
Lieu de plaisance privilégié de Louis XIV, Marly fut également lieu de musique. Portrait musical d’un lieu atypique du règne de Louis XIV, dernière résidence estivale avant sa mort le 1er septembre 1715.
Le 1er septembre 1715 s’éteint Louis XIV, d’une mort qui met fin au plus long règne de l’histoire de France (72 ans, dont 54 de règne dit “personnel”) et à l’un de ses plus célèbres. A 76 ans, la course du Roi-Soleil s’achève en un lent crépuscule marqué par les morts : celles du grand hiver de 1709 et de ses répercutions, celles de ses héritiers (Louis XIV perd son fils en 1711, son petit-fils et un arrière-petit-fils en 1712), celles aussi de la guerre de Succession d’Espagne, débutée en 1701 et qui ne prit fin qu’en 1714.
Le roi qui entre se reposer en son domaine de Marly le 12 juin 1715 n’a plus rien à voir avec le souverain dansant le Ballet royal des Plaisirs sur une musique de Jean-Baptiste Lully. Celui qui revêtait en 1655 l’habit de berger pour accompagner un air léger (“Des Nymphes il peut choisir / La plus belle & la meilleure : / Ce berger fait à plaisir / trouvera par tout son heure. ”) partage - soixante ans plus tard - son temps entre les soins, la prière, un peu de chasse et de revues militaire, et quelques divertissements… Il en sera ainsi jusqu’au 9 août, date à laquelle Louis XIV rentre à Paris, pour y mourir peu après.
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“*Sire… Marly ! * ”
Si la musique sous le règne de Louis XIV est souvent associée à Versailles et aux divertissements, les séjours à Marly sont eux aussi propices à des instants musicaux, souvent plus intimes. Le monarque s’y rend souvent, au détour d’une partie de chasse ou d’une balade, et ses séjours ne cessent de s’allonger au fil du règne, de quelques jours dans les années 1680 et 1690 à plus de deux semaines dans les années 1700.
Plus petit que Versailles, Marly n’accueille qu’une centaine d’élus, sélectionnés par le roi lui-même et que l’on appelle les “Marlys”. Commentateur de son temps, le duc de Saint-Simon a décrit dans ses Mémoires la façon dont les courtisans se signalaient au monarque pour obtenir le droit de l’accompagner :
“Cela s’appelait se présenter pour Marly. Les hommes demandaient le même jour le matin, en disant au roi seulement : “Sire, Marly !”.
A Marly, les règles strictes de l’étiquette que connaît la cour à Versailles sont allégées (sans toutefois être supprimées), à commencer par les règles vestimentaires. L’historien Thierry Sarmant rapporte à ce propos une phrase du marquis de Dangeau : “Le roi veut qu’à Marly on soit à son aise et commodément ”. Certains, comme la Princesse palatine (femme du frère du roi), évoquent même une atmosphère très légère : "On ne sait plus du tout qui on est : quand le roi se promène, tout le monde se couvre * (...). J'ai grand'peine à m'habituer à cette confusion ; on ne se fait pas d'idée comme tout est présentement, cela ne ressemble plus du tout à une cour*."
Ce léger relâchement se retrouve aussi dans les oeuvres musicales présentées à Marly : alors qu’on joue à Versailles les grands divertissements (La Grotte de Versailles de Lully, Les fontaines de Versailles de de Lalande, Les Plaisirs de Versailles de Charpentier…) et les opéras, Marly est le cadre privilégié des pastorales : Tircis et Célimène, ou les bergers de Marly de Jean-Baptiste Matho y est présenté en 1697, tout comme Diane et Endimion (1698) et Apollon et Daphné (1703) de Philidor.

Propice au relâchement, Marly est le cadre de mascarades, auxquelles la famille royale participe souvent elle-même : en 1700, Louis XIV y organise une grande série de mascarades dès la Chandeleur et jusqu’au carême. En deux mois, huit spectacles y sont donnés, toutes de la main de **de Lalande ** ou de Philidor, dont une *Mascarade du roi de la Chine * dans laquelle le compositeur s’inspire - très librement - des sonorités orientales.
Cette musique reste peu connue, très rarement interprétée et encore moins enregistrée. La liste d’écoute ci-dessous rassemble donc les quelques pièces dont la représentation est assurée à Marly : Mascarade du Roy de la Chine, la Tempête issue d’*Alcione * de Marin Marais, des airs de de Lalande … Ainsi que des scènes pastorales de la fin du XVIIe et du début du XVIIIe siècle.
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