Le musicologue vient évoquer la programmation autour de Luigi Nono au Festival d’Automne, du 4 septembre au 31 décembre à Paris et en Ile-de-France.
Le billet d’Arnaud Merlin
C’est tout près de Paris, cela se passe en ce moment, et c’est jusqu’au 25 janvier prochain, vous avez donc tout le temps mais ne loupez pas cette exposition qui se tient au MAC/VAL, le musée d’art contemporain du Val-de-Marne qui se trouve à Vitry-sur-Seine, et qui présente parmi d’autres pièces, une œuvre monumentale de l’artiste Tania Mouraud, sous le titre de « Ad nauseam »… De quoi s’agit-il ? Dans le noir, une immense salle d’exposition est entièrement consacrée à une installation audiovisuelle qui offre sur trois grands écrans juxtaposés des images très impressionnantes, tournées dans une usine de recyclage de papier, où l’on voit défiler, et se faire broyer, des kilomètres de livres et de magazines, alors même que l’on cherche en vain toute présence humaine… Et si je vous en parle ce soir, c’est tout simplement parce que cette installation ne se limite pas à l’image, elle a en effet été réalisée avec la collaboration des équipes de l’Ircam pour la bande son, en l’occurrence avec Thomas Goepfer, qui est réalisateur en informatique musicale, et avec Sylvain Cadars qui est ingénieur du son. On est ainsi plongé au cœur d’une œuvre qui associe pleinement le sonore, qui a été travaillé, tant en ce qui concerne la prise de son elle-même que sa mise en espace. Et pour l’occasion, Tania Mouraud est venue elle-même travailler à l’Ircam. Or ce type d’échanges entre le milieu des arts plastiques et celui de la musique contemporaine est encore très rare, c’est d’autant plus dommage lorsque l’on voit le succès des installations d’art contemporain, qui pourraient aisément intégrer la dimension sonore. Alors bien sûr, rien ne peut remplacer l’expérience directe que je vous conseille de vivre directement au Mac/Val, mais pour vous en donner une idée, voici un petit extrait de la bande son qui y est associée…
**♫ ** Tania Mouraud / Thomas Goepfer / Sylvain Cadars
Ad Nauseam (bande son de l’exposition)
MAC/VAL, Vitry, exposition jusqu’au 25 janvier 2015
Le reportage de Pierre Rigaudière
« L’Inde et le monde » à Royaumont
Dans le cadre des concerts de « musiques transculturelles » que dirige Frédéric Deval à l’abbaye de Royaumont, une journée était consacrée en septembre dernier à l’Inde et à ses nouveaux rapports avec le monde. L’un des trois concerts, centré sur la diaspora indienne dans le monde, reposait sur une rencontre : celle du **quatuor Caravaggio ** (dirigé par le compositeur Benjamin de la Fuente), dont la pratique musicale tend à estomper la frontière entre écriture et improvisation, avec Sumik Datta, jeune virtuose du sarod vivant à Londres, et Prabhu Edouard, français originaire de Pondichéry, formé en Inde par le maître de tabla Shankar Gosh.
Les musiciens exposent les enjeux de ce concert précédé d’une résidence à Royaumont, insistant chacun à leur façon sur leurs différences culturelles, irréductibles mais pourtant particulièrement stimulantes et fécondes.
Illustrations musicales :
♫ Extraits du concert du 13 septembre 2014.
Document sonore de la Fondation Royaumont.
Sumik Datta, sarod
Prabhu Edouard, tabla
Benjamin de la Fuente, composition, violon
Samuel Sighicelli, claviers
Bruno Chevillon, contrebasse
Eric Echampard, batterie, percussions
Un aperçu du concert donné le 13 septembre à Royaumont : "L'Inde et le monde : ici Londres..." :


L’invité : Laurent Feneyrou
Laurent Feneyrou est musicologue. Boursier Lavoisier du ministère des Affaires étrangères, il est successivement conseiller pédagogique à l’Ircam, conseiller musical auprès de la direction de France Culture et directeur adjoint de l’Institut d’esthétique des arts contemporains (C.N.R.S. – Université de Paris I, U.M.R. 8592). Il est actuellement membre de l’équipe Analyse des pratiques musicales (Ircam – C.N.R.S.-U.P.M.C.) et codirige avec Frédéric Durieux le séminaire « Composition et musicologie contemporaines » au Conservatoire national supérieur de musique et de danse de Paris. Ses recherches portent sur les relations entre musique et politique, principalement sur l’esthétique d’inspiration marxiste, mais aussi sur les traités et les techniques d’écriture et sur les théories compositionnelles contemporaines en tant que conditions de possibilité de l’œuvre. Éditeur des écrits de Jean Barraqué (Paris, 2001), de Giacomo Manzoni (Paris, 2006) et de Luigi Nono (nouvelle édition, Genève, 2007), il a dirigé plusieurs ouvrages collectifs.
Quelques ouvrages publiés par Laurent Feneyrou :
-* Théories de la composition musicale au XXe siècle*, avec Nicolas Donin, Lyon, Symétrie, 2013.
-* Écrits* de Luigi Nono (nouvelle édition), Genève, Contrechamps, 2007.
-* Résistances et utopies sonores, musique et politique au XXe siècle*, Paris, CDMC, 2005.
-* Musique et dramaturgie, esthétique de la représentation au XXe siècle*, Paris, Publications de la Sorbonne, coll. « Esthétique », 2003.
-* « Il canto sospeso » de Luigi Nono*, Paris, Michel de Maule, coll. « Musique & Analyse », 2002.
Le Festival d’Automne à Paris : **
Chaque année, durant quatre mois, le Festival d’Automne invite à Paris et en Île-de-France des artistes du monde entier qui, dans toutes les disciplines, savent nous surprendre par des figures inouïes, osent déplacer les frontières entre les arts. Ces artistes contribuent ainsi à nous changer nous-mêmes, à renouveler sans cesse nos questionnements. Le Festival impulse et favorise la réalisation de leurs projets.
Producteur et coproducteur, il est au cœur de la création, de la recherche et des formes multiples de l’art. Il demeure épris de différences, curieux de rêves, fervent d’étrangetés. Avec plus de cinquante propositions venues de quinze pays, nous nous enrichissons de cette diversité.
Développant les portraits d’artistes, à l’instar de celui consacré à Robert Wilson en 2013, ** le Festival propose de parcourir l’œuvre de trois créateurs essentiels de ces dernières décennies : le chorégraphe américain William Forsythe, le metteur en scène italien Romeo Castellucci et le compositeur italien Luigi Nono.
En savoir + sur le programme du Festival d’Automne à Paris, du 4 septembre au 31 décembre 2014 : site du Festival.
► Programmation musicale :
♫ Odette Gartenlaub (1922-2014)
Rêve
Nadia Tagrine, piano
♫ Luigi Nono (1924-1990)
Como una ola de fuerza y luz
Maurizio Pollini, piano
Orchestre symphonique de la Radio bavaroise
Claudio Abbado, direction
CD Deutsche Grammophon 423 248-2
♫ **Luigi Nono ** (1924-1990)
Canti di vita e d'amore - Djamila Boupachà
Sarah Leonard, soprano
Orchestre symphonique de Bamberg
Ingo Metzmacher, direction
CD EMI 7243 5 55424 2 7
**♫ ** **Helmut Lachenmann ** (né en 1935)
Air
Christian Dierstein, percussion
Orchestre d'Etat de Stuttgart
Lothar Zagrosek, direction
CD col legno WWE 20511
**♫ ** **Claudio Monteverdi ** (1567-1643)
Selva morale e spirituale – Dixit Dominus Secondo
Cantus Cölln
Concerto Palatino
Konrad Junghänel
Harmonia Mundi 901718.20
**♫ ** Luigi Nono (1924-1990)
Prometeo – IX. Stasimo 2°
Petra Hoffmann, Monika Bair-Ivenz, sopranos
Susanne Otto, Noa Frenkel, altos
Hubert Mayer, ténor
André Richard, direction
Enr. Mai 2003
Luigi Nono « Prometeo, Tragedia dell’ascolto »
CD Col Legno WWE 20605
► Réécoutez pendant 30 jours le concert diffusé en première partie de soirée dans les Lundis de la contemporaine : Burning bright de Hugues Dufourt par Les Percussions de Strasbourg
L'équipe
- Production