Hélène Derieux : Les aspects thérapeutiques du chant sacré médiéval

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Lauréate du concours doctoral de l'UFR de Musicologie de Sorbonne Université, Hélène travaille sur les aspects thérapeutiques du chant sacré médiéval dans une approche musicologique, anthropologique et neuroscientifique sous la direction de Frédéric Billiet et Philippe Lalitte.

Hélène Derieux est chanteuse et chef de chœur, elle dirige notamment l’ensemble Gaudete, ensemble à géométrie variable mettant en valeur le répertoire du chant sacré médiéval occidental en dialogue avec différents arts et traditions. Elle est actuellement doctorante à Sorbonne-Université (1ère année), ses recherches concernent les aspects thérapeutiques du chant sacré médiéval dans une approche musicologique, anthropologique et neuroscientifique. Elle effectue sa thèse sous la direction de Frédéric Billet et Philippe Lalitte.

"Il y a quelques années, j’ai un ami, ancien chantre de Notre-Dame, qui a été chez les indiens Shipibos au Pérou et qui leur a chanté du chant dit « grégorien », donc du chant sacré médiéval. Les indiens ont réagi en lui disant : « Ah ! Toi aussi, tu as un chant-médecine », parce qu’ils utilisent au quotidien le chant pour soigner. Cela m’a interpellée et m’a ramené à ma propre pratique musicale, à ce que j’avais constaté sur moi-même et à ce que me rapportaient les choristes ou les auditeurs. C’est à ce moment là qu’est née l’idée d’étudier scientifiquement cet aspect on peut dire « thérapeutique » du chant sacré médiéval occidental dans le cadre d’une thèse.

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Tout d’abord, est-ce que le chant sacré médiéval était conçu comme une thérapie à l’époque ? Il faut préciser que le répertoire que j’étudie est liturgique, c’est-à-dire qu’il est destiné à être chanté pendant les offices et les messes, non seulement dans les monastères, mais aussi dans les églises et cathédrales. C’est donc un répertoire qui est pensé pour favoriser l’intériorité et la contemplation. Mais est-il vu comme proprement thérapeutique pour autant ? C’est une question que j’explore au travers des sources notamment les traités de musique, bien-sûr, mais aussi les traités de médecine, puisque certains traités de médecine médiévaux mentionnent la musique et le chant comme faisant parti de l’attirail thérapeutique du médecin, c’est beaucoup le cas dans le monde médiéval oriental, mais aussi en occident. J’étudie également l’iconographie, en d’autres termes, les illustrations des manuscrits qui ont trait au chant.

Ensuite, qu’est-ce qui dans ce chant peut être considéré comme thérapeutique ? Je pense à la manière dont cette musique est structurée, c’est-à-dire en termes techniques à son aspect modal, à des aspects rythmiques, à des aspects ayant trait à la gamme utilisée - qui n’était pas la gamme moderne dite « tempérée » telle que vous la trouverez sur un piano -, et à des aspects liées à la résonance des églises anciennes qui amplifient les harmoniques du son, c’est-à-dire les éléments qui le composent.

Enfin, je me demande aussi comment mesurer ces aspects thérapeutiques en effectuant notamment des tests d’écoute, en comparant un groupe témoin et un groupe test et en suivant l’évolution des certains paramètres physiologiques comme le rythme cardiaque et la tension artérielle. Tout cela pourra, je l’espère, être utile en matière d’interprétation du chant sacré médiéval et pourra avoir peut-être des applications ensuite en musicothérapie."

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