Piotr Kaminski, Pauline Sommelet et Jean-Philippe Thiellay élisent la version de référence de La Bohème de Giacomo Puccini.
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Le Compte-rendu de Jérémie Rousseau
On se régale d’abord de deux superbes numéros vocaux : Carlo Bergonzi, plus prince que poète de mansarde, et Renata Tebaldi, plus Tosca que cousette. Enveloppant le tout, le geste de Tullio Serafin déploie la grande et luxuriante cantilène puccinienne. Serait-ce un peu trop ?
Georg Solti ne laisse pas beaucoup d’air à ses solistes, resserrant la narration au point d’étouffer le discours. En dépit de quelques raideurs dans l’aigu, Plácido Domingo est un Rodolfo tout feu tout flamme, face à une Montserrat Caballé d’une beauté de timbre à se damner, cousette ardente et juvénile, jusque dans ces délicieuses coquetteries.
La Mimi de Victoria de Los Ángeles bouleverse, avec cette lumière dans le timbre et ces mots frémissants qui dessinent une héroïne coquine, séductrice, tendre en diable : le « génie de l’artifice du naturel » lance un tribun. Jussi Björling déploie un chant linéaire, couronné d’un contre-ut solaire, mais ce Rodolfo ne tarde pas à ennuyer. Fort heureusement, Thomas Beecham est là, attentif, à l’écoute. Une Bohème au charme impérissable.
« Quand Luciano Pavarotti chante, le soleil se lève sur le monde » lança un jour Carlos Kleiber. Comme on le comprend ! Rodolfo fut le rôle signature du ténor italien, qui en maîtrise la moindre inflexion, déployant aigus radieux et ligne souveraine. Il a la partenaire la plus merveilleuse qui soit, Mimi pour l’éternité, une Mirella Freni naturelle, chaleureuse, sans le moindre artifice. Et là-dessus, la Philharmonie de Berlin ensorceleuse d’Herbert von Karajan embrase le tout, dans une prise de son grandiose. Peu d’intimité, mais quel spectacle !
Nulle part ailleurs que dans la battue vif-argent de Thomas Schippers on aura cette impression d’immédiate spontanéité. Que de fraîcheur ! Quel peps dans l’orchestre ! On sent un mouvement irrépressible : telle cette fièvre qui gagne l’acte II, superbement montée, avec de petites silhouettes surgissant de partout. Neuf ans avant Karajan, la jeune Freni éblouit, incandescente de présence, de soleil et d’énergie. Nicolai Gedda, d’un profil plus belcantiste que lirico spinto, susurre un Rodolfo rêveur, lyrique et enflammé, d’une sobriété bienvenue dans une scène finale vécue de l’intérieure. Une bien grande version décidément.
Quel théâtre ! Le Rodolfo de Roberto Alagna fait le prix de cette intégrale. Car il a tout : l’aisance et le naturel du texte, le sourire dans la voix, ce charme irrésistible par lequel il séduit sa Mimi. En deux mots on succombe. Avec la délicate Angela Gheorghiu, ils jouent un couple irrésistible, se parlent, c’est confondant de vérité : comme si on assistait pour la première fois à leur rencontre ! La baguette vive et cursive de Riccardo Chailly emporte tout, précise, complice, jamais tapageuse, avec une équipe de seconds rôles à l’unisson. L’opéra comme on l’aime.
Palmarès
N°1) : Version D
Roberto Alagna, Angela Gheorghiu, Chœurs et Orchestre de la Scala de Milan, dir. Riccardo Chailly
Decca (1998)
N°2) : Version F
Mirella Freni , Nicolai Gedda , Chœurs et Orchestre de l’Opéra de Rome, dir. Thomas Schippers
Warner (1963)
N°3) : Version E
Mirella Freni, Luciano Pavarotti, Chœurs de l’Opéra de Berlin, Orchestre philharmonique de Berlin, dir. Herbert von Karajan
Decca (1972)
N°4) : Version C
Jussi Björling, Victoria de los Ángeles, Chœurs et Orchestre de la RCA Victor, dir. Thomas Beecham
EMI (1962)
N°5) : Version B
Plácido Domingo, Montserrat Caballé, Chœur John Alldis, Orchestre philharmonique de Londres, dir. Georg Solti
RCA (1974)
N°6) : Version A
Renata Tebaldi, Carlo Bergonzi, Chœurs et Orchestre de l’Académie nationale Sainte-Cécile, dir. Tullio Serafin
EMI (1959)
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