Montreuil accueille un orchestre de musiciens venus de différents pays arabes
Par Aliette de LaleuLundi 15 juillet, sur la place Jean-Jaurès à Montreuil, l’Arab Youth Philharmonic Orchestra est venu interpréter des musiques de Mendelssohn, Bizet mais aussi une musique traditionnelle égyptienne et une création de Mohammed Amin Azzat.
Le soleil tape sur la place de la mairie de Montreuil, ce qui n’empêche pas le public de s’installer avant le début du concert. Le chef d’orchestre montreuillois Mathieu Braud prend la parole pour présenter l’orchestre, un ensemble qui se produit pour la première fois en France.
Ils sont une cinquantaine, venus d’une dizaine de pays : Tunisie, Liban, Egypte, Algérie, Irak, Jordanie, Syrie, Maroc, Koweït… réunis sous le nom de Arab Youth Philharmonic Orchestra. Un ensemble fondé en 2006 par le musicien égyptien Fawzy El-Shamy, que tout le monde dans l’orchestre appelle Docteur Fawzy. Son but : faire jouer ensemble des musiciens issus de pays arabes différents, dont certains peuvent connaître des tensions politiques ou religieuses entre eux, afin de promouvoir la fraternité.
Un tour du monde ?
Chaque été, les musiciens se retrouvent le temps d’une tournée, « on organise des projets pour un orchestre qui espère faire le tour du monde ! », rêve le trompettiste Mohamed Galal, organisateur de cette virée française. « Jusqu’à présent, nous avons joué en Allemagne, en Afrique du nord, au Moyen-Orient, et je me suis dit que ce serait bien de faire quelque chose en France ».
Le plus difficile c’est l’obtention des visas, certains consuls (Irak ou Egypte) ont peur que les musiciens ne reviennent pas dans leur pays
Le musicien égyptien a alors contacté un de ses anciens camarades à Aulnay-sous-bois (il a vécu 9 ans en France), le chef d'orchestre Mathieu Braud, qui a tout de suite répondu à l’invitation, non sans difficultés : « C’était un peu l’enfer… Le plus difficile c’est l’obtention des visas, certains consuls ont peur que les musiciens ne reviennent pas dans leur pays… Sans l’intervention de l’Institut du monde arabe et donc Jack Lang [directeur de l’institution, ndlr] et Marie Descourtieux [Directrice de la communication, ndlr] on se serait retrouvés avec un orchestre de 15 musiciens ! », témoigne le montreuillois.
Une programmation classique occidentale et orientale
Grâce à l’engagement de Mathieu Braud et de la mairie de Montreuil, qui a eu « un écho très favorable » selon lui, l’orchestre donne trois représentations, deux sur la place de la mairie montreuilloise, et la dernière à l’Institut du monde arabe mercredi 18 juillet (concert complet). Après quelques jours de répétitions, l_’Arab Youth Philharmonic Orchestra_ a présenté une programmation variée : quelques tubes de la musique classique occidentale comme La Moldau de Smetana ou l’ouverture de Carmen, ainsi que des extraits d’une création, Desert Camel, du compositeur irakien Mohammed Amin Azzat ou encore de la musique traditionnelle égyptienne.
Lundi 15 juillet, cette dernière oeuvre a suscité l’engouement du public de Montreuil. Le concert étant gratuit, en plein air et au cœur de la ville, les spectateurs venus s’installer pour écouter l’Arab Youth Philharmonic Orchestra étaient parfois là par hasard… Des dames âgées posées sur un banc pour discuter, des passants qui s’arrêtent, intrigués par l’ensemble, ou la musique, un SDF tatoué des pieds à la tête, bière à la main, qui applaudit chaleureusement à la fin de la représentation.
Concert dans la rue : la solution ?
Un pari réussi pour toucher le plus large public possible d’après Mathieu Braud : « Jouer dans la rue, je crois que c’est la solution. Il faut aller vers les gens, cesser d’attendre qu’ils viennent dans les salles… ». A la fin du concert, les musiciens rangent leurs instruments et discutent avec quelques personnes du public venus les féliciter, en anglais, en français ou en arabe. « Je suis très fier de jouer ici en France », déclare un contrebassiste algérien. A côté de lui, Sara, violoniste aussi originaire d’Algérie, renchérit : « Paris c'est un rêve pour tout le monde ! C'est la capitale des artistes, on voit partout des gens danser, chanter, c'est vraiment magnifique et inspirant. Je me sens vraiment chanceuse d'y être et de jouer avec cet orchestre, c'est un échange culturel vraiment très fort. »
L’orchestre philharmonique de la jeunesse arabe a l’ambition de faire le tour du monde. Alors pourquoi cette tournée française ? « C’est moi qui ai insisté, raconte le trompettiste Mohamed Galal, j'ai toujours eu envie d'un jour présenter cette jeunesse arabe en France, surtout à quelques personnes ici, ou une catégorie de personnes qui pense que les arabes ne sont pas tout à fait musiciens, par exemple… Le fait de leur parler avec une langue universelle comme la musique, c'est la meilleure idée pour moi, avec celle de réunir autant de pays que malheureusement les politiciens n’ont jamais réussi à réunir auparavant. Grâce à la musique on y arrive, et avec du plaisir. »