole de son pouvoir absolu : la baguette. En effet, à la fin de la saison 1929-1930, il commence à diriger sans baguette, préférant communiquer ses intentions musicales avec ses mains. Son style de direction « libéré » deviendra l'une de ses marques de fabrique les plus célèbres.

Dans l’orchestre, il encourage les coups d’archet « libres » chez les cordes, plutôt que des coups synchronisés, ainsi qu’une respiration libre chez les vents. Cette émancipation de la rigidité des gestes permet de créer une sonorité riche et luxuriante, surnommé le son « Stokowski » et même le son « Philadelphia ».

Stokowski sera aussi le premier à expérimenter avec le placement des musiciens de l’orchestre symphonique, formation peu changée depuis sa genèse, en regroupant les violons à sa gauche et les altos et les violoncelles à sa droite afin de mieux étaler les timbres des cordes. Ce changement, surnommé le « Stokowski shift », devient progressivement une norme internationale et annonce un nouveau chapitre dans l’histoire de l’orchestre symphonique.

Mais l’esprit novateur de Stokowski ne s’arrête pas là. On pourrait croire qu’il serait impossible de faire évoluer le podium d’un chef d’orchestre, mais le chef se mettra encore à contre-sens de la tradition lorsqu’il s’agit de concevoir son propre podium. Alors que ceux des chefs d'orchestre sont jusqu’alors de simples caisses en bois afin d’élever le chef, le podium de Stokowski est circulaire et argenté, avec des escaliers ronds menant à la plate-forme. Impossible de confondre un concert de Stokowski avec celui d’un autre.

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Chef d’orchestre branché

Les expérimentations de Stokowski vont bien au-delà de la scène et de la salle de concert. Premier chef d’orchestre à expérimenter les nouvelles technologies, le maestro de Philadelphie est notamment l'un des premiers  à reconnaître l'importance de l’enregistrement et de la reproduction sonore électrique et entreprend presque à lui seul de rendre disponible sur phonographe les œuvres majeures du répertoire orchestral.

En 1925, Stokowski et l'Orchestre de Philadelphie réalisent les premiers enregistrements orchestraux en utilisant le nouveau procédé électrique. En 1930, ils entament une décennie d'expérimentations avec le Bell Telephone Laboratories, branche de recherche de l'American Telephone & Telegraph Company.

La collaboration entre Stokowski et le laboratoire Bell Telephone marque une nouvelle étape dans l'histoire de la reproduction sonore électrique, tournant décisif dans la relation entre la musique classique et les technologies électriques. Par ses expérimentations, Stokowski parvient notamment à rendre le phonographe musicalement intéressant à une époque où les préjugés contre la « musique en conserve » sont largement répandus. Ces expériences aboutissent aux premiers enregistrements stéréo de musique orchestrale, réalisés 1931-32.

Le gout de Leopold Stokowski pour les nouvelles tendances concernent également son propre corps. Arrivé aux Etats-Unis en 1893, le yoga est une discipline encore relativement peu connue et encore moins pratiquée par le grand public. Néanmoins, dès le début de sa carrière, Leopold Stokowski est un passionné absolu de la bonne santé, suivant un régime quotidien de yoga et de méditation, le tout accompagné d’un régime alimentaire strict. Cette maîtrise du corps lui permet notamment de gérer ses longues journées de travail, allant parfois jusqu'à 18 heures par jour, et de maintenir sa carrière de direction jusqu'à ses 95 ans.

La star « people »

Non seulement chef d’orchestre de renom, Leopold Stokowski fait également parler de lui pour les nombreux rebondissements dans sa vie privée. Entre ses trois mariages, dont l'un avec Evangeline Johnson, héritière de la dynastie Johnson & Johnson, et un autre avec Gloria Vanderbilt, autre grande dynastie américaine, il entretient plusieurs relations extra-conjugales souvent médiatisées, notamment avec la célèbre actrice Greta Garbo.

Il s’associe également à la culture populaire,  jouant au côté de Deanna Durbin dans la comédie musicale One Hundred Men and a Girl (1937). Mais c'est en 1940 qu’il marque l’histoire du cinéma avec sa prestation musicale dans Fantasia de Walt Disney. La renommée de Leopold Stokowski est alors si répandue qu’il sera même imité par Bugs Bunny en 1949. Un mot suffira pour savoir de qui on parle : Leopold.

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