Méditerranée (3/10) : l'Italie de Mussolini et le Congrès du Caire

 Benito Mussolini jouant du violon (1927)
 Benito Mussolini jouant du violon (1927) ©Getty -  Central Press /Hulton Archive
Benito Mussolini jouant du violon (1927) ©Getty - Central Press /Hulton Archive
Benito Mussolini jouant du violon (1927) ©Getty - Central Press /Hulton Archive
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Le fascisme monte en Italie, la musique marche au pas : Respighi ne veut pas faire de vagues, Toscanini fait barrage à la Scala de Milan, Beniamino Gigli chante pour le Duce. Pendant ce temps, en Egypte, le Congrès du Caire fixe les contours de la musique classique arabe.

Nous accostons aujourd’hui dans la capitale italienne où nous sommes conviés aux Fêtes romaines imaginées par Ottorino Respighi.. 

Dans l’Italie fascisante des années 20, Mussolini cherche à asseoir sa légitimité par la musique, le musicien devient un outil au service du parti. Ce sont des années noires où la lecture politique d’une œuvre prime. Alors même que le compositeur Respighi reste prudemment à l’écart des effusions politiques, il peut compter sur la protection du chef autoritaire et intouchable, Arturo Toscanini. La création des Fêtes Romaines a d’ailleurs eu lieu sous la baguette du chef, en février 1929, à New York. 

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Toscanini s’est vigoureusement opposé à ce que le Duce se mêle de questions artistiques. A l’été 1929, les tensions entre le chef d'orchestre et le pouvoir sont à leur comble : Toscanini démissionne de la Scala de Milan. La maison d’opéra se retrouve rapidement gérée par des bureaucrates fascistes...

Entre 1920 et 1930 environ, les œuvres de la seconde école de Vienne, de Stravinsky, Hindemith, sont les bienvenues dans les programmations. Certains festivals encore actifs aujourd’hui voient le jour, comme la Biennale de Venise. Le Duce se montre conciliant, évite tout conflit entre les esthétiques et loue aussi bien le courant « vériste » que le courant futuristes. Mais en réalité, Mussolini cherche déjà à transformer le statut d’artiste indépendant en celui de « bureaucrate-fonctionnaire de la musique ».

De 1930 à 1943, s’impose de plus en plus fortement le contrôle et la censure de la création musicale. Le régime se targue de rechercher un consensus populaire, d’« aller vers le peuple ». La création est en net repli, le pouvoir favorise la tradition de l’opéra italien fin-de-siècle, le considère comme un rempart face aux expérimentations modernistes. Le septuagénaire Mascagni est à nouveau le compositeur en vogue. 

Quittons les rivages sombres de l’Italie fasciste et traversons la Méditerranée pour nous rendre en Egypte. Les années 1930 sont également marquées par le nationalisme arabe. Avec l’effondrement de l’Empire ottoman, l’indépendance de la Turquie et la montée du sionisme, les Arabes se cherchent une identité musicale. C’est au Caire que le baron d’Erlanger donne rendez-vous à des dizaines de musicologues, musiciens et compositeurs, pour un grand congrès de musicologie. La question est de savoir définir les contours de la musique arabe, du Maroc à l’Irak. C’est la raison d’être du Congrès du Caire, en 1932.

Programmation musicale

Ottorino Respighi
Fêtes romaines : Circus maximus   
Orchestre de l'Académie Sainte-Cécile de Rome, Daniele Gatti (direction)
Conifer

Ottorino Respighi
Fêtes romaines : Epiphanie
Orchestre de l'Académie Sainte-Cécile de Rome, Daniele Gatti (direction)
Conifer

Ottorino Respighi   
Airs et danses anciens pour luth P 116 : 1. Balletto detto Il Conte Orlando
Giulio Biddau, Norberto C. Respighi (piano à 4 mains)
Evidence

Ottorino Respighi   
Danses et airs antiques pour luth suite nº1 (transcription pour orchestre) : Villanella Orchestre de chambre Orpheus
DG

Ottorino Respighi   
Danses et airs antiques pour luth suite nº1 (transcription pour orchestre) : Passo mezzo e mascherada
Orchestre de chambre Orpheus
DG

Giulio Caccini
Amarilli mia bella
Beniamino Gigli (ténor)
Nimbus records

Giuseppe Blanc / Nino Oxilia
Giovinezza (hymne officiel du Parti national fasciste italien)
Beniamino Gigli (ténor), Orchestre et Choeur de la Scala de Milan
Youtube

Igor Stravinsky
Sonate : 1er mouvement
Michel Béroff (piano)
EMI

Igor Stravinsky
Sonate : 3eme mouvement
Michel Béroff (piano)
EMI

Igor Stravinsky  
Oedipus Rex : Nonn' erubescite, reges ; Ne probentur oracula
Anne Sofie von Otter (mezzo-soprano), Swedish Radio Symphony orchestra, Esa-Pekka Salonen (direction)
Sony

Pietro Mascagni
Iris : L'aurora :Son io, la vita ! (Acte I)
Choeur de la Radio bavaroise, Orchestre Symphonique de la Radio de Munich, Giuseppe Patane (direction)
CBS

Pietro Mascagni
Iris : I fiori (Acte I)
Choeur de la Radio bavaroise, Orchestre Symphonique de la Radio de Munich, Giuseppe Patane (direction)
CBS

Musique populaire
Danses des princesses
Muhammad Al-Arabi (chant), Ensemble Baladi
BNF

Musique populaire
Samâî bayyâtî thaqîl
Ensemble de hautbois et tambour du Hajj Taha Abu Mandur
Archive sonore de la phonothèque nationale

Musique populaire
Zâr saîdî
Ensemble D'Umm Ibrahim Al-Mahdiyya
Archive sonore de la phonothèque nationale

Ahmed Rami
Leyh telew'ini (Pourquoi me fais tu souffrir ?)
Oum Kalsoum (chant)
La voix du Maghreb

Ahmed Rami
Fine elouyoun
Oum Kalsoum (chant)
Artistes Arabes associés

Bibliographie

« Musique dans l’Italie fasciste, 1922-1943 », Charlotte Ginot-Slacik et Michela Nicolai, éditions Fayard

« Stravinsky », André Boucourechliev, éditions Fayard

« O mes nuits, ô mes yeux », Lamia Ziadé, éditions P.O.L.

« Congrès de musique arabe du Caire », coffret édité par la B.N.F.

Grand Large
59 min

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