Le convoi des tatoués

Robert Desnos et l'entrée de camp de Buchenwald
Robert Desnos et l'entrée de camp de Buchenwald - /
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Robert Desnos et l'entrée de camp de Buchenwald - /
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Le train quitte Compiègne le 27 avril 1944. On l’a baptisé le convoi des tatoués. Nul ne peut encore aujourd’hui expliquer pourquoi ces prisonniers de droit commun pour la plupart, et non juifs, furent directement envoyés vers l’usine de la mort. Erreur administrative ? Accident ? Vengeance ?

La rumeur a longtemps circulé qu’ils étaient devenus des otages à exterminer après l’exécution à Alger de Pierre Pucheu, l’ancien ministre de l’intérieur du gouvernement de Pétain. Affaire que l’on considère comme le premier procès d’épuration. « Vichy annonce des représailles contre les familles des politiciens d’Alger et contre les gaullistes de France » peut-on alors lire. Des menaces transmises par la BBC contre les responsables nazis auraient évité le massacre. Le gouvernement provisoire d’Alger aurait-il exercé des pressions ?

Le convoi traverse Charleville, Metz, Weimar où il fait une longue pause, puis Fulda, Dresde, Grossrosen, Wroclaw, avant d’atteindre la Haute-Silésie, Gliwice, Katowice et Auschwitz- Birkenau, dans les environs de Cracovie. Le 30 avril, en fin d’après - midi, quand enfin les portes des wagons s’ouvrent et que l’air frais enivre les survivants, la réalité des camps se matérialise en quelques secondes : ordres beuglés en allemand, coups de cravache, chiens aboyants, les SS grimpent dans les wagons pour achever les mourants, pousser ou jeter tout le monde dehors, exécuter ceux qui renâclent, résistent ou tentent de s’enfuir. Le convoi des tatoués va vivre là une douzaine de jours dans la peur et l’incertitude.

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En quelques jours, Desnos et ses compagnons peuvent se rendre compte des traitements infligés aux juifs de toutes les nations. Ils observent la Solution finale en marche. Avant de partir, un officier SS leur dit : « Oubliez tout. Ne dites rien de ce que vous avez vu ; vous partez pour un camp modèle d’Allemagne : Buchenwald ».

Quel reportage en effet, doit se dire le poète qui, bien « qu’hallucinant d’espoir » pour ses camarades, vient de découvrir l’indicible, la folie meurtrière au quotidien, mais aussi la hiérarchie entre les déportés, le rôle des kapos, la haine entre les nationalités, l’avilissement de certains. De quoi perdre ses rêves… Mais l’essentiel est de ne pas devenir le sous-homme qu’on attend de lui.

« L’arrivée à Buchenwald est un enchantement », témoigne un compagnon du convoi des tatoués. Après Weimar, après la forêt de Thuringe, le train grimpe une colline pittoresque et s’arrête presque au sommet dans une clairière.

Certes les pelouses sont entretenues, les maisons fleuries, mais les coups de crosse, les ordres hurlés et les morsures de chien forment le comité d’accueil. Sur la porte grillagée est inscrite cette phrase « Jedem das seine » (« A chacun son dû » dont le poète, après s’être fait traduire les mots, saisis l’humour plus que noir. Car ils sont comptés et frappés en même temps.

C’est alors que l’on voit Robert Desnos s’en aller de groupe en groupe, plaisanter un moment avec les hommes et, prenant leur bras, lire dans les lignes de leur main. Et il leur parle de leur avenir avec une telle confiance et une si grande tranquille assurance, que peu à peu le miracle se produit : ces hommes désespérés un instant plus tôt, oublient leur condition misérable et l’on voit leur visage s’éclairer d’une lueur d’espoir. Ses compagnons rescapés se souviendront avec émotion la scène de ce soir-là demeurée dans leur mémoire comme une véritable scène de légende.

Desnos vivra là, du 14 mai au 23 mai 1944.

Programmation musicale

Rubens Bassini y Los Latinos
Maracas ( surda)
FAR OUT STEREO

Robert Desnos
Sol de compiègne + Maracas (brihante)
Poèmes et chants concentrationnaires
Michel Bouquet, interprète
BAM

Michel Hostettler et Robert Desnos
La rose - pour voix égales à cappella
Bleu de lune
GALLO

Jean Martin
Ce cœur qui haïssait la guerre + Maracas (surda)
La Résistance
CHANT DU MONDE

Michel Hostettler et Robert Desnos
Le coquelicot - pour voix égales à cappella + maracas (surda)
Bleu de lune
GALLO

Michel Hostettler et Robert Desnos
Le rouge-gorge - pour voix égales à cappella
Bleu de lune
GALLO

Robert Desnos
Le dernier poème
Jean-Louis Trintignant, interprète
UNIVERSAL MUSIC

Rubens Bassini y Los Latinos
Maracas (brihante)
FAR OUT STEREO

Histoires de Musique
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