La Fête de la Musique organisée par le ministère de la Culture la semaine dernière avait de quoi surprendre... En effet, à l'heure des économies annoncées, l'événement a couté plus de 800 000euros. Mais que dit plus largement ce scandale du ministère ?
Un scandale, il n’y a pas d’autres mots. Comme l’a révélé le Canard enchaîné, le concert organisé pour la Fête de la musique par le ministère de la Culture a coûté près de 800 000 euros. Un tel montant est choquant à plusieurs titres. Déjà car ce concert était un événement réservé à seulement 1400 personnes invités, dans les jardins du Palais Royal, à Paris, juste au pied du ministère de la Culture.
Nous vous invitons à diviser le budget de cette opération par le nombre d’invités et vous obtiendrez un ratio assez spectaculaire du coût par spectateur. Et quand on rentre dans le détail, on voit aussi que le ministère surpaie ce type d’événement, avec des cachets de plusieurs dizaine de milliers d’euros pour certains artistes, pour des prestations d’une trentaine de minutes. La raison est simple : le ministère n’est pas un organisateur d’événement culturel, et donc pour les prestataires, c’est du pain béni ; ils peuvent proposer leurs services au prix fort. Le seul problème, c’est que cela se fait avec l’argent public.
Dans un moment où paradoxalement le ministère de la Culture doit freiner ses dépenses…
C’est en tout cas le message qu’entendent les acteurs culturels. Après la période du « quoi qu’il en coûte » pendant la crise sanitaire, le secteur se prépare à un retour à l’austérité. Dans ce contexte, obtenir des subventions de l’Etat, les fameuses aides au projet, en particulier pour les jeunes entrants dans le monde culturel, relève du parcours du combattant. Des structures montent d’imposants dossiers en espérant toucher au mieux quelques milliers d’euros. Il y a donc un poids deux mesures, entre d’un côté des dépenses somptuaires pour une soirée réservée à un public trié sur le volet ; et de l’autre, la fragilité économique dans laquelle vivent un grand nombre de structures qui font pourtant vivre la musique classique et la rendent accessible au plus grand nombre.
Qu’est-ce que dit ce scandale du ministère de la Culture ?
Il montre une forme de faillite de la Rue de Valois. Les magistrats de la Cour des Comptes avait récemment épinglé le ministère pour son absence de vision, et appelaient à sa transformation.
Le scandale créé par cette fête de la musique montre qu’il y a désormais urgence. Car pendant que la Rue de Valois prépare à grand frais ce type d’événement, le secteur lui fait aujourd’hui face à des enjeux majeurs, comme la baisse de fréquentation dans les lieux culturels. La Cour des comptes affirmait que le ministère avait perdu son caractère primordial : le rôle du ministère a en effet nettement diminué, au profit d’autres acteurs, comme par exemple en ce qui concerne la musique, le CNM, le centre national de la musique, qui s’est retrouvé au premier plan durant la crise sanitaire. Après cette affaire de la Fête de la musique, il faut désormais que la nouvelle ministre Rima Abdul Malak lance une véritable réforme du ministère, revoit ses missions, redonne de l’attractivité à la Rue de Valois. Car sinon, entre la place des collectivités, qui sont les premiers financeurs de la culture, et celle des entreprises privées, le sens même du ministère pourrait être questionné.
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