

Poète des amoureux, des voyous et des écoliers. Poète de la vie, simple, immédiate. Poète du monde moderne, du monde réel. Poètes des pauvres, des ouvriers, des opprimés. Poètes des mots simples, de l’humour, de la fantaisie... Mais Jacques Prévert ne se disait pas, Poète.
Le cadavre exquis
Jacques Prévert promène son regard d’enfant sur le Jardin du Luxembourg, les cinémas du 6è arrondissement de Paris, les repas dominicaux chez le grand-père et quelques jeux partagés avec un certain Louis Aragon… A l ‘école, il s’ennuie. Mais il aime beaucoup lire. Des livres d’aventure, des contes. Comme David Copperfield, Les Trois mousquetaires ou La Case de l’oncle Tom. A 15 ans il obtient son certificat d’étude et décide de ne plus étudier. Il commence alors à exercer toutes sortes de métiers jusqu’en 1920 où il est envoyé en Turquie après un service militaire à Lunéville. De retour à Paris en 1922, il s’installe au 54, rue du Château dans le 14è arrondissement.
C'est ainsi que la masure devient alors un incroyable espace de liberté et l'un des grands lieux de l'histoire du surréalisme. La toute nouvelle école en fit un point de rendez-vous où, dans une atmosphère «familiale, alcoolique et irrévérencieuse », on refait le monde. Le journaliste du Monde, François Bott écrit alors : « On ne mangeait pas tous les jours, mais on écoutait du jazz toutes les nuits ».
Nous sommes en 1930 et Prévert quitte le mouvement surréaliste, et les soirées d’une drôle de tribu. Le temps du jeu des petits papiers… celui où soudain Prévert décide d’écrire n’importe quoi comme : « le cadavre exquis » ! Plie le papier, et le passe à son voisin, qui complète avec : « boira le vin ». Le replie et le transmet au suivant, qui pose la fin : « nouveau ». Sujet, verbe, complément ; le modèle canonique de la phrase française est respecté, mais le résultat est inattendu. Au même moment, le théâtre ouvrier révolutionnaire prend son essor en France. La vogue vient d'Allemagne où le parti communiste est en contact direct avec le formidable mouvement culturel de la république de Weimar : le cinéma, l'architecture, le design, la philosophie, la littérature, le cabaret, le théâtre, tous les domaines de la vie artistique sont alors concernés par une extraordinaire effervescence créatrice. Né de la rencontre du mouvement surréaliste et du mouvement ouvrier, le Groupe d’Octobre est alors crée en 1932 par des artistes sympathisants ou membres du parti communiste. Jacques Prévert les rejoint et en devient l’âme.
Artiste libre et inclassable
En 1933, un musicien démuni arrive à Paris. Il vient de Budapest. Il fuit les nazis. Il se nomme Joseph Kosma. « Il met de la musique sur les points d’exclamation » écrit Jacques Prévert. Joseph Kosma débute une intense activité de compositeur durant les années d’occupation. Plus de 80 chansons sur les poèmes de Jacques Prévert : Les enfants qui s’aiment, Les feuilles mortes. Autant de chansons qui résonneront dans les caves de Saint-Germain des prés à la fin de la guerre. A la Libération, Marcel Carné signe « Les portes de la nuit ». Yves Montand chante alors, Les feuilles mortes…
Puis à la fin de la guerre, on recueille les poèmes de Jacques Prévert. Comme repris à la rue où ils sont nés. Echangés, récités entre amis et initiés, Paroles, est achevé d’imprimer le 20 décembre 1945. Une poésie vécue au quotidien, sans contraintes, aucunes, dans les rencontres et les ruptures, la camaraderie et l’amour, l’esprit d’insurrection et de révolte. Prévert, l’intarissable causeur, l’artiste libre et inclassable, l’homme de théâtre, de cinéma et de chanson, ne cesse d’écrire.
Prévert a aussi dans ses tiroirs d’innombrables images découpées. Gardées précieusement, il les assemble comme bon lui semble. Encouragés par ses amis Joan Miro et Pablo Picasso, il se passionne pour la pratique du collage dès le milieu des années 1940. « Tu ne sais pas peindre, mais pourtant tu es peintre » lui dit l’artiste catalan. Alors il chine ses images aux Puces comme chez les bouquinistes des quais de Seine : gravures anciennes, planches anatomiques et botaniques, images pieuses ou populaires, reproduction de peintures de maîtres, cartes postales, photographies de ses amis Brassaï ou Doisneau.
Boris Vian, l’artiste dont sans doute il était le plus proche…
« Sa date de naissance, Sa date de décès, Ce fut langage chiffré, Il connaissait la musique, Il savait la mécanique, Les mathématiques, Toutes les techniques, Et les autres avec, On disait qu’il n’en faisait qu’à sa tête, On avait beau dire, Il en avait surtout à son cœur, Et son cœur lui en fit voir de toutes les couleurs, Il savait trop vivre, Il riait trop vrai , Il vivait trop fort, Son cœur l’a battu, alors il s’est tu, Et il a quitté son amour, Il a quitté ses amis, Mais ne leur a pas faussé compagnie. »
Programmation musicale
Les Frères Jacques
En sortant de l’école
Milan Music 3991112
Joseph Kosma
Les portes de la nuit : Les enfants qui s'aiment
Yves Montand (chant)
Henri Crolla (guitare)
Frémeaux et Associés FA5743
Les Frères Jacques
Page d’écriture
EPM Musique 986022
Boris Vian
Sweet and be bop
INA IMV 050
Joseph Kosma et Jacques Prévert
Inventaire
Frémeaux et Associés FA 5167
Maurice Jaubert
Le quai des brumes : générique
FGL PL 9309
Jacques Prévert
Le Jardin
Polygram515772-2
Marlene Dietrich
Déjeuner du matin
Mercury 5379478
Wojciech Kilar
Le Roi et l’Oiseau : la bergère et le ramoneur
Les films Paul Grimault LFPG - 3025412
Yves Montand
Les feuilles mortes
Polygram 836139-2
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