Pas de diffusion ce jour en raison d'un mouvement social (Elsa Barraine : un oubli inexpliqué)

Le 28 juin 1929, la compositrice française Elsa Barraine remporte le Grand Prix de Rome à l’âge de 19 ans. Cette récompense représente à la fois un tremplin et un frein pour elle. Tremplin car son nom circule partout, mais frein parce qu’en résidence à la Villa Médicis à Rome, elle perd toute son inspiration. Dès qu’elle le peut, Elsa Barraine trouve des excuses pour quitter l'Italie et retrouver Paris. Par exemple en 1932, elle s'échappe pour assister aux répétitions de son premier opéra, Le Roi comique, donné à l’Opéra-Comique.

Dans les années 30, Elsa Barraine séjourne donc en Italie où elle est aux premières loges pour observer la montée du fascisme. D’origine juive, elle sait ce qui se passe. En 1934, elle compose Pogromes, inspiré d’un poème contre le nazisme. Et, après avoir rejoint le Parti communiste français, la compositrice profite d’une commande de l’Etat pour enfin s’attaquer à ce qu’elle préfère : l’écriture orchestrale.

Juste avant le début de la Seconde Guerre mondiale, elle compose une symphonique (sa deuxième) qu'elle intitule Voïna, qui en russe veut dire guerre. Avec cette musique, Elsa Barraine annonce les terribles années à venir…

Elsa Barraine pendant la guerre

Pendant la guerre, Elsa Barraine s’engage. Licenciée de son travail à la radiodiffusion française parce que juive, elle crée avec Roger Désormière et Louis Durey, le Comité du Front National de la Résistance des Musiciens français. Au programme : organiser des concerts clandestins, soutenir les artistes d’origine juive, et continuer à composer, en soutien à la Résistance, et contre la collaboration allemande.

Elle survit à la guerre, mais tout se complique après. En 1949, elle quitte le Parti communiste... Ce départ lui met de nombreuses personnes à dos. Elsa Barraine se retrouve quasiment sans soutien, ni commandes d'œuvres et compte désormais peu d'amis. Elle retrouve tout de même les bancs du conservatoire de Paris en tant que professeur, mais délaisse la composition. C’est une des raisons qui explique que sa musique soit encore peu connue. Pour le reste : il ne tient qu'aux artistes de s'en emparer pour rendre justice à cette compositrice engagée, talentueuse et encore trop peu reconnue.