Comme en France, l'Italie se voit contrainte de fermer ses salles de spectacles jusqu'au 24 novembre. Dominique Meyer, directeur de la Scala de Milan aborde la situation musicale actuelle en Italie.
- Dominique Meyer Surintendant de la Scala de Milan
Alors qu'en Italie, comme en France, la culture est totalement à l'arrêt, la Scala de Milan est, pour le moment, fermée jusqu'au 24 novembre. Dominique Meyer explique être "retourné dans la situation de l'hiver et du printemps. Ca a été très difficile car les règles changent chaque semaine ici en Italie. C'est le problème des pays dans lesquels il y a trois étages, l'état, la région, la ville. Comme la politique ne fait pas toujours des décisions unanimes, c'est très difficile."
La situation n'est pas simple de l'autre côté des Alpes, comme le précise le directeur de la Scala, "il y a un décret de loi à peu près chaque mois ou toutes les trois semaines, et dans l'intervalle il y a des décisions de la région qui adaptent ces lois à la région dans laquelle vous vous trouvez. En réalité vous avez une visibilité parfois de huit jours, parfois de quinze jours. C'est donc très difficile pour nous car nous sommes une des professions les plus programmées."
Dominique Meyer déclare ne pas travailler dans les meilleures conditions possibles à cause de la pandémie puisqu'à Vienne il programmait "les choses trois ans à l'avance. Là, on est contraints de naviguer à vue. "
La Scala a tout de même pu effectuer une rentrée avec le Requiem de Verdi puis Aïda en version de concert ainsi que "La Traviata, des concerts avec Zubin Mehta, Myu-Whun Chung, Jonas Kaufmann, et des grands chanteurs qui étaient là tout l'automne." précise le directeur de la Scala.
Il explique que le retour très fort de l'épidémie "a contraint les pouvoirs publics à prendre des décisions très restrictives. Un décret a été signé dans la nuit, je n'ai pas encore tous les détails, mais il instaure des zones rouges, oranges, jaunes, et vertes. Malheureusement, la Lombardie est en zone rouge, ce qui signifie qu'on ne va pas pouvoir rentrer et sortir de Lombardie. Ca veut dire que toute l'activité est fermée, sauf l'activité productive essentielle. Comme la culture n'est pas considérée comme une activité essentielle, il n'y a plus d'activité productive dans la culture."
Suite à la lettre ouverte de Ricardo Muti implorant de rouvrir les théâtres italiens pour, selon lui, "le besoin de nourriture spirituelle", Dominique Meyer souligne que "c'est un double mouvement qui est très accentué en Italie, d'une part les gens qui veulent à tout prix rouvrir les lieux de spectacle, d'autre part ceux qui considèrent que c'est trop dangereux et qui ferment tout. A_ujourd'hui, on a dépassé cette opposition là puisque la décision était de réduire l'activité productive à quelques commerces donc c'est un débat qui date de quelques jours mais on a l'impression que c'est le Moyen Âge_."
Chaque année, la Scala ouvre le 7 décembre, date symbolique car "c'est la Saint Ambroise, le patron de Milan. La tradition était d'ouvrir la saison d'automne, qui existe depuis très longtemps en fait. C'est une ouverture symbolique et une opération de fund raising" indique le directeur de l'Institution.
A la question de savoir si le public pourra être accueilli à cette date, Dominique Meyer répond aussitôt qu'"il n'y a aucun espoir. Mais on n'a pas perdu l'espoir de faire quelque chose de brillant pour la télévision. Si on a la moindre possibilité, on le fera. Tout le théâtre est très mobilisé. Le théâtre a été formidable tout cet automne. Tous les collaborateurs se sont comportés comme des anges. Ils veulent tous que la Scala puisse exister, notamment le 7 décembre. On va inventer quelque chose mais on ne restera pas muets."
Outre celui de ses collaborateurs, danseurs, musiciens, syndicats, Dominique Miller reconnaît un fort soutien des italiens soulignant que "c'est une chose qu'on ne comprend pas très bien quand on est français et qu'on vit en France. La Scala est la deuxième marque italienne, en terme de notoriété. la première c'est Ferrari."
Le directeur de la Scala de Milan conclut en assurant qu'hier, il a "fait la tournée des sponsors, un tiers des ressources de la Scala est du sponsoring, et tous m'ont dit qu'ils ne nous laisseraient pas tomber et qu'ils nous soutenaient."
Une sorte de "soutien citoyen" essentiel évoqué hier dans Musique Matin sur France Musique par Louis Langrée à propos de l'Orchestre Symphonique de Cincinnati qu'il dirige.
Après dix ans de règne à la tête du Staatsoper de Vienne, Dominique Meyer est depuis la mi-mai 2020 à la direction de la Scala de Milan, en pleine pandémie. Il est le deuxième français à piloter l'Opéra de Milan, dans un contexte tourmenté, après Stéphane Lissner, qui lui avait précédé de 2005 à 2012.
Après avoir travaillé dans plusieurs cabinets ministériels et administré l'Opéra de Paris au moment de l'ouverture de l'Opéra Bastille en 1989, Dominique Meyer fait ses débuts de directeur d'opéra à l'Opéra de Lausanne de 1994 à 1999. Il est membre du conseil d'administration de l'Orchestre de chambre de Lausanne de 1995 à 1999, puis président du Ballet Preljocaj de 1991 à 2007. Il est ensuite directeur du Théâtre des Champs-Élysées de 1999 à 2010, tout en étant président de l'Orchestre français des jeunes. Il prend la direction de l'Opéra d'État de Vienne, en décembre 2016, le ministère autrichien de la Culture annonce que son contrat prenant fin en 2020 ne sera pas prolongé.
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