« Le Chant de la Terre » de Gustav Mahler dans une version inédite, enregistrée en public au Théâtre des Champs Elysées le 21 avril 1964. L’Orchestre National de France était dirigé par Paul Kletzki, avec le ténor Ernst Haefliger et la mezzo-soprano Nan Merriman …
Pendant deux années entières, Mahler conservera dans ses tiroirs la partition inachevée du Lied von der Erde. Sans doute cette œuvre le touche-t-il trop profondément pour qu’il se résolve à la faire exécuter. Mahler mourra en 1911 sans avoir encore fixé la date de la première audition du Chant de la Terre. C’est Bruno Walter qui allait la diriger à sa place à Munich, le 20 novembre 1911, six mois après la mort du compositeur, au cours d’un concert dédié à sa mémoire. Peu d’ouvrages posthumes devaient jamais connaître un triomphe semblable dans les années qui suivirent. Das Lied von der Erde a plus fait pour la gloire de Mahler que le reste de son œuvre.
Depuis le sommet de lumière où l’a conduit son ascèse lucide, le musicien contemple la totalité du paysage visible et invisible. Il l’assume, il l’incarne et nous le restitue.
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Dans ce moment unique de la musique occidentale, éclairée d’une lumière orientale qui pourrait, dans les premiers mouvements, faire l’effet d’un simple décor chinois, la consolation, la paix soufflent sur l’être humain, résolu à se fondre dans cette nature qui, éternelle, refleurit à chaque printemps. Comment un musicien a-t-il pu, avec des moyens aussi raréfiés – une voix d’alto répétant les deux mêmes notes, quelques instruments bien choisis, un accord parfait d’ut majeur et une sixte “ajoutée” – suggérer, en quelques mesures et de manière aussi forte, le temps et l’espace sans limites, et avec des accents tout à la fois si douloureux et pourtant habités d’espoir et de sérénité ? Il y a, bien sûr, que la musique est le seul de tous les arts à pouvoir exprimer dans le même instant l’élément et le tout, les sensations les plus différentes, les sentiments les plus opposés, les pensées les plus contradictoires. Mais encore faut-il, comme Mahler, être parvenu à un degré supérieur de conscience pour dominer, organiser et sublimer cette matière insaisissable. Depuis le sommet de lumière où l’a conduit son ascèse lucide, le musicien contemple la totalité du paysage visible et invisible. Il l’assume, il l’incarne et nous le restitue.
Henry-Louis de La Grange (societemahler-france.org)
Programmation musicale
Gustav Mahler (1860-1911)
Das Lied von der Erde (Le Chant de la Terre) (1907) :
Das Trinklied vom Jammer der Erde (La Chanson à boire de la douleur de la Terre)
Der Einsame im Herbst (Le Solitaire en automne)
Von der Jugend (De la jeunesse)
Von der Schönheit (De la beauté)
Der Trunkene im Frühling (L'Homme ivre au printemps)
Ernst Haefliger, ténor
Nan Merriman, mezzo-soprano
Orchestre national de la RTF, dir. Paul Kletzki
(Paris, Théâtre des Champs-Elysées, le 21 avril 1964)
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